GLENN, NAISSANCE D’UN PRODIGE

Article publié dans la Lettre n°553 du 14 septembre 2022


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GLENN, NAISSANCE D’UN PRODIGE d’Ivan Calbérac. Mise en scène de l’auteur. Scénographie Juliette Azzopardi et Jean-Benoît Thibaud. Avec Thomas Gendronneau, Josiane Stoléru, Bernard Malaka, Lison Pennec, Benoît Tachoires, Stéphane Roux.
On mourait jeune à l’époque de Mozart mais force est de constater qu’à la nôtre, bien des musiciens décèdent à la fleur de l’âge, souvent suite à l’absorption continue de drogues dures. Glenn Gould, lui, décède à cinquante ans des suites d’un A.V.C mais aussi pour avoir ingéré durant des années un nombre massif de médicaments, prises exigées par une hypocondrie sévère. Le milieu dont il est issu est pourtant propice au développement harmonieux d’un enfant qui montre dès l’âge de trois ans de réelles dispositions pour la musique, couvé par un père « vendeur de peaux » et une mère, pianiste émérite, aux espoirs de carrière brisés par les convenances. Mais chez les Gould, on enferme un enfant de trois ans dans un cabinet de toilettes jusqu’à ce que la succession des notes dictées par sa mère au piano soit sans fautes, une mère qui dort dans le lit de son fils, un jour sur deux, jusqu’à ses quinze ans révolus, une mère qui prend soin d’écarter sa nièce Jessie, amoureuse de son cousin, qui attendra toute sa vie un geste, une demande qui ne viendront pas, tout ceci sans que le père s’y oppose.
Faut-il voir dans cette éducation les causes des différents défauts et maux qui touchent Glenn ? Est-il réellement Asperger comme l’ont supposé certains psychiatres, ou faut-il se ranger à l’opinion de Jean-Paul Sartre sur les enfants en général : «  Un enfant, ce monstre que les adultes fabriquent avec leurs regrets » ?
Ivan Calbérac expose simplement ces interrogations sans porter de jugement et met en scène avec brio la vie de ce musicien excentrique qui déconcerte toujours par l’interprétation très rock ‘n’roll de la musique classique. Tandis qu’au fond du plateau défilent les vidéos des différents lieux foulés par Glenn, une scénographie énergique aiguillonne les comédiens. Musicien accompli, Thomas Gendronneau interprète le rôle-titre. Lui et Lison Pennec se glissent dans la peau de Glenn et de Jessie à tous les âges avec une crédibilité impressionnante. D’un naturel consommé, Josiane Stoléru surfe sur les différentes facettes d’une mère omniprésente, petite « dame de fer » intransigeante, pleine d’humour, débordante d’amour pour ce fils unique. Bernard Malaka, excellent, incarne un Bert Gould étouffé par la personnalité de son épouse, honteux de sa lâcheté à ne pouvoir s’opposer à ses décisions. Benoît Tachoires et Stéphane Roux se partagent les autres rôles avec un remarquable à-propos. Une pièce magnifique à ne pas manquer. M-P P. Petit Montparnasse 14e.


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