LA NOUVELLE de Éric Assous. Mise en scène Richard Berry avec Richard Berry, Mathilde Seigner, Héloïse Martin, Rudy Milstein, Félicien Juttner.
Il pleut des cordes. L’orage gronde et en annonce un second d’un autre ordre ! Face à la grande baie vitrée de la maison de campagne donnant sur le jardin, un arbre centenaire tamise la lumière de la salle de séjour rénovée par Simon, le maître des lieux. Il y a quelques mois, il a fait la connaissance de Mado, une généraliste beaucoup plus jeune que lui, divorcée et mère de deux filles. Concilier seule travail et éducation lui a forgé le caractère, son franc-parler en témoigne, un rôle qui sied à ravir à Mathilde Seigner. Le souhait de refaire leur vie ensemble s’est imposé, ils en ont avisé verbalement leurs enfants respectifs. Aujourd’hui, ils attendent, un peu fébriles, l’arrivée des deux fils et de la belle-fille de Simon pour le moment délicat des présentations. Le ténébreux Axel, Félicien Juttner parfait dans le rôle, n’a pas le caractère facile, contrairement à Cyril, le cadet, excellent Rudy Milstein, et sa femme Fanny, adorable Héloïse Martin. Pour Mado « c’est un moment difficile », non sans raison, lorsque les deux fils découvrent les changements opérés dans la salle de séjour et surtout la disparition du piano de leur mère. L’ambiance se dégrade un peu plus lorsque Cyril brandit des photos retrouvées dans un vieil appareil. S’il semble pourtant accepter avec philosophie l’arrivée dans la famille de la « nouvelle », ce n’est pas le cas d’Axel. Sa place d’aîné lui pèse tout comme la préférence visible de son père : « Cyril est beaucoup plus beau, pour Axel, j’ai fait ce que j’ai pu » ! L’aîné remémore certains événements de son enfance et ne se prive pas d’assener des reproches à son père. Sa vie professionnelle et personnelle comparée à celle bien établie de son frère n’arrange rien. Disputes et fâcheries se succèdent, malgré les tentatives conciliatrices de Cyril, Mado et Fanny…
Éric Assous offre ici une vision classique mais pertinente de deux esseulés qui s’apprêtent à « recomposer » leur existence, d’où les conséquences que cette recomposition engendre pour leurs enfants, même adultes. On voit survenir les rebondissements avec amusement, charmés que nous sommes par le plaisir des yeux que procure le décor et par la mise en scène étourdissante de Richard Berry, interprète tout aussi étourdissant du rôle de Simon. Sa forte présence est un challenge pour ses partenaires qui s’imposent avec fougue. Les points d’orgue sont la scène périlleuse de la dégustation d’un dessert aux conséquences fâcheuses et la fin, chargée d’émotion. M-P. P. Théâtre de Paris 9e.