BAMBINA de Serena Reinaldi. Mise en scène Sébastien Rajon. Avec Serena Reinaldi.
Comment être une call-girl et prétendre changer le monde ? Pervertie dès l'adolescence par des hommes influents, Bambina se voit confrontée à la justice lancée aux trousses de la corruption au plus haut niveau du pouvoir. Les politiciens véreux tombent, elle s'en sort. Désormais très riche, elle se met en tête de sauver le monde. Vaste programme auquel elle consacre toute son énergie et la naïveté de ses utopies, envers et contre tous les quolibets, les insultes, les chantages. Elle trace un portrait sans complaisance, ni verbale ni physique, de ce chemin semé d'embûches. Petit à petit, entre récit au présent et souvenirs évoqués, entremêlés de dialogues désopilants avec sa mère, le Pape et même Dieu, Bambina lève le voile sur la maltraitance de l'enfance, sur l'apprentissage contraint de la ruse et de la vengeance. Un féminisme combattant qui a permis sa survie face à l'hypocrisie et aux appétits sans vergogne d'un monde gangrené de vices libidineux.
Le canapé Récamier au centre de l'espace scénique matérialise la débauche comme la confidence, tandis que sur le mur du fond sont projetés en vidéo des corps de femmes, prostituées, manifestantes, foules dans le silence attentif de la ferveur ou dans le hurlement de la révolte.
Bambina oscille entre la gouaille de la rue, la verdeur réjouissante du langage sans fard, la douleur à peine voilée, la souffrance d'amour jamais comblée. Et ce qui pourrait n'être qu'un collier de poncifs, d'aphorismes, de mots d'ordre éculés, une vindicte pleine d'amertume, monte subrepticement jusqu'à l'émotion sincère d'un rêve exprimé, d'un idéal enfin à portée d'espérance.
Serena Reinaldi est souple et rieuse et son impudeur apparente est la marque d'une pudeur vraie.
Un plaisir à ne pas manquer. A.D. Théâtre Lepic 18e.