HÉCUBE, PAS HÉCUBE. Texte et mise en scène Tiago Rodrigues. Traduction Thomas Resendes. Scénographie Fernando Ribeira. Costumes José António Tenente. Lumières Rui Monteiro. Musiques originale et son Pedro Costa. Collaboration artistique Sophie Bricaire. Avec Éric Génovèse, Denis Podalydès, Elsa Lepoivre, Loïc Corbery, Gaël Kamilindi, Élissa Alloula, Séphora Pondi.
Sur une scène sombre et sans décor, sept comédiens, tous vêtus de noir, s’apprêtent à réaliser une première lecture d’Hécube d’Euripide et commencent par la fin de la tragédie. Parmi eux, Nadia doit jouer le rôle titre. Veuve du Roi Priam, son personnage est devenu esclave après avoir tout perdu: son trône, son époux et presque tous ses enfants. Le roi et la reine avaient confié Polydore, leur plus jeune fils, à leur ami Polymestor pour le protéger mais, celui-ci l’a assassiné pour s’emparer de l’or qu’ils lui avaient également confié. Cet acte, commis par un ami, est insupportable. C’est une femme vulnérable de par sa nouvelle condition, mais assoiffée de vengeance, qui réclame justice.
L’actrice est présente sans l’être tout à fait, la tragédie se mêle à sa vie personnelle. Son fils autiste a été victime de maltraitance dans l’institution qui l’a accueilli. Après s’être insurgée à plusieurs reprises, elle a décidé de porter plainte. Deux mondes se superposent, celui de la pièce que les répétitions éclairent peu à peu et celui de l’enquête, conséquence de la plainte de Nadia.
Ce processus de superposition entre la tragédie antique et celle contemporaine, Tiago Rodrigues le réalise à partir de la lecture de la pièce, des échanges et conversations avec les comédiens et une étude approfondie du drame actuel de la maltraitance. Le chœur fait office de passeur entre la pièce d’Euripide et l’histoire de Nadia tandis que la musique d’un seul compositeur rappelle l’obsession de son fils qui l’écoute en boucle. Les comédiens, quant à eux, excellent à passer d’un texte à l’autre, jouant entre eux et avec le public subjugué.
La tragédie d’Euripide s’achève par une prémonition du destin d’Hécube qui transformée en chienne de guerre ne cessera d’aboyer. On admire cette dernière transposition, celle de l’immense statue d’une chienne qui occupe le plateau et le récit final du destin d’une autre. Éblouissant! M-P P. Comédie-Française - Salle Richelieu 1er.