GUIGUE ET PLO : ICI ET LÀ de Alexis Chevalier et Grégoire Roqueplo. Mise en scène François Jenny avec Alexis Chevalier et Grégoire Roqueplo.
C’est ce qu’on appelle, en langage pseudo-savant de figure de style, une concaténation ou autre anadiplose. Mais oui, tout le monde connaît « j’en ai marre marabout bout de ficelle selle de cheval… etc. ». Ainsi, les deux comiques, mais avec grande finesse rhétorique, vont enchaîner les concepts plus ou moins abstraits, les considérations sur la phonétique comparée, sur l’élasticité potentielle du temps, les aléas surprenants des chiffres, etc. Une version élaborée, en langage hautement châtié, de Sganarelle tentant de ramener à une morale plus banale son maître Dom Juan. Dès les premiers mots, on se laisse emporter dans la fascination rieuse par ce duo aux allures classiques de Monsieur Loyal et Auguste à la mode contemporaine. Drapé dans sa jaquette de cérémonie, Guigue, du haut de sa superbe voire de sa violence physique, tyrannise Plo et ce naïf apparemment benêt se soumet servilement, tout en s’offrant des échappatoires inopinées. Et, comme tout repose sur les assauts du langage, Plo l’Auguste au chapeau troué et aux bretelles volatiles s’adonne par moments à un volapük jubilatoire. On se croirait dans les Diablogues de Roland Dubillard, on dérive dans l’absurde joyeux, on renonce bien vite à trouver une cohérence cartésienne à ce flot d’aphorismes en choc cosmique, fleuri de jeux de mots et d’à-peu-près. Le public est invité à la polyphonie chorale des rires, le spectateur du premier rang est désigné comme victime propitiatoire, tous les ingrédients sont convoqués. A propos, le saviez-vous ?, le procédé se nomme aussi « dorica castra ». Trois p’tits chats, chapeau d’paille, paillasson…
Petits clowns deviendront grands pourvu que le théâtre leur prête vie. Il est urgent d’y contribuer. A.D. Théâtre des Feux de la Rampe 9e.