LES BIJOUX DE PACOTILLE

Article publié dans la Lettre n° 450
du 14 mars 2018


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LES BIJOUX DE PACOTILLE de Céline Milliat Baumgartner. Mise en scène Pauline Bureau avec Céline Milliat Baumgartner.
Une soirée un peu arrosée, un tunnel, le feu pas-de-joie d’une voiture en flammes. L’incandescence des souvenirs, la fillette devenue grande la raconte, dans sa petite robe défraîchie, juchée sur les chaussons roses de sa danse d’enfant. Corps escamotés, funérailles interdites aux deux enfants qui avaient si bien fait tourner en bourrique le baby-sitter débutant. Le deuil aussi a été escamoté. Alors demeurent les souvenirs qui virevoltent sur fond de mélodie naïve, comme une ritournelle de boîte à musique.
Elle est là, seule sur ce grand espace, avec le dérisoire carton de ses trésors, dupliquée par le large miroir incliné qui suscite la magie des vagues ou des nuages. Et elle décline les quatre mouvements d’une symphonie du temps interdit. Premier moment, au présent, celui du récit de l’accident, des rires d’enfants, des tendresses paternelles, des séductions de son actrice de mère. Un récit sans pathos, hérissé de petites plaisanteries, comme ça en passant, dans la légèreté et la fragilité d’un moment inénarrable, puisqu’il a été volé aux survivants. Deuxième tempo, au futur, scandé par l’anaphore « Quand mes parents ne seront plus là », le futur d’une vie impossible à vivre et pourtant vécue. Troisième tempo, au passé composé, décomposé plutôt, maladroitement recomposé pour l’évocation de ce qui a succédé, envers et contre toutes les douleurs enfouies. Ne reste que le quatrième présent, celui des négations, des moments qui n’auront jamais lieu, parce qu’ils supposeraient l’intimité du quotidien, de la vie qui coule entre les âges, une vie normale en somme, avec cette mère qu’on porte en soi, tatouée sur son ventre.
Les chaussures glissent magiquement, la danseuse esquisse les figures graciles de son silence. Céline Milliat Baumgartner est bouleversante de simplicité et d’humour, on suit ses esquisses, la gorge nouée d’une émotion souriante. Et son présent théâtral est un bijou, pas de pacotille. A.D. Théâtre du Rond-Point 8e.


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