LA VIE EST UN SONGE de Calderón. Mise en scène Clément Poirée avec John Arnold, Louise Coldefy, Thibaut Corrion, Pierre Duprat, Laurent Ménoret, Morgane Nairaud, Makita Samba, Henri de Vasselot.
Un univers scénique entre ténèbres et lumière, un clair obscur presque oppressant où évoluent des personnages fantomatiques brusquement cernés de halos et de fulgurances. Est-on éveillé, est-on plongé dans le songe et le cauchemar ? Toute la pièce va entretenir l’ambiguïté jusqu’à un dénouement heureux dont on peut se demander s’il n’est pas lui-même une fantasmagorie.
Sigismond, séquestré depuis l’enfance au nom d’un oracle fallacieux, donnerait presque raison à son père, le roi Basile, tant sa libération, brève et artificielle, confirme les pires pressentiments quant à sa violence innée. Faute d’éducation, il se laisse aller aux exactions diverses. Autour de lui, l’hallucination est généralisée, par le devoir d’obéissance, par la rancœur, par la trahison, par l’appétit du pouvoir, par la fureur populaire. Un monde de spectres, grimaçants et ridicules, veules et inquiétants. L’intrigue est aussi chaotique et improbable que l’anarchie de leurs sentiments. Mais le bien l’emportera ainsi que la raison politique, parce que l’innocence, la naïveté, la candeur même vindicative de l’amour viennent à bout des aveuglements.
La mise en scène offre aux mouvements un espace très large et un tempo haletant, dans lesquels les acteurs peuvent déployer la virulence et l’ironie de leurs violences propres.
Le spectacle est dérangeant comme cette œuvre inclassable de Pedro Calderón de la Barca, qui continue à fasciner et interpeller le public depuis bientôt quatre siècles. A.D. Théâtre de la Tempête - Cartoucherie de Vincennes 12e.