CHÈRE INSAISISSABLE de Sophie Tellier d’après la vie de Liane de Pougy. Mise en scène Jean-Luc Revol. Avec Sophie Tellier. Au piano Luc-Emmanuel Betton ou Djahiz Gil.
Liane de Pougy, Gaby Deslys, Caroline Otero … Elles furent quelques-unes à s’affranchir de la domination masculine durant une «Belle époque» qui n’était sans doute pas si belle pour toutes. Venant de milieux différents, elles grimpaient avec détermination les échelons de la courtisanerie avec un seul but, être libres.
Mariée à seize ans à un militaire violent dont elle aura un fils, Anne-Marie Chassaigne (1869-1950), divorce trois ans plus tard, prise en flagrant délit d’adultère. Celui-ci se solde par une balle très mal placée ! Bannie de sa famille, elle se fond alors dans la foisonnante société parisienne et entreprend de gérer sa carrière en «vendant du rêve» aux hommes, contre bijoux sonnants et trébuchants. Mineure toute sa vie ? Que nenni ! Plutôt supporter les assauts répugnants de cette «machine à faire de l’argent» qui, nue, «n’est plus qu’un animal lubrique». Après quelques années qu’elle préfère oublier, Anne-Marie devient Liane de Pougy. Sa beauté fait tourner les têtes. Le caractère bien trempé et dotée d’un grand sens des affaires, elle entre enfin dans le monde feutré des riches.
«Servir de paradis aux autres est un enfer». Les amours particulières compensent, mais le décès de son fils unique sera le chagrin de trop…
Étourdissante la façon dont Sophie Tellier se glisse dans la peau de l’une des courtisanes les plus scandaleuses de l’époque. Luc-Emmanuel Betton l’accompagne au piano. Il exécute avec une pointe d’espièglerie des extraits de musique classique et des chansons de l’époque ou contemporaines que la comédienne, chanteuse émérite, interprète. Ce répertoire ponctue le destin incroyable d’une jeune fille toute simple devenue en quelques décennies danseuse, actrice, romancière, éditrice et princesse avant d’être, envers les plus démunis, la généreuse sœur Anne-Marie de la Pénitence. Sophie Tellier se drape dans un déshabillé puis dans un autre, ne recourant qu’à une méridienne, quelques mannequins masculins et, en transparence, de délicats portraits. Une belle performance. M-P P. Lucernaire 6e.