VERMEER
et les maîtres de la peinture de genre

Article publié dans la Lettre n° 417
du 6 mars 2017


 
Pour voir le parcours en images de l'exposition, cliquez ici.

VERMEER et les maîtres de la peinture de genre. Avec un peintre dont on ne connaît que trente-sept peintures, de surcroît de petit format, il n’est sans doute pas facile de concevoir une grande exposition. Les commissaires des trois musées concernés (Le Louvre, la National Gallery of Ireland et la National Gallery of Art de Washington) ont choisi d’associer à Vermeer (1632-1675) les peintres contemporains qui se sont illustrés dans la peinture chère à celui-ci et à ses clients, la peinture de genre.
A la fin du XIXe siècle, le Français Théophile Thoré-Bürger révéla Vermeer au monde, le qualifiant de « sphinx de Delft ». Cette « découverte » tardive lança le mythe d’un génie solitaire, coupé de l’art de son temps. En confrontant Vermeer aux artistes de son époque, la présente exposition montre que celui-ci était intégré dans un réseau de peintres, spécialisés dans la représentation de scènes élégantes et raffinées, qui connaissaient les tableaux de leurs confrères, s’admiraient et s’en inspiraient.
Le parcours s’articule donc autour de treize thèmes, illustrés par de nombreux tableaux de ces artistes du Siècle d’or tels que Gerard Dou, Gerard ter Borch, Jan Steen, Pieter de Hooch, Gabriel Metsu, Caspar Netscher, Frans van Mieris, etc. Avec douze toiles, soit le tiers des œuvres connues, Vermeer est présent au milieu de ses confrères, sans que celles-ci, sauf exceptions, soient mises en exergue, ce qui peut déconcerter les visiteurs venus sur son seul nom.
Le premier thème est « La pesée » avec La Peseuse d’or de Pieter de Hooch et La Femme à la balance de Vermeer, deux tableaux de 1664. Ce dernier s’est manifestement inspiré du premier mais a transcendé le sujet en représentant la femme devant un Jugement dernier, tableau dans le tableau, transformant un geste simple en sujet de réflexion.
Avec « Missives amoureuses », nous avons deux toiles de Vermeer illustrant ce thème, La Lettre interrompue, où une jeune femme semble porter son regard vers le spectateur, et La Lettre où le sujet a manifestement du mal à rédiger sa missive si l’on en croit le papier froissé et jeté au sol, au premier plan du tableau, tandis qu’une servante attend patiemment derrière elle, le regard tourné vers la fenêtre. A côté de ces toiles on trouve des œuvres similaires, ayant le même titre, signées de Gabriel Metsu, Gerard ter Borch et Frans van Mieris.
Le thème suivant, « Tributs », représente des visites impromptues, espérées ou importunes, mettant en scène plusieurs personnages. L’inventeur de ce sujet semble être ter Borch, suivi par ses confrères, peignant des toilettes encore plus somptueuses. Dans cette section, les commissaires ont exposé La Jeune fille au collier de perles de Vermeer, à côté de Femme à sa toilette de Caspar Netscher.
Pour les trois thèmes suivants nous n’avons aucun tableau de Vermeer. Le premier « Aphrodisiaques » nous montre trois scènes où un homme offre à une femme des huitres ou un verre de vin, prélude à d’autres plaisirs. Ils sont signés ter Borch, van Mieris et Jan Steen. Dans le deuxième, « Les Perroquets », trois femmes jouent avec leur compagnon ailé. Ces toiles sont l’œuvre de Gerard Dou, van Mieris et Netscher. Enfin, « Sans Vermeer ? » montre que le réseau des peintres actifs en Hollande après 1650 ne reposait pas sur Vermeer seul. Parmi les sujets illustrant cette section, citons La Visite du médecin de Jan Steen et de van Mieris, La Peleuse de pommes de ter Borch et L’Épluchage de Nicolaes Maes, La Nourrice, l’enfant et le chien de Pieter de Hooch, Le Galant Militaire de ter Borch et encore Le Cavalier endormi de Jacob Ochtervelt.
Si l’on écrivait beaucoup dans le pays le plus urbanisé de l’Europe du XVIIe siècle, on jouait tout autant d’un instrument. C’est le sujet du thème suivant, « Cordes sensibles », l’un des plus illustrés de l’exposition avec surtout des femmes prenant des leçons de musique ou jouant du luth, du théorbe, de la viole de gambe, du virginal (sorte de petit clavecin) ou du clavicorde, seules ou en duo. Sur les quelque huit toiles de Vermeer sur ce thème trois sont exposées ici : La Joueuse de luth (vers 1663-1664), et deux Jeune femme assise au virginal (vers 1671-1674), l’une à Londres, l’autre à New York, dans la collection Leiden, actuellement à l’honneur dans une autre exposition du musée du Louvre.
Après le thème « Enfilades », montrant des intérieurs, dont l’un est paradoxalement vide de personnages, derrière des enfilades de portes, nous arrivons à quatre des tableaux les plus connus de Vermeer, sans doute parce que deux sont au Louvre. Les deux premiers sont L’Astronome et Le Géographe, travaillant en plein jour, tandis que leurs pendants de Gerard Dou travaillent la nuit, d’où le titre de cette section « Le jour et la nuit ». Les deux autres réunis dans une section intitulée « Deux dames » sont La Dentellière et La Laitière. La première est une jeune fille de qualité occupée à une activité comparable à la musique, tandis que la seconde, absorbée dans la préparation d’un pain perdu, est une sorte d’allégorie de la plénitude et de la santé.
Un seul tableau de Vermeer dans les trois derniers thèmes de cette exposition, l’Allégorie de la Foi catholique, traité par le maître de Delft à la manière d’une scène de genre de grand format. Les commissaires ont intitulé cette dernière section, qui ne comporte que ce tableau, « Entre histoire et scène de genre ». Les deux précédents thèmes « Silhouettes » et « A la manière de » montrent le jeu artistique consistant à peindre des personnages de dos vers lesquels convergent les regards des autres personnages, et des tableaux peints dans les années 1660, par des artistes qui, délaissant leurs sujets habituels, se mettent à peindre des scènes de genre. Une exposition remarquable et d’une très grande richesse iconographique. R.P. Musée du Louvre 1er. Jusqu’au 22 mai 2017. Lien : www.louvre.fr.


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