KEAN

Article publié dans la Lettre n° 470
du 9 janvier 2019


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KEAN de Alexandre Dumas. Adaptation Jean-Paul Sartre. Mise en scène Alain Sachs assisté de Corinne Jahier avec Alexis Desseaux, Pierre Benoist, Sophie Bouilloux, Jacques Fontanel, Frédéric Gorny, Eve Herszfeld, Justine Thibaudat, Stéphane Titeca.
Ni les hommes, ni les femmes ne lui résistent. Sur les planches des théâtres londoniens comme dans les salons, Edmund Kean est partout, adulé par les uns, détesté par les autres. Les privilégiés se pressent à l’entrée des théâtres pour le voir incarner avec un rare génie les personnages shakespeariens qui déteignent dangereusement sur lui.
Les conquêtes du don Juan se comptent par centaines, un millier peut-être de celles qui se sont endormies dans les bras d’Hamlet pour se réveiller dans ceux du Maure. Son protecteur n’est autre que le prince de Galles. Il est l’ami, le confident et le complice qui règle inlassablement ses dettes. Ce soir, l’acteur est attendu chez le comte de Koefeld, ambassadeur du Danemark. Viendra-t-il ? Élégante dans sa robe Empire surannée, la comtesse Elena est fâchée que son époux ne l’ait pas avisée de la venue d’un hôte de cette importance mais l’émotion de le recevoir n’est pas seulement conduite par l’orgueil, elle ressent une forte inclination pour lui, et celle-ci est réciproque. Entre eux, pourtant, se glisse l’ombre du prince de Galles, amoureux lui aussi. Kean se fait attendre. Ce soir, tous colportent le dernier ragot. Anna Damby, fiancée à Lord Mewill, s’est envolée pour ne pas se marier, partie avec son ravisseur qui ne serait autre que Kean. Il survient en riant, dément la rumeur, sauvant ainsi l’honneur de la dame. Mais avant de quitter ses hôtes, il a subtilement donné rendez-vous à la comtesse et, aujourd’hui, fébrile, il l’attend dans sa loge.
Pendant que Salomon, son homme à tout faire, tente de le raisonner pour que ses dépenses cessent et que ses dettes soient enfin honorées, Kean s’esclaffe encore, persuadé que ses créanciers lui feront toujours confiance et que le prince, que voici, épongera ses dettes. Mais Monseigneur est vraiment amoureux et, pour la première fois, il lui demande de renoncer à son idylle contre une forte somme d’argent. Follement épris, Kean refuse mais accepte, de mauvaise grâce, un marché. C’est alors qu’Anna survient. En fuite depuis la veille, amoureuse de Kean, la jeune fille au caractère bien trempé a décidé qu’elle serait actrice et que la coqueluche de Londres serait son Pygmalion. À la fois personne et personnages, Kean louvoie entre l’exigence du prince, celle de ses créanciers et le charme des deux jupons féminins, jusqu’à la folie s’il le faut…
L’exubérance de la pièce, intrinsèque au personnage, est bien là. Les scènes se succèdent, rapides. Les décors glissent et matérialisent en un clin d’œil le salon de l’ambassadeur, la loge de Kean, l’auberge ou le domicile de l’acteur. Huit comédiens, pour incarner une douzaine de personnages, jouent leur partie avec fougue et le tour est joué, un coup de maître pour Alain Sachs.
Formidable Kean, Alexis Desseaux incarne sa démesure sans jamais verser dans la caricature. Après la mémorable mise en scène de Robert Hossein en 1987 avec Jean-Paul Belmondo dans le rôle - titre, le défi est amplement relevé. M-P. P. Théâtre 14 14e.


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