LUCA GIORDANO (1634-1705)
Le triomphe de la peinture napolitaine

Article publié dans la Lettre n°494 du 8 janvier 2020



 
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LUCA GIORDANO (1635-1705). Le triomphe de la peinture napolitaine. Après le sculpteur Vincenzo Gemito (Lettre 490), le Petit Palais rend hommage à un autre artiste incontournable de Naples, le peintre Luca Giordano, dont c’est la première rétrospective en France. Formé dans le sillage de Ribera (1591-1652), Napolitain d’adoption, Giordano assimile son génie ténébriste - au point que certaines de ses toiles furent attribuées à Ribera - tout en commençant sa carrière à succès par des quasi-pastiches d’œuvres de Raphaël, Titien, Dürer, etc. Après trois autoportraits de 1665, 1680 et 1692, le parcours commence justement par cette « Fièvre du pastiche » avec, par exemple, une Vierge à l’Enfant avec le petit saint Jean-Baptiste (vers 1655) qui rappelle Raphaël. Avec ces pastiches qui trompent les connaisseurs, au point qu’il est accusé d’être un faussaire, Giordano montre sa virtuosité tout en s’amusant. Ce peintre très prolifique peint plus de 5000 tableaux et ensembles de fresques d’où son surnom de Luca fa presto (Luca qui va vite). Il travaille non seulement à Naples dont les églises sont remplies de ses toiles d’autel, mais aussi en Espagne où il passe dix ans à la cour de Charles II d’Espagne. Là, il réalise des fresques pour le Cazón del Buen Retiro à Madrid, le monastère de l’Escorial, la cathédrale de Tolède, pour ne citer que les principaux chantiers. L’exposition nous donne à mi-parcours une idée de ces fresques grâce à une projection vidéo immersive.
Les commissaires nous présentent quelque 75 toiles, souvent de grandes dimensions, et une quinzaine de dessins de cet artiste. Ces œuvres proviennent de Naples et de nombreuses institutions françaises et européennes. Le parcours est chronologique mais les toiles sont rassemblées par thème dans une scénographie exceptionnelle de Véronique Dollfuss. Cette scénographie, très variée, évoque un palais avec sa succession de salles de toutes tailles, selon leur usage. Après l’entrée, la toute première salle, consacrée à « La définition d’un mythe », nous montre de très grandes toiles religieuses qui annoncent les fresques que l’artiste pourra exécuter plus tard. Au milieu de cette salle trône une splendide sculpture de Lorenzo Vaccaro et Gian Domenico Vinaccia, Saint Michel Archange, (1689-1691), inspirée d’une toile de Giordano visible là-aussi.
Vient ensuite « L’héritage de Ribera » où les commissaires ont eu la bonne idée de mettre côte à côte, des toiles de Ribera, Preti et Giordano traitant les mêmes sujets, la Crucifixion de Saint Pierre et le Martyr de saint Sébastien.
Giordano était à Naples lors de la grande peste de 1656 qui décima la moitié de la population. Il en rend compte dans une immense toile (400 x 315 cm), San Gennaro intercédant pour les victimes de la peste (1660).
Après une salle consacrée aux dessins, où l’on mesure là-aussi la maîtrise de cet artiste, nous accédons aux toiles inspirées par la modernité baroque et les innovations d’un Rubens ou d’un Pierre de Cortone, découverts lors du séjour qu’il fit à Rome vers 1653. Avec L’Extase de saint Alexis (1661) de Giordano, mise en regard de Saint Alexis mourant (1638) de Cortone, on voit bien l’influence de ce dernier sur le premier. Mais c’est dans la salle suivante que l’on mesure toute la place prise par le baroque chez Giordano. Finis les sujets religieux, place aux sujets mythologiques avec des nus sensuels et voluptueux, comme chez Titien. Beaucoup sont peints à Florence, où le peintre se rend en 1682 et en 1685, non seulement pour peindre la coupole de la chapelle Corsini, puis la voûte de la galerie du palais Medici-Riccardi, mais aussi pour décorer des palais aristocratiques.
L’avant-dernière salle, sous le titre « Le grand séducteur », est consacrée à son séjour en Espagne. Là, si en premier lieu il peint des fresques dans une dizaine d’édifices, avec un style inconnu en Espagne, il réalise aussi de grandes toiles aux sujets aussi bien religieux que mythologiques.
Le parcours se termine avec trois compositions réalisées pour l’église des Girolamini de Naples, pour laquelle il travaille depuis 1684, même durant son séjour en Espagne. Il y représente les saints Charles Borromée et Philippe Néri, deux acteurs clés de la Contre-Réforme. Si ses successeurs, à Naples, reviennent à un style plus classique, c’est encore Giordano qui est admiré au XVIIIe siècle par des artistes tels Hubert Robert et Fragonard. Une exposition magistrale. R.P. Petit Palais 8e. Jusqu’au 23 février 2020. Lien: www.petitpalais.paris.fr.


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