LA MÉCANIQUE DU CŒUR d’après Mathias Malzieu. Adaptation et mise en scène Coralie Jayne avec Clara Cirera, Nicolas Avinée ou Pierre-Antoine Lenfant, Gabriel Clenet, Mylène Crouzilles, Maxime Norin ou Gregory Baud, Laurent Vigreux.
Comment Jack pourrait-il espérer survivre quand le pire froid du monde a gelé son cœur ? Sa mère effrayée a déserté, mais Madeleine la sage-femme a mis en œuvre, une fois de plus, son inventivité et son opiniâtreté à faire vivre le nouveau-né. Aidée de ses acolytes coutumiers, elle lui greffe un improbable coucou suisse en guise de cœur. A Jack désormais d’éviter tout ce qui pourrait emballer cette mécanique fragile, ne pas toucher aux aiguilles, passer au grand large de la colère et surtout de l’amour. Tous y veillent pendant dix années, avec force œufs de souvenirs, cocktail de larmes, déchaînements jazzy, avec le grand Arthur que sa propension aux boissons fortes a privé de travail policier et de charmante épouse. Mais Jack grandit, découvre enfin la ville et ses cacophonies, ses tentations amoureuses. Son cœur s’emballe pour la rougeoyante Miss Acacia. Il est désormais trop tard pour la prudence. Foin des conseils et des pleurs de Maman Madeleine, il n’aura de cesse de revoir cet objet de coup de foudre définitif, pour lui offrir le bouquet de lunettes. Au-delà des obstacles et des humiliations, de la jalousie et de la violence des condisciples, Jack accomplit le périple des pays et celui du cœur, assisté du magicien des rêves lunaires, Georges Méliès. Il retrouvera ses amours, vivra la passion dans la folie douce et les fantômes du cirque, mais le passé le rattrapera. Difficile d’être vraiment humain quand on est suspendu à une mécanique aussi fragile, mais comment se priver du « moulin à graines du rêve » ? Like a motherless child…
De cette geste amoureuse et picaresque, les acteurs, grimés en clowns, créent une fantasmagorie pleine de mouvement et de suspense, de rires et d’émotions, rythmée par le tictac de Jack. Ils dansent, chantent, miment, voyagent dans le temps et l’espace, avec une souplesse et un entrain qui ne laissent pas le spectateur en repos. Impossible de résister à cet univers de poésie, que renforcent les accessoires très mouvants et le clair-obscur plein de fulgurances de la mise en scène, scandée par les spirituals, la guitare et le saxo.
Un moment de théâtre vraiment délicieux. A.D. À La Folie Théâtre 11e.