UN AMOUR DE JEUNESSE de Ivan Calbérac. Mise en scène de l’auteur. Scénographie Édouard Laug. Avec Stéphane De Groodt, Isabelle Gélinas, Olivia Côte, Sébastien Pierre, Nelly Clara.
La réussite professionnelle et l’ascension sociale d’Antoine Lopez sont indéniables. Le salaire de l’homme d’affaires est publié dans Capital et il est sur le point de racheter le château de la famille aristocratique mais ruinée de Diane, son épouse. La vie quotidienne irait donc pour le mieux dans l’appartement cossu parisien lorsque l’arrivée de Maître Rougeron (Sébastien Pierre, excellent), fait l’effet d’une douche froide. L’avocat annonce à Antoine que Maryse, sa première épouse, envolée il y a vingt-cinq ans sans laisser d’adresse, demande le divorce pour pouvoir se remarier. Mais marié sans contrat, Antoine est susceptible de devoir lui verser la moitié de sa fortune. Marié, lui ? Aucun souvenir. Stéphane de Groodt excelle dans un rôle où l’amnésie passagère de son personnage se transforme peu à peu en évidence. Des bribes de son passé lui reviennent, l’ambiance des colos, celle des ashrams en Inde et de ses volutes de fumés diverses, bref, une jeunesse « Peace and love » qu’il avait complètement oubliée. Diane ignore d’ailleurs tout de la part obscure de l’ancienne existence de son époux. Isabelle Gélinas est irrésistible en épouse en sidération, aristocrate jusqu’au bout des ongles, dotée d’une éducation qu’elle va devoir remettre en question. Le fait est pourtant avéré. Il faut trouver la parade dans les meilleurs délais pour éviter le partage des biens. Offrir des vacances à Chen Mu, leur femme de ménage, pour squatter son appartement à Sarcelles et jouer les pauvres, est la solution. Troisième personnage clé de l’histoire, Nelly Clara brûle les planches en employée de maison sans état d'âme face au désarroi de ses patrons.
Après un petit détour chez Kiabi, les voici dans les lieux. Reste à revoir le vocabulaire trop châtié de Diane, rebaptisée Ginette, pour être un peu plus raccord avec l’environnement et donner le change à Maryse qui se présente, aussi zen qu’autrefois. Olivia Côte joue à ravir la bobo œuvrant dans l’humanitaire, pleine d’empathie pour son ex si démuni.
La mise en scène, les décors et la musique collent parfaitement aux situations ubuesques et aux réactions qu’elles provoquent jusqu’à la chute inattendue. Un grand bonheur de théâtre salué par une ovation méritée ! M-P. P. Théâtre de la Renaissance 10e.