LA PAIX DANS LE MONDE de Diastème. Mise en scène de l’auteur. Avec Frédéric Andrau (et Emma de Caunes, en vidéo).
Simon parle et sourit. Sa vie solitaire est parfois striée des visites de sa mère qui habite de l'autre côté d'une vallée suisse. A portée de vue. Ainsi s'assure-t-elle que le feu brille dans la cheminée de son fils. Du feu, des mots, donc tout va bien. Et il raconte par récits enchâssés comment il en est arrivé à cet isolement contraint. Tout part de l'enfance partagée avec Lucie, leur amour inextinguible sur trame racinienne, qu'une fanfaronnade d'adolescence a écorché. Rupture, jalousie meurtrière, l'internement a sonné l'éloignement pendant une quinzaine d'années. Simon, grâce à son psychiatre Walter et à son ami Bartolomé, s'est reconstruit méthodiquement, sans cesser de parler à Lucie, son inoubliable amour, qu'il dit ne pas se sentir encore prêt à revoir. Et la conversation se déroule, inquiétante et rieuse, intime jusqu'à l'impudeur, profondément émouvante parce que lucide. L'injonction temporaire d'éloignement ayant pris fin, il décide de renouer avec Paris, avec son père, avec Elle. Le choc est à la mesure de l'imprévu, amoureux et fougueux. Et Pyrrhus prend à nouveau la fuite, malgré les relances angoissées qu'Hermione lui fait par numérique interposé. Il renoue le fil de ses repères, de ses exercices de stabilité, sa conversation en flux, tout en restaurant au prix d'efforts physiques salutaires la maison de Bartolomé. La suite serait-elle idyllique ? Voire... Un final en futur antérieur, qui plonge dans la perplexité. Tout ce récit est-il un tableau de la réalité ou une mystification vivace qu'Antoine aurait entrelacée avec les fantômes qui le hantent tout en lui offrant de vivre ?
Frédéric Andrau est bouleversant de tendresse, de simplicité et de profondeur. Sourire, humour, ces habits de la fragilité, il s'en revêt avec un impressionnante économie de gestes, au cœur d'un espace scénique aussi dépouillé que la structure métallique et les panneaux qui évoluent vers un univers floral coloré. Enfin apaisé ?
Un moment d'une indicible saveur. A.D. Théâtre Les Déchargeurs 1er.