L’ANGOISSE DU ROI SALOMON d’après le roman d’Émile Ajar - Romain Gary. Adaptation et mise en scène Bruno Abraham-Kremer et Corine Juresco avec Bruno Abraham-Kremer.
Jean a longtemps remis le projet de raconter à son fils la rencontre qu’il fit un jour avec un homme de 84 ans qui monta dans son taxi et changea sa vie. Monsieur Salomon engagea la conversation avec ce chauffeur à la gueule d’ange et de voyou, l’invita à prendre un verre et lui fit cette incroyable proposition accompagnée d’un chèque, celle de devenir son chauffeur attitré. Ils étaient trois à payer la licence du taxi, Jean et ses deux copains devinrent donc les chauffeurs du vieil homme. Après avoir été le roi du prêt-à-porter, Monsieur Salomon avait décidé de mettre sa fortune au service des autres en créant le service téléphonique « S.O.S bénévoles », installé dans son propre appartement. L’amitié de Jean et de Monsieur Salomon s’étoffa au fil du temps. Jean et ses copains devinrent chauffeurs et commissionnaires, rejoignant même le petit groupe des standardistes ! Au gré des confidences, Jean découvrit la solitude de Monsieur Salomon et une blessure non cicatrisée infligée par une certaine Cora Lamenaire, ancienne chanteuse réaliste que ce juif russe exilé à Paris avait rencontrée avant la guerre. Il en était amoureux mais une terrible trahison les avait séparés. Jean fit la connaissance de Cora. De fil en aiguille et dans son propre intérêt, il entreprit de réconcilier son vieil ami avec l’ancienne chanteuse.
Après la création mémorable de « La Promesse de l’aube » (Lettre n°336), Bruno Abraham-Kremer et Corine Juresco se coulent avec la même aisance dans l’adaptation et la mise en scène de « L’Angoisse du roi Salomon ». Rompu à ce genre de défi, Bruno Abraham-Kremer emporte ses auditeurs dans les quartiers d’un Paris aux multiples facettes, de la rue du Sentier aux Champs-Élysées, du roi du pantalon à l’artisan taxi. Sans répit, il va et vient sur scène, passe en un tour de main d’un personnage à l’autre et mime toutes leurs actions en se servant du décor et des bruitages. Il oscille entre le parler populaire de Jean et la langue châtiée de Monsieur Salomon, change d’accent avec une diction à faire pâlir d’envie. En restituant avec une telle passion ce récit d’une belle humanité où règnent l’amitié et l’amour, il en magnifie l’histoire. M-P.P. Théâtre du Petit Saint-Martin 10e.