BRUNO LILJEFORS. La Suède sauvage. Avec cet artiste, le Petit Palais clôt ses hommages au fameux trio suédois « ABC », Anders Zorn (Lettre 438), Bruno Liljefors (1860-1839) (Lettre de ce jour) et Carl Larsson (Lettre 366). Pour ce faire, les commissaires ont réuni une centaine d’œuvres, peintures dont plusieurs compositions de très grandes dimensions, dessins et photographies provenant des plus grands musées suédois et de nombreuses collections privées. En France, le musée d’Orsay est la seule institution publique qui possède une toile de Liljefors. Elle a été achetée en 1913, à la demande du président Raymond Poincaré, lors du premier Salon des artistes animaliers à Paris. Le parcours de l’exposition est à la fois chronologique et thématique.
Passionné dès son plus jeune âge par le dessin sur le vif et la caricature, Liljefors s’inscrit en 1879 à l’Académie royale de peinture où il rencontre Anders Zorn (1860-1920) qui restera son ami toute sa vie. Tous deux contestent rapidement l’enseignement dispensé à l’Académie, jugé trop restrictif, et rejoignent le groupe des «Opposants» qui militent pour l’instauration d’une «nouvelle peinture» en Suède. Liljefors fait alors des voyages en Allemagne et en Italie puis se rend à Paris. Il s’établit quelque temps à Grez-sur-Loing, au sud-est de Paris, où réside une colonie d’artistes nordiques dont Carl Larsson. Il bénéficie des leçons des artistes du «plein air» français, des peintres de l’école de Barbizon, des impressionnistes et des naturalistes, dont Jules Bastien-Lepage (Lettre 269). Néanmoins il ne reste pas longtemps en France et retourne définitivement en Suède en 1884, où il se consacre exclusivement à la représentation de la nature suédoise et de ses animaux. Dans cette première partie, «Premiers voyages», nous ne voyons que quatre peintures faites à Grey, un Renard (1887), un Pêcher en fleurs (1884) une scène Au bord de l’eau (1887) et un Portrait de Carl Larsson (1884), mais aussi un portrait de sa première femme, Anna (1885) dont il divorcera pour épouser sa sœur, quelques scènes d’extérieur et plusieurs représentations d’animaux, dont son sujet favori, le chat guettant sa proie. Dans la deuxième section «La tentation japonisante», nous n’avons que des représentations d’animaux. Des Renards, une Hermine, des Chats croquant des oiseaux, un autre, Jeppe, qui dort au soleil, et toutes sortes d’oiseaux. Même s’il s’en défend, on sent l’inspiration des modèles nippons très répandus en Europe dans les années 1860 et 1870, avec des cadrages verticaux, l’absence d’horizon et des assemblages de plusieurs peintures dans un grand cadre en bois doré rappelant le procédé de l’harimaze. Quelques oiseaux naturalisés nous montrent avec quel soin, Liljefors les représentait. C’est d’ailleurs le sujet de la troisième section, «Le peintre grimpeur». L’artiste, excellent gymnaste et acrobate (il avait même fait du cirque), également chasseur depuis sa jeunesse, déploie ses talents en installant des abris pour se camoufler, en grimpant dans les arbres pour observer, voire réparer les nids, et en prenant des photographies. Celles-ci et les dessins pris sur le vif lui permettent de restituer des scènes vivantes, de plus en plus précises et maîtrisées au fil du temps. Dans la quatrième partie, «Lectures darwiniennes», nous voyons avec quel art, Liljefors représente les animaux, dans leur environnement, et leur mode de vie, depuis les parades amoureuses jusqu’au nourrissage des petits. Tous ont un rôle à jouer dans cette grande interdépendance et s’adaptent à une nature sauvage. C’est le cas du Lièvre variable (1905) qui change de couleur en hiver, son pelage devenant blanc comme la neige. La Suède est aussi un pays au bord de la mer. C’est le thème de la cinquième section «Au bord de la vaste mer». C’est dans celle-ci que nous voyons ses plus grandes compositions comme ses Eiders dans les vagues (1899), ses Oies sauvages atterrissant (1899), ses Plongeons arctiques (1901) ou encore ses Pygargues à queue blanche (1897), des aigles de mer pourchassant au large un oiseau marin. Dans certaines de ses toiles, on sent l’influence du «romantisme national» en vogue ces années-là en Suède, où les artistes abandonnent la peinture d’histoire au profit de la représentation de paysages et d’atmosphères clairement identifiables. Le parcours se termine par une évocation des dioramas auxquels Liljefors participa, tant pour la peinture des grandes toiles de fond que pour l’installation des animaux naturalisés dans des paysages recréant leur cadre de vie. Une très belle exposition, bénéficiant d’une magnifique scénographie avec un grand nombre de cartels développés fort intéressants. R.P. Petit Palais 8e. Jusqu’au 16 février 2025. Lien: www.petitpalais.paris.fr. Pour vous abonner gratuitement à la Newsletter cliquez ici
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