OLYMPISME
Une histoire du monde 1896-2024

Article publié dans la Lettre n°599 du 31 juillet 2024



 
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OLYMPISME, UNE HISTOIRE DU MONDE 1896-2024. C’est probablement l’exposition la plus intéressante sur les Jeux olympiques parmi toutes celles qui s’emparent de ce thème en cette année olympique à Paris. Conçue par une équipe de sept co-commissaires, la plupart historiens, elle nous raconte, au fil des olympiades, les faits marquants de chacune d’entre elles depuis la création du Comité International Olympique (CIO), en 1894 par Pierre de Coubertin. Le sujet pourrait paraître austère mais grâce à une scénographie originale, colorée et variée, à la présence de quelque 600 objets, films et photographies d’époque et à des panneaux didactiques intéressants et lisibles, même les enfants peuvent y prendre plaisir.
Le parcours de l’exposition est divisé en six grands périodes au sein desquelles sont présentés un à un les Jeux olympiques qui s’y sont déroulés. On commence par une introduction qui nous montre qu’il n’y a pas qu’un seul modèle d’athlète comme ceux du groupe des Lutteurs Médicis, pris jadis comme modèle, mais qu’il y a une multiplicité de corpulences alliant musculature et souplesse en fonction des sports pratiqués, de la gymnase au sumo.
La première période, «La (re)naissance de l’olympisme (1896-1920)» est celle des premiers Jeux et de l’élaboration de leur formule. Créé par des aristocrates, le CIO limite la participation aux classes aisées en imposant l’amateurisme. On verra plus tard qu’il devra supprimer le tennis des épreuves olympiques lorsqu’il y aura des joueurs vivant de ce sport. Autre règle, pas de femmes. Mais celles-ci, ne l’entendant pas ainsi, arrivent peu à peu à s’imposer, quitte à organiser en 1922 à Paris des Jeux Olympiques féminins. Les Jeux de Paris 2024 bénéficient pour la première fois d’une véritable parité. Les premiers Jeux (1896) se déroulent à Athènes avec le soutien de la famille royale grecque. Les trois suivants, Paris (1900), Saint-Louis (1904), où la participation étrangère est très faible du fait du coût du voyage, et Londres (1908) sont jumelés avec les expositions internationales. Ce n’est qu’à la cinquième édition, en 1912 à Stockholm, que les Jeux deviennent autonomes. Au cours de cette période, Saint-Louis se distingue en organisant des «Journées Anthropologiques» faisant s’affronter de prétendus «sauvages» dans des épreuves sportives.
Pour illustrer ces Jeux, nous avons des films d’époque, comme ceux de Jules Marey (1890-1904), des tenues de sport, des équipements sportifs, des affiches de ces Jeux, des photographies et même des objets souvenirs. Pour chacun des Jeux nous avons un tableau statistique recensant le nombre de nations participantes, le nombre d’athlètes, hommes, femmes et par continent et le nombre de médailles des trois premières nations.
Avec la guerre de 14-18, les Jeux sont annulés et il faut attendre 1920 pour les reprendre, à Anvers.
Une deuxième section commence alors, intitulée « Le temps des nationalismes (1920-1945) » qui nous emmène jusqu’aux Jeux très controversés de Berlin, en 1936. Ce sont les plus colossaux jusqu’alors, avec des cérémonies grandioses, dont Leni Riefenstahl tira le fameux film Olympia. En réaction à ces Jeux nazis, le mouvement sportif ouvrier international projette des Olympiades populaires à Barcelone. Mais la guerre civile espagnole ruine ce projet. Durant cette période, pour réduire le coût de la participation des athlètes étrangers, Los Angeles (1932) crée le premier village olympique, réservé aux hommes, les femmes logeant à l’hôtel.
