LA RENCONTRE de Bernard Da Costa. Mise en scène Tiphaine Riou. Avec Christine Rolland-Ducrest et Christel Cloteaux.
Simone revient dans les coulisses, se défait de ses oripeaux de scène, s'assoit d'un air las. Mais que vient faire maintenant cette somptueuse créature, richement parée, toutes dents offertes en sourire factice ?
Suzy, une ancienne amie de galère théâtreuse, a manifestement rencontré, quant à elle, le succès et l'amant qui l'entretient. Simone cache sa joie, comme on dit ! Elles sont toutes deux actrices depuis des décennies, l'une dans le théâtre militant, fidèle aux principes mais plutôt ennuyeux, l'autre sous les feux de la rampe de théâtres à succès où elle doit se contenter de jouer les utilités court-vêtues, elles ont manifestement été complices, unies tant par cet homme qu'elles ont partagé que par la jalousie diverse et réciproque qui les a taraudées, l'une comme l'autre. Quel mystère Suzy cache-t-elle derrière l'artifice de sa vêture clinquante, ses petits rires gloussés et exaspérants, sa blondeur ferait presque illusion d'une innocence dont on sent qu'elle est entachée de souffrance et d'amertume. Simone, elle, ne cache pas sa désespérance d'une vie qui l'a constamment déçue et rendue amère et vindicative. Les méchancetés, avec ou sans filtre, fusent de part et d'autre, les réminiscences revanchardes s'égrènent, semées de gestes ébauchés d'une tendresse ancienne qui ne demande qu'à être ravivée.
Changement d'espace, l'appartement somptueux de Suzy les accueille ensuite, le champagne coule dans les gosiers, jusqu'à ce que... La surprise de la suite des événements appartiendra au spectateur, amusé, intrigué, puis bousculé dans sa certitude d'une issue policière convenue.
Les deux comédiennes sont bien typées dans leurs différences physiques, même si les habits changent de corps, dans leurs divergences sur la nature du théâtre, dans leurs duels amoureux, dans leurs émotions et leur expression.
C'est à la fois léger, méchant, rieur, trouble, et le mouvement en est sans répit. Un tourbillon qui monte à la tête comme les bulles de champagne. A D. Théâtre du Passage vers les étoiles 11e.