CHRISTIAN KROHG
LE PEUPLE DU NORD

Article publié dans la Lettre n°615 du 30 avril 2025



 
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CHRISTIAN KROHG. LE PEUPLE DU NORD. Après Edvard Munch (Lettre 557) et Harriet Backer (Lettre 601), le musée d’Orsay nous présente un troisième peintre norvégien, Christian Krohg (1852-1925), peu connu hors de son pays, ce qui est bien dommage. Cette rétrospective est donc la toute première en dehors de la Scandinavie.
Le parcours de l’exposition, en quatre sections, nous présente les différents centres d’intérêt de cet artiste, à la fois peintre, écrivain et journaliste engagé, qui eut Munch pour élève. Après une introduction où l’on voit les différents lieux où Krohg séjourna en dehors de Kristiania (aujourd’hui Oslo), sa ville natale, en particulier Skagen au Danemark et Paris, nous commençons par ses peintures de marins. Krohg dépeint la vie de ces hommes, depuis la préparation d’un projet jusqu’au sauvetage d’un homme tombé à la mer en passant par les ordres donnés aux marins et les manœuvres à exécuter. Ce qui est remarquable, c’est qu’il nous présente ces marins en gros plans, comme des instantanés, nous laissant deviner le contexte de leurs gestes. Pour lui, «tout est une question de cadrage». Dans cette section, on constate déjà la forte influence que lui firent, lors de ses séjours à Paris, des peintres tels Courbet, Manet et surtout Caillebotte avec lequel il travailla. À ce dernier, il emprunte son fameux sujet de rameur et celui d’homme au balcon. Des reproductions de ces derniers sont présentées à côté des tableaux de Krohg.
La deuxième section, «La Bohème de Kristiania», nous montre une galerie de portraits de grandes tailles de ces hommes et femmes qui voulaient bousculer la capitale norvégienne sur des sujets tels la pauvreté urbaine, la religion, la prostitution, les droits des femmes, etc. Krogh devint l’un de chefs de file de ce mouvement connu sous le nom de « percée moderne » ou de naturalisme scandinave. Parmi ces tableaux, on remarque l’imposant Portrait d’August Strindberg (1893) et celui d’Oda Lasson qu’il épousera quelques mois plus tard (Portrait de la peintre Oda Krohg, 1888). Dans les autres tableaux, on note la présence de plusieurs de ses confrères peintres.
Avec « Un art social », nous touchons au plus profond de l’œuvre de Krohg. Pour lui, l’art doit s’adresser à un large public tout en abordant des sujets sociaux. Dans cette section se trouvent ses deux œuvres majeures. La première, La Lutte pour l’existence (1889), nous montre un attroupement de femmes et d’enfants tentant, en plein hiver, d’attraper le pain rassis que leur offre un boulanger, sous l’œil indifférent d’un policier qui passe dans la rue. La seconde, Albertine dans la salle d’attente du médecin de police (1885-1887), est une toile gigantesque avec des personnages de tailles quasi réelles. Elle représente des prostituées convoquées pour des examens en vue d’éviter la propagation des maladies sexuellement transmissibles. Avant cela, Krohg avait publié un livre, Albertine, où il décrivait ce que lui avait raconté une femme, violée par un agent de police et sombrant ensuite dans la prostitution. Ce livre avait été immédiatement saisi par la police, d’où un énorme scandale. Toute une partie de la troisième section est consacrée à Albertine, avec divers documents, livres et tableaux sur ce sujet. Krohg s’attache aussi à montrer comment des couturières, épuisées par un travail ingrat, n’ont d’autres recours pour vivre que de se prostituer.
L’exposition se termine avec un thème plus gai, «Peindre la famille». Krohg nous montre des mères veillant leurs enfants, leur tressant les cheveux, leurs racontant des histoires ou endormies à côté d’eux; des pères attentionnés, une image peu conventionnelle, surprenante aussi pour les défenseurs de la Bohème; ou encore des bébés assis sur des canapés. Dans cette section, on voit aussi deux jolis toiles sur le même thème peintes par Oda Krohg.
Une exposition passionnante, avec des tableaux magnifiques, criants de vérité. R.P. Musée d’Orsay 7e. Jusqu’au 27 juillet 2025. Lien : www.musee-orsay.fr.


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