La guerre empêche de nouveau la tenue des Jeux prévus en 1940 à Tokyo et en 1944 à Londres. Ils ne reprennent qu’en 1948, à Londres, malgré ses destructions, en remerciement de sa résistance durant le dernier conflit. Une troisième section s’ouvre alors, « Guerre froide et décolonisation (1945-1970) ». Pour la première fois l’URSS participe aux Jeux, ceux d’Helsinki (1952), en pleine Guerre froide. Le CIO organise également des Jeux dans l’hémisphère sud, à Melbourne (1956), où suite à la répression de la révolte de Budapest par l’URSS, une bagarre éclate entre athlètes Russes et Hongrois. Les pays qui viennent ensuite veulent faire oublier le fascisme pour l’un (Rome, 1960) et l’humiliation de la défaite (Tokyo, 1964). Quant à Mexico (1968), les Jeux se déroulent après des répressions sanglantes (on parle de 300 morts) des manifestants, étudiants et ouvriers, par la dictature au pouvoir. De ces derniers Jeux on retiendra surtout le poing levé de Tommie Smith et John Carlos sur le podium du 200 mètres, qui leur valut leur exclusion immédiate des Jeux puis de toutes les épreuves sportives avant d’être reçus par Obama en 2016.
La période suivante est riche en événements. «Vers un mode olympique multipolaire (1970-1990)»  voit les Jeux de Munich (1972) marqués par le terrible attentat de « Septembre noir » contre la délégation juive. Cela n’empêche pas Avery Brundage, le président du CIO, de poursuivre les compétitions (« The Games must go on ») malgré des critiques venues du monde entier. Ceux de Montréal (1976) ruinent la ville (il lui faudra trente ans pour rembourser les équipements démesurés qu’elle a fait construire) et subissent le boycott de 22 pays africains qui s’opposent à la présence de la Nouvelle-Zélande, qui entretient des liens avec l’Afrique du Sud. Moscou (1980) est boycotté par les États-Unis qui prennent prétexte de la guerre en Afghanistan. Los Angeles (1984) est à son tour boycotté par l’URSS. Les commissaires écrivent que l’URSS craint que ses athlètes passent à l’Ouest!
Seule bonne nouvelle, suite aux manifestations dans le pays avant l’arrivée des Jeux de Séoul (1988), la Corée du Sud organise des élections qui conduisent le pays sur une voie démocratique.
La cinquième section, «Un nouveau siècle olympique (1990-2010)» commence avec Barcelone (1992) où l’on remarque surtout la Dream Team, les professionnels étant officiellement admis depuis 1981. Suite à la dislocation de l’URSS et à la fin de l’Apartheid, on voit apparaître de nouvelles nations telles la Communauté des États indépendants (CEI) et l’Afrique du Sud. Atlanta (1996) est surtout associée à Coca Cola qui y a son siège. La marque est omniprésente dans tous les Jeux. Ceux-ci prendront dès lors une tournure commerciale très éloignée de sa vocation initiale. Sydney veut faire oublier les torts de l’Australie envers les aborigènes. Cathy Freeman, dont la grand-mère avait été arrachée à sa famille pour être élevée parmi les Blancs (les «générations volées») allume la flamme et, après sa victoire sur 400 mètres, fait un tour d’honneur avec les deux drapeaux, l’australien et l’aborigène. Avec Athènes (2004), la Grèce se ruine en infrastructures et en mesures de sécurité après les attentats du 11 septembre 2001 et ceux de Madrid en 2004. Cela contribue à la crise économique qui la frappe en 2008. Les nouvelles installations sont ensuite abandonnées. Cette période se termine avec les Jeux de Pékin (2008). Avec une cérémonie d’ouverture grandiose, dans un stade magnifique, le «Nid d’Oiseau», la Chine montre au monde entier sa puissance économique et culturelle.
La présentation des différents Jeux s’arrête ici, ce que l’on peut regretter. Il y a bien une sixième section «Olympisme et société aujourd’hui (2010-2024)» mais il n’y a aucune illustration ou statistiques sur les Jeux de Londres (2012), de Rio (2016) et de Tokyo (2021). Les commissaires imaginent quels pourraient être les Jeux de demain, nouvelles compétitions, nouvelles formes de participation etc.
La place manquait peut-être pour évoquer les Jeux Olympiques d’Hiver et développer un peu plus les Jeux Paralympiques, mais c’est vraiment une exposition remarquable et intéressante. R.P. Palais de la Porte Dorée 12e. Jusqu’au 8 septembre 2024. Lien : www.palais-portedoree.fr


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