NYMPHÉAS
L’abstraction américaine et le dernier Monet

Article publié dans la Lettre n° 459
du 18 juillet 2018


 
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NYMPHÉAS. L’abstraction américaine et le dernier Monet. En mai 1927, alors que le musée Monet à l’Orangerie est inauguré avec ses 22 panneaux de Nymphéas, les critiques d’art voient dans ces œuvres ultimes « la plus grave erreur artistique commise par Monet » ou « des diagrammes polychromes d’une affligeante monotonie ». Les années passent. Les impressionnistes sont dépréciés au profit des avant-gardes. L’Orangerie, touchée par un obus lors de la libération de Paris, ne rouvre qu’en 1952. André Masson la qualifie alors de « Sixtine de l’impressionnisme ». Des peintres américains qui n’avaient jamais vu « autrement qu’en reproduction ces formidables premiers plans que sont les derniers Nymphéas » s’enthousiasment pour Monet. L’un d’entre eux, Barnett Newman (1905-1970) félicite avec ironie le directeur du MoMA à l’occasion de l’entrée tardive dans les collections du premier tableau de Monet (Peupliers à Giverny, 1887), alors que le musée ne mettait jusqu’alors en exergue que le post-impressionnisme cézannien.
La présente exposition montre bien la filiation directe entre Monet et ces peintres abstraits. Pour cela, il suffit, pour le démontrer, d’une trentaine de toiles, de grandes dimensions, comme les Nymphéas, dont sept peintes par Monet et vingt-quatre par treize artistes américains. La mise en regard de Peinture (1956-1957) de Joan Mitchell, voire même de Painting (1954) de Philip Guston avec Le Saule pleureur (1920-1922) de Claude Monet (1840-1926) le montre aisément.
Dans la première salle, « La peinture à l’américaine », outre trois tableaux de Monet (Nymphéas bleus et deux versions de Le Pont japonais), sont présentées des toiles de Barnett Newman, déjà cité, Mark Rothko (1903-1970), Clyfford Still (1904-1980), Willem de Kooning (1904-1997), Jackson Pollock (1912-1956) et Morris Louis (1912-1962), tous plus ou moins sensibles aux impressionnistes français et incitant les critiques à repenser la peinture du Monet de la dernière période.
La salle suivante, « Impressionnisme abstrait », présente quatre tableaux de Monet (Le Saule pleureur, Saule pleureur et bassin aux nymphéas, et deux Le Pont japonais) et des œuvres de Mark Tobey (1890-1976), Philip Guston (1913-1980),  Sam Francis (1923-1994), Jean-Paul Riopelle (1923-2002), Joan Mitchell (1925-1992) et Helen Frankenthaler (1928-2011). Pour Elaine de Kooning, « Alors que les impressionnistes tentaient de maîtriser les effets optiques de la nature, les suiveurs [les impressionnistes abstraits américains] s’intéressent aux effets optiques des états spirituels, donnant ainsi un style ancien à un sujet nouveau » (Subject : What, How or Who ?, 1955).
Dans la troisième salle, outre la présentation de deux carnets d’esquisses de Monet, sont projetés un extrait du film de Sacha Guitry, Ceux de chez nous, où l’on voit Monet peignant à Giverny (1915) et le film de Hans Namuth, Jackson Pollock (1951), montrant l’artiste en train de peindre sur une toile posée à même le sol.
L’exposition se termine par un hommage à Ellsworth Kelly. Comme Monet, cet artiste croyait en la puissance de l’œil et rejettait à la fois les symboles et la narration. Il avait été fortement impressionné, en 1952, par les grands panneaux de Monet dans l’atelier à l’abandon de Giverny. Cela lui avait inspiré Tableau vert (1952), présenté ici à côté de grands dessins stylisés de nénuphars. Une exposition passionnante qui montre que l’art est fait de passerelles parfois inattendues. C’est aussi l’occasion de voir ou revoir les grands panneaux des Nymphéas. R.P. Musée de l’Orangerie 1er. Jusqu’au 20 août 2018. Lien : www.musee-orangerie.fr.


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