FÊTES ET DIVERTISSEMENTS À LA COUR. Après « La Mort du Roi », Béatrix Saule quitte la direction des châteaux de Versailles et de Trianon avec une dernière exposition sur un sujet qui eut une grande importance sous les trois règnes de Louis XIV à Louis XVI. Pour le premier, les fêtes et les divertissements participent de l’art de gouverner. « Il faut, pour l’extraordinaire des évènements royaux, toujours plus de grandeur, de surprise et de fantastique, afin d’émerveiller la cour, le royaume, l’Europe ». Les commissaires ont voulu montrer tout cela à travers un parcours en neuf étapes, chacune consacrée à un type de divertissement ou de fête.
« Suivre à la chasse » est la première étape. Le château de Versailles a d'ailleurs été construit à côté du relais de chasse de Louis XIII. C’est le divertissement royal et aristocratique par excellence. Il est illustré par trois magnifiques tapisseries des Chasses de Louis XV d’après Jean-Baptiste Oudry, des portraits des chiens royaux, des armes telles que le fusil de chasse de Louis XVI. Les chasses mobilisaient un équipage considérable avec quelque 500 chiens qui se relayaient cinq fois. Les tableaux de chasse à tir étaient considérables. Louis XVI faisait jour après jour, un compte-rendu détaillé de ses chasses, inscrivant « rien » quand il n’y en avait pas, comme en ce 14 juillet 1789.
Après une petite salle consacrée aux « derniers carrousels », ces divertissements équestres qui ont remplacé les tournois, nous pénétrons dans une salle où a été remonté le décor du Temple de Minerve, le plus ancien au monde, en restituant son éclairage d’origine. On constate que le principe des portiques et des rideaux en enfilade était déjà en usage en 1754. Les commissaires ont fait appel à la société Aristeas pour restituer d’une manière très réaliste, au moyen de vidéos, les « lieux du divertissement » aujourd’hui disparus où se déroulaient les représentations de comédies, tragédies, opéras et ballets.
Justement, dans la salle suivante est évoquée « la comédie ». Sur un mur est disposée la toile de fond d’un décor de Zémir et Azor, un opéra-ballet d’André Grétry (1771). La petite dimension de cette toile donne une idée de la taille du lieu où était joué ce spectacle. Au mur sont accrochés de nombreux portraits d’auteurs (Molière, Racine, Voltaire, Beaumarchais, Grétry, Marmontel …), de comédiens (Raymond Poisson, Préville, Baron, …) et de princesses qui aimaient jouer la comédie. Dans les vitrines sont présentés de rares documents relatifs à des plans de scènes pour des spectacles, des partitions, des livrets d’opéra, etc.
Si les pièces de théâtre comportaient souvent des parties chantées, la musique en tant que telle était très appréciée et les dames de la cour jouaient souvent en virtuose de certains instruments, comme Madame Adélaïde avec le violon. Parmi les raretés, un clavecin de 1746, la superbe harpe de Marie-Antoinette (1774) et le recueil de deux sonates pour le clavecin dédiées à Madame Victoire, excellente claveciniste, par Mozart, alors âgé de sept ans !
Après cette salle dédiée « au concert », nous pénétrons dans un long couloir consacré à « la promenade ». Dans cette section sont évoquées les promenades à pied ou en calèche, les marches vers les bosquets enchanteurs du château, les parties de pêche au bord des bassins. On est émerveillé par la petite calèche du Dauphin, futur Louis XVII, par les maquettes de bateaux, la proue du canot de promenade de Marie-Antoinette (1777) qui naviguait sur le Grand Canal (alors que Louis XIV, qui avait fait construire cet ouvrage, détestait les bateaux !) et surtout un extravagant traineau en forme de léopard avec lequel le roi faisait de longues promenades dans le parc du château comme le rapporte un panneau. Avec les promenades sont décrits certains jeux de balles comme le jeu de paume ou le jeu du volant, très en vogue à la cour.
Très prisés également, les « jeux » de toutes sortes. Les gens de la cour gagnaient et perdaient des fortunes avec certains jeux dont nous avons perdu les règles précises (lansquenet, hombre). Dans une grande vitrine sont exposées une multitude de pièces de jeux : bourses, almanach des jeux, jetons de lansquenet, cartes à jouer, boîte à jeux de quadrille, boîte de jetons, jeu de la chouette et de la roue de la fortune, boîte de jeu de loto, etc. Parmi les tables de jeux, la table à jeux de trictrac, de dames, d’échecs et à écrire de Louis XVI (1780) est la plus intéressante.
Autre distraction de la cour, « le bal ». Là il faut y paraître richement paré et être très exercé pour ne pas se couvrir de ridicule. L’art de la danse s’apprend dès le plus jeune âge. Le bal est souvent l’apothéose d’une grande fête. L’exposition évoque le célèbre Bal des Ifs, bal paré donné à l’occasion du mariage du Dauphin avec l’Infante d’Espagne (1745), au cours duquel huit figures déguisées en ifs seraient venues faire des exercices au milieu de la galerie. On a dit que le roi était présent dans l’un d’entre eux.
La dernière salle est consacrée aux « effets du merveilleux ». Là, on assiste à la reconstitution sur un écran géant des illuminations du grand canal et des feux d’artifices de toutes les couleurs que l’on tirait à l’époque. Les commissaires ont également fait reproduire des machineries de théâtre, pour les scolaires, d’après eux, mais les autres visiteurs sont tout aussi intéressés et curieux de ces engins dont les principes de fonctionnement sont toujours d’actualité, la force des bras ou des chevaux étant simplement remplacée par des moteurs. Une exposition originale et très instructive avec une scénographie exceptionnelle. R.P. Château de Versailles 78. Jusqu’au 26 mars 2017. Lien : www.chateauversailles.fr.