L’IDIOT de Fiodor Dostoïevski. Texte et  mise en scène Thomas Le Douarec avec Arnaud Denis, Thomas Le Douarec ou Gilles  Nicoleau, Bruno Paviot, Daniel-Jean Colloredo, Fabrice Scott, Marie Lenoir,  Marie Oppert, Solenn Mariani, Caroline Devismes. 
                  Dans  le train qui le ramène de son exil psychiatrique en Suisse, le prince Mychkine  croise deux gredins, l’un escroc enrichi, l’autre parasite flagorneur. La  naïveté du jeune rescapé mental n’a d’égale que sa « force d’être  heureux » en totale contradiction avec la société corrompue et viciée  qu’il va croiser, une société gangrenée par l’argent, la course à la dot, les  préjugés. Son innocence sans précautions et sa beauté calligraphique y font  merveille et déclenchent rires, sarcasmes et méfiance. Et quand il se découvre  richissime par testament, les appétits se déchaînent. A chacun, il oppose  sereinement l’inaltérabilité de son sourire et une sincère générosité, il  scrute chaque regard, prononce des paroles visionnaires. Mais trop de franchise  ébranle en miroir la méchanceté ambiante. Le cœur de Mychkine est trop pur pour  ne pas provoquer les catastrophes de la jalousie.
                  Le  choix est fait d’une mise en scène pleine de mouvement sur un espace  volontairement dépouillé. Quelques marches, une illusion de végétation. En revanche,  les couleurs sont très vives, dans la noirceur des appétits, la blancheur de  l’innocence, le rouge du sang versé. Les comédiens y virevoltent dans des  costumes hauts en couleurs, des robes somptueuses, des éclats de voix et de  rires, des accès d’ivrognerie et de folie, des sanglots.
                  L’accent  est mis sur le sardonique, l’excessif, en contraste avec  l’ « idiotie » du héros. Et c’est ce violent contraste qui  conforte le pessimisme profond et irrémédiable du tableau.
                  Certes,  on rit beaucoup, mais l’amertume reste bien en bouche, intemporelle.
                  Dostoïevski  intelligemment revisité. A.D. Théâtre 14  14e.