CHEFS-D’ŒUVRE DE LA CHAMBRE DU ROI. L’écho du Caravage à Versailles. Recréée il y a quelque cinquante ans, la chambre du Roi est de nouveau fermée pour être restaurée. Située au cœur du château et du pouvoir, la chambre du Roi rythmait la vie de la Cour. Le roi se levait en même temps que le soleil qui éclaire la chambre le matin. Ce lieu hautement symbolique était orné de neuf toiles lorsqu’il n’était que le salon où le roi s’habille. Trois furent retirées en 1701 pour permettre l’installation d’un lit de parade lorsque Louis XIV décida d’en faire sa chambre. Aujourd’hui, cette exposition nous permet de voir dans d’excellentes conditions les neuf toiles en question, six étant accrochées en temps normal à l’attique, à six mètres du sol, et les trois autres étant dispersées au musée du Louvre, à Versailles et au musée Tessé au Mans.
L’exposition se tient dans les anciens appartements de Madame de Maintenon. Elle commence par une maquette de 1958 montrant l’état de la chambre en 1701, pour préparer sa restauration, et par deux tableaux représentant la chambre en 1861, lorsque Louis-Philippe transforme le château en musée. Il s'emploie alors à souligner le lien qui le lie à Louis XIV en ajoutant, entre autres, les doubles portraits des reines Anne d'Autriche et Marie-Thérèse.
La salle suivante présente les quatre dessus-de-porte de forme ovale qui ornent la chambre. À l’époque de Louis XIV ils étaient donnés de la main de Van Dyck, du Dominiquin et du Caravage alors qu’ils ne sont que de leurs ateliers ou de copistes. À cette époque le nom importait plus que l’authenticité des attributions.
Viennent ensuite les trois toiles « exilées ». Il s’agit de trois tableaux remarquables, Agar secourue par l'ange (1616) de Giovanni Lanfranco, une Réunion de buveurs attribuée à Nicolas Tournier (1590-1639) alors qu’on la croyait de la main de Bartolomeo Manfredi et La Diseuse de bonne aventure de Valentin de Boulogne (1591-1632).
Ce dernier peintre, a marché dans les pas du Caravage (1571-1610) durant son séjour à Rome de 1614 jusqu’à sa mort tragique en 1632. C’est le plus italien des caravagesques français et l’on comprend l’engouement du roi pour ce peintre. En effet, sur les six toiles exposées dans la chambre du Roi, cinq sont de sa main. Nous avons la chance de les voir dans d’excellentes conditions. Il y a la série des quatre évangélistes (vers 1624-1626) représentés en plein travail d’écriture et de réflexion, accompagnés de leurs attributs, et Le Denier de César (vers 1622-1623). Une sixième toile complète cet ensemble. Il s’agit du Mariage mystique de sainte Catherine (vers 1635) d’Alessandro Turchi (1578-1649). Ce tableau se trouve aujourd’hui au Louvre. Le panneau didactique nous explique que le tableau de Lanfranco Agar secourue par l'ange, vu dans la salle précédente, fut « mystérieusement substitué » au Mariage mystique de sainte Catherine de Turchi!
Si la scénographie est sobre, en revanche le visiteur pas trop pressé appréciera les explications données dans les panneaux didactiques et les cartels développés. Ceux-ci accompagnent tous les tableaux, ce qui est bien agréable. On les retrouve dans le parcours en images qui complète cet article. R.P. Château de Versailles 78. L’exposition est prolongée jusqu’au 17 septembre 2023. Lien : www.chateauversailles.fr.