MÉMOIRES D’UN TRICHEUR de Sacha Guitry. Adaptation et mise en scène Eric-Emmanuel Schmitt avec Olivier Lejeune et Sylvain Katan.
La projection en noir et blanc du générique de la pièce est un clin d’œil au maître présentant celui de son film « Si Versailles m’était conté ». Olivier Lejeune l’imite à la perfection, citant de façon exhaustive, du directeur à la caissière, tous ceux qui ont contribué à cette création. Ce prologue a un atout de taille, celui de plonger immédiatement le spectateur dans le célèbre et unique roman du grand Alexandre Guitry, dit Sacha.
Alex ne peut remonter le fil de sa vie sans faire allusion à un événement décisif de son enfance : le vol de deux francs dans le tiroir-caisse de l’épicerie d’un père qui le punit en le privant d’un plat de champignons. Ce châtiment le sauve d’une mort certaine mais pas sa famille. Onze personnes, onze cercueils à suivre jusqu’au cimetière, ce n’est pas rien pour un début dans une existence qui sera pour le moins atypique. Recueilli par un oncle notaire qui lui dérobe son petit héritage de la manière la plus « honnête » qui soit et par une tante décidée à s’en débarrasser au plus vite, Alex prend son envol. Il part pour Deauville où il a repéré un emploi de groom au Grand Hôtel. Suivront d’autres hôtels dans d’autres villes. Le jeune homme multiplie les emplois et les rencontres. Un mariage fait de lui un tricheur mais lui apporte une fortune qu’il perd en jouant honnêtement en compagnie de l’homme qui lui a sauvé la vie durant la guerre. L’obscur employé d’un fabricant de cartes à jouer qu’il devient alors n’a pas dit son dernier mot …
Un décor fait de panneaux amovibles crée les différents lieux où évoluent les deux comédiens. Olivier Lejeune est l’irrésistible conteur de ce récit fluide et drôle, habilement adapté et mis en scène. Sylvain Katan papillonne autour de lui et interprète, tel un caméléon, les personnages qui surgissent du passé, une petite dizaine tout de même !
Nous suivons amusés et avec une certaine empathie les péripéties de ce voleur en herbe qui se taille sans états d’âme un chemin dans les méandres capricieux du destin, considérant de façon pragmatique ses bonnes fortunes, ses déboires, et ses reconversions: « être riche, ce n’est pas avoir de l’argent, c’est en dépenser », « voler c’est très mal, mais tricher n’est pas voler » ! M-P.P. Théâtre Rive Gauche 14e.