FLAMMES DE SCIENCE – PRIX NO’BELL. Texte Elisabeth Bouchaud. Mise en scène Marie Steen. Avec Clémentine Lebocey, Roxane Driay, Benoit Di Marco.
Après Flammes de science - Exil intérieur, qui retrace la vie de la physicienne Lise Meitner (n°559), rendez-vous était pris pour celle de Jocelyn Bell, astrophysicienne d’origine irlandaise.
Si le parcours professionnel de Lise Meitner se situe dans des années tragiques de l’histoire, propices à une forte dramaturgie, celui de Jocelyn Bell, née en 1943, a lieu dans l’Angleterre des années 60, une période historique moins troublée, excepté l’envie, pour les étudiants britanniques, d’adopter en 68 le mouvement des étudiants français ! C’est pourquoi ce volet se concentre sur le caractère et le génie de la jeune étudiante et son impossibilité, durant ses années de thèse, à s’imposer comme astrophysicienne, face à un environnement exclusivement masculin. Elle est quotidiennement chahutée par ses paires à l’université, pour être la seule fille à étudier la physique. Anthony Hewish, son directeur de thèse - excellent Benoit Di Marco - s’approprie sa découverte et obtient le Prix Nobel en 1974 sans que le nom de Bell ne soit évoqué, malgré les réactions de ses confrères, scandalisés par cette injustice. Mise à l’écart, seul le nom de Pulsar qu’elle donna à sa découverte, fut adopté.
Bien accompagnée par Roxane Driay, dans le rôle de Janet, colocataire et amie dont le parcours intellectuel est tout aussi édifiant, Clémentine Lebocey, dopée par une mise en scène virevoltante, insuffle au personnage de Jocelyn Bell cet enthousiasme qui était certainement son moteur. On assiste là à la naissance d’une scientifique de génie de vingt ans, très peu sûre de son niveau, mais dont le caractère passionné et positif lui permet de poursuivre ses recherches sans jamais s’appesantir sur les contrariétés. Des déceptions l’animent sans doute mais sans amertume. Elle écrira en 1979 qu’elle trouvait normal qu’un prix Nobel soit accordé au directeur de thèse et non à son étudiant. Totalement investie et émerveillée par ce qu’elle découvre dans cette voûte étoilée pleine de mystères, sa tâche aurait dû la contraindre au célibat. Elle épouse pourtant un fonctionnaire, partage ses affectations, travaille à temps partiel pour élever son fils avec la même détermination, bravant ainsi les conventions de la société de l’époque.
Aujourd’hui, Jocelyn Bell estime que recevoir le prix Nobel trop jeune, doit être difficile à porter. Recevant un nombre impressionnant de prix durant sa carrière, anoblie par la Reine Elisabeth, cette grande dame des petites étoiles fut heureusement reconnue. Rosalind Franklin n’a pas eu cette chance, décédée avant que ne soit décerné le prix Nobel pour la mise au jour de la structure de l’ADN… Et combien d’autres ? M-P P. Théâtre La Reine Blanche 18e.