TIMON D’ATHÈNES

Article publié dans la Lettre n° 418
du 13 mars 2017


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TIMON D’ATHÈNES de William Shakespeare. Mise en scène Cyril Le Grix avec Patrick Catalifo, Xavier Bazin, Philippe Catoire, Thibaut Corrion, Thomas Dewynter, René Hernandez, Maud Imbert, Jérôme Keen, Alexandre Mousset, Carole Shaal, Aksel Carrez, Ghislain Decléty, Valentin Fruitier, Thomas Harel, Jérémy Hoffman-Karp, et les musiciens Karim Touré, Florent Hinschberger, Jon Lopez De Vicuna.
Timon est riche, d’une prodigalité sans mesure, tout à sa joie de vivre et de partager avec ses amis. Voraces, âpres à dépouiller sans vergogne le généreux donateur qu’ils inondent de leurs flatteries. Vient l’orage prévisible des revers de fortune, et les oiseaux parasites de s’envoler sans un regard. Au fidèle intendant venu quémander une juste rétribution des largesses d’antan, les vautours opposent le refus de leur mauvaise foi. Et Timon se réfugie dans le désert de son acrimonie. Haillons, coque de bateau en ruine, solitude insondable. Pour seule compagne, le flot ininterrompu de sa haine de misanthrope à l’aune de la générosité de naguère. Au creux du sable, il découvre un trésor et, par l’odeur de l’or alléchés, les charognards reviennent aussitôt rôder. Timon résistera aux flatteries des nouvelles sirènes, tout en distribuant à la volée son nouveau trésor, avant de s’escamoter dans le néant.
Le propos de Shakespeare est plus amer que jamais dans cette tragédie, aucune illusion, aucun pardon.
La mise en scène joue avec efficacité sur le vide d’une humanité vraie, accentué par le flot des paroles. Le plateau est immense, inhabité, simplement troué de lueurs violentes réverbérées par les miroirs latéraux, qui contribuent aussi à dupliquer l’artifice et la pusillanimité des festins. Les tables de banquet et les lits de bains s’invitent et s’escamotent, les personnages y virevoltent, flatteurs ou agressifs. Le mouvement est incessant, scandé par les stridences de la trompette et du saxo, rythmé par le lancinant staccato des percussions. Au cœur de la seconde partie, celle de l’exil, se dresse la figure vitupérante et prophétique de Timon, sur fond de ciel au couchant, face à son double inversé, l’amer Apémantus. Emouvant Patrick Catalifo-Timon, aussi vibrant dans le sourire des jours heureux que dans l’imprécation du désert. A ses côtés, seul son intendant Flavius incarne la fidélité et la loyauté. Les femmes sont chiennes, les courtisans odieux, les soldats inquiétants. L’ensemble de la troupe imprime un rythme asphyxiant à une folie collective. La fièvre de l’or est contagieuse, l’avidité sans bornes.
Et chaque témoin de ces déchirements quitte le lieu, renvoyé sans pitié à la désespérance du non-amour et à l’impossibilité de la générosité. A.D. Théâtre de la Tempête-Cartoucherie de Vincennes 12e.


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