ÉDITION LIMITÉE
Vollard, Petiet et l'estampe de maîtres

Article publié dans la Lettre n°529 du 18 août 2021



 
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ÉDITION LIMITÉE. Vollard, Petiet et l’estampe de maîtres. Le nom d’Ambroise Vollard (1866-1939) est bien connu. C’est l’une des personnalités dont on ne compte plus les portraits, peints par Cézanne, Renoir, Bonnard, Picasso, Forain, etc. On sait qu’il est à l’origine du succès de jeunes artistes comme Picasso, Derain, Bonnard, Cassatt, Chagall, Rouault et de plus âgés comme Cézanne, Maillol, Redon, etc. mais on connaît moins ses méthodes pour promouvoir les artistes de sa galerie. La présente exposition nous livre quelques clés en nous présentant son activité d’éditeur d’estampes.
Passionné par l’édition, Vollard y investit l’essentiel de sa fortune tirée de la vente des toiles des maîtres modernes, toiles qu’il avait achetées par lots entiers à prix modique, attendant le moment propice pour les revendre. Néanmoins, ce n’est que dans les années 1920 et surtout 1930 qu’il voit ses ventes d’estampes se multiplier. En effet, il pratique ce métier d’éditeur à sa manière, choquant les bibliophiles par ses partis pris, en particulier par son affection pour la lithographie en couleurs.
En 1894, il réédite la Suite Volpini de Gauguin, dont on voit l’une des zincographies. Peu après il réalise les deux fameux Album des peintres graveurs (1896 et 1897), qui réunissent des planches de maîtres comme Fantin-Latour, Puvis de Chavannes, Besnard, Renoir, de jeunes artistes comme les nabis Bonnard, Vuillard, Denis et des artistes étrangers comme Munch.  Le premier album est intégralement exposé. Ce qui nous frappe, c’est son caractère totalement hétéroclite, que ce soit dans le choix des artistes, des sujets ou des formats.
En 1899, Vollard se lance dans un autre type d’édition. Il demande à quatre artistes qu’il apprécie tout particulièrement de réaliser des albums de 13 lithographies chacun, sur un sujet donné. Nous avons ainsi des planches d’Amour de Maurice Denis, de Quelques aspects de la vie de Paris de Pierre Bonnard, de Paysages et intérieurs d’Edouard Vuillard et de Paysages de Ker-Xavier Roussel, ce dernier étant resté inachevé. À côté de ces albums, Vollard édite ponctuellement des estampes des grands peintres qu’il représente comme Renoir ou Cézanne.
Peu à peu Vollard se désintéresse de ce type d’édition et se lance dans la publication de livres de luxe, tirés entre 200 et 400 exemplaires, comme le magistral Parallèlement de Verlaine illustré par Bonnard en 1900. Pour lui les images ont la préséance sur le texte. Il s’agit moins d’illustrations d’un livre que d’un dialogue entre l’artiste et l’écrivain. L’exposition nous donne une idée de ses livres avec Le chef-d’œuvre inconnu de Balzac, illustré par Picasso (1831) ou Les Réincarnations du Père Ubu de Vollard, illustré par Jean Puy (1832). Dans ses souvenirs d’un marchand de tableau (1937), Vollard écrit : « À chaque rebuffade des bibliophiles je me disais « J’aurai tout de même le dernier mot ». Et je répondais à leur hostilité par l’édition d’un nouveau livre. »
L’exposition met aussi l’accent sur les rapports entre Vollard et ses artistes. On apprend que le galeriste les encourage à faire de la céramique ou de la sculpture et les met en relation avec les professionnels de ces techniques. Nous avons de magnifiques poteries signées Mary Cassatt, Jean Puy, Pierre Laprade, Louis Valtat et Auguste Renoir et une rare sculpture de Renoir et Richard Guino (1890-1973), Venus victrix (entre 1914 et 1916). Comme la plupart des estampes exposées, ces vases et cette sculpture ont été légués au Petit Palais par Vollard ou ses héritiers.
Vollard décède brutalement dans un accident automobile en 1939, laissant en plan une vingtaine de livres d’artistes. Son frère gère tant bien que mal la succession. Par chance le stock d’estampes est intégralement préservé par Henri Marie Petiet, héritier spirituel du marchand. Celui-ci le rachète en bloc et prend la relève. Il commercialise la fameuse Suite Vollard de Picasso et édite des artistes que Vollard avait fait émerger tel Aristide Maillol. Une quinzaine d’estampes de la Suite Vollard, toutes avec le fameux minotaure, sont exposées à côté d’œuvres éditées par Petiet (Gromaire, Derain, Dunoyer de Segonzac, Marie Laurencin, etc.).
L’exposition se termine avec l’évocation d’un atelier d’imprimeur. On y voit une presse, un pupitre de composition et des épreuves de décomposition des couleurs de Georges Rouault. Une exposition intéressante avec une belle scénographie, comme à l’habitude dans ce musée. Petit Palais 8e. Jusqu’au 29 août 2021. Lien: www.petitpalais.paris.fr.

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