MONET - MITCHELL
Rétrospective Joan Mitchell
Dialogue Claude Monet - Joan Mitchell


Article publié dans la Lettre n°563 du 8 février 2023



 
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MONET – MITCHELL. Si tout le monde connaît Claude Monet (1840-1926), il n’en est pas de même de Joan Mitchell (1925-1992), une artiste américaine qui s’installa définitivement en France en 1959, à Paris tout d’abord, rue Frémicourt, puis à Vétheuil, dans un superbe domaine dominant la Seine, à quinze kilomètre de la demeure de Monet à Giverny. La Fondation Louis Vuitton, qui possède plus de dix toiles de cette artiste, lui consacre tout d’abord une imposante rétrospective puis compare ses œuvres avec les dernières créations de Monet, dans un dialogue inédit.
Nous avions déjà vu, au musée de l’Orangerie en 2018 (Lettre n°459), avec « Nymphéas, l’abstraction américaine et le dernier Monet », comment le maître de Giverny était considéré par les artistes abstraits comme un précurseur. Joan Mitchell était déjà là en compagnie de Jackson Pollock, Mark Rothko, Willem de Kooning, Philip Guston, Ellsworth Kelly et quelques-autres. Cette fois la comparaison se fait à une autre échelle avec les toiles monumentales de Mitchell et de Monet.
Née en 1925 à Chicago, Joan Mitchell s’installe à New York en 1949 pour se confronter aux tenants de l’expressionnisme abstrait, en premier lieu Franz Kline et Willem de Kooning. De 1955 à 1959, elle multiplie les allers-retours entre New York et Paris avant d’emménager définitivement à Paris, puis à Vétheuil. La rétrospective suit tout d’abord ces différents lieux, New York, « Transatlantique », Frémicourt, Vétheuil. On découvre son goût pour les polyptiques lui permettant de faire de grandes compositions horizontales, un format qu’elle dit ne pas savoir traiter directement, qui deviendront en quelque sorte sa marque de fabrique. On admire son savoir-faire dans ces mélanges de couleurs étalées de manière subtile sur la toile. Il n’y a pas d’aplats ni de traits droits. Ses toiles évoquent à coup sûr la nature, comme on le voit à partir des titres qu’elle donne à ses peintures, une fois celles-ci terminées. C’est manifeste, à titre d’exemple, avec Hemlock (1956), nom d’une sorte de sapin. Mitchell cherche avant tout à inspirer des sensations (feeling) plus qu’à montrer.
La deuxième partie de cette rétrospective est plutôt thématique avec, tout d’abord, les immenses polyptiques de « Champs et territoires », évoquant des vues aériennes de la campagne. Viennent ensuite, avec « Mémoire », d’autres polyptiques, dont les panneaux ont été peints séparément puis réassemblés progressivement, créant des « connexions de mémoire » avant de les joindre dans une composition finale. Enfin « Peindre » nous livre ses dernières compositions, avec des couleurs vives comme celles des tournesols de Van Gogh, qu’elle admire, et des rehauts de blanc.
Avec une cinquantaine de tableaux, une telle exposition serait suffisante pour connaître cette artiste, mais les commissaires l’ont prolongée, dans les galeries des étages supérieures de l’édifice de Frank Gehry, avec des peintures de la dernière période de Claude Monet. Dans la section « Reflets et transparences, l’heure des bleus » la mise en regard de Quatuor Il for Betsy Jolas (1976) avec des Nymphéas et un Saule pleureur de Monet est éloquente. À cet égard, l’accrochage des toiles est exemplaire. Il en est de même avec Un jardin pour Audrey (1975) et les deux compositions de Monet, Coin de l'étang à Giverny (1917) et Coin du bassin aux nymphéas (1918-1919), d’ailleurs quasiment identiques malgré leurs désignations.
Dans ses dernières compositions, Monet fait appel au rouge plutôt qu’au vert de ses premiers nymphéas. Le Pont japonais ou La Maison de l'artiste vue du jardin aux roses, (1922-1924) sont très proches de l’abstraction telle que la pratique Mitchell. On peut multiplier les comparaisons de ce genre au fil des salles.
Cette exposition est aussi l’opportunité de réunir les toiles du triptyque de L’Agapanthe (1915-1926) dispersées dans trois musées américains et les deux panneaux des Glycines qui allaient avec, tous prévus pour être accrochés dans l’hôtel Biron.
Une dernière comparaison entre des Saules pleureurs de Monet et des Tilleuls de Mitchell et nous terminons la visite en beauté avec la réunion de dix des vingt-et-un tableaux du cycle de La Grande Vallée de Mitchell et sa débauche de couleurs. Une exposition dont on se souviendra. R.P. Fondation Louis Vuitton 16e. Jusqu’au 27 février 2023. Lien : www.fondationlouisvuitton.fr.


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