INTRA MUROS d’Alexis Michalik. Mise en scène de l’auteur avec Jeanne Arènes, Bernard Blancan, Alice de Lencquesaing, Paul Jeanson, Fayçal Safi et le musicien Raphaël Charpentier.
En prologue, un court monologue est adressé au public sur le métier d’acteur qui endosse deux vies, la sienne et celle de son personnage, les deux se confondant pour former une entité dont le but est de transmettre des émotions. Après cette mise en condition, la représentation peut commencer.
Créer un atelier théâtre en centrale. Alice, assistante sociale stagiaire, a soumis l’idée à Richard, professeur d’art dramatique et metteur en scène en mal de projet, faute de crédits. Après quelques hésitations, Richard décide de tenter l’expérience en faisant participer Jeanne, une comédienne. Ils se retrouvent devant les grilles de la centrale puis pénètrent dans la salle polyvalente du bâtiment après les contrôles administratifs d’usage. Richard espère la présence d’une dizaine de détenus mais deux seulement se présentent, Kevin, un jeune récidiviste, et Ange, un homme d’une cinquantaine d’années. Richard songe à repartir mais, devant l’insistance d’Alice, il y renonce et commence son cours. L’approche est difficile. Ange répond par monosyllabes. Il est venu là uniquement pour accompagner Kevin, lui-même rétif aux premiers exercices. Sous l’impulsion de Jeanne, le metteur en scène leur propose d’aborder le théâtre en faisant un échange : Kevin prend l’identité d’Ange et Ange celle de Kevin. Le dialogue s’amorce alors, un échange sur des banalités puis sur les raisons de leur détention, sujet assez vite interrompu par Ange qui voit sa vie un peu trop dévoilée par Kevin. Apprivoiser deux êtres ayant touché le fond, tous deux condamnés à des peines plus ou moins longues, demande beaucoup de diplomatie mais Kevin puis Ange baissent tout doucement la garde, se prêtent au jeu glissant de personne à personnage. Au fil des confidences, on apprend sur Alice quelques éléments de sa propre vie. De ces introspections, va se dessiner un récit romanesque, plein de surprises… Apparaît alors clairement le fil subtil et complexe de la pièce, un travail collectif exécuté par Alexis Michalik et ses comédiens, qui emporte acteurs et spectateurs dans une mise en abyme d’où naissent et croissent une foule de sentiments dont l’émotion. Les comédiens sont cinq pour interpréter tous les personnages convoqués. Accompagnés par le musicien Raphaël Charpentier, acteur à part entière de ce spectacle stupéfiant, ce n’est pas une charge contre la prison mais un message plein d’espoir qu’ils transmettent. Pour qui que ce soit, il n’est jamais trop tard pour penser aux années à venir. M-P. P. La Pépinière théâtre 2e.
