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 Parcours en images  de l'exposition
 LOUIS BOULANGERPeintre rêveur
 avec des visuels 
              mis à la disposition de la presseet nos propres prises de vue
 
 
 
   
               
                 
                  
                    
                      
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                        | Affiche de l'exposition  |  
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                            Consacrer  une rétrospective à Louis Boulanger, que Victor Hugo appelait « mon peintre »,  ne pouvait se faire ailleurs que dans cette maison qu’il a si souvent côtoyée. Cette  exposition nous ramène plus largement aux sources du Romantisme, au début des  années 1820, parmi les «nobles noms rayonnant d’espérance» dont se souvient  son camarade de bataille le peintre Eugène Devéria. Cette génération qui  n’avait pas vingt ans, se retrouvait chez les Devéria et rêvait de réformer les  arts, les lettres et la musique, pour créer une esthétique moderne. L’année 1827,  tel un putsch, installe la « nouvelle école » romantique. Louis Boulanger porte  l’un des principaux coups à la doctrine classique avec Le Supplice de Mazeppa  (Rouen, musée des Beaux-Arts), toile monumentale  puisant son sujet chez Byron et sa référence picturale chez Rubens. Sa carrière  est lancée, les choix de l’artiste resteront toujours radicaux. 
                            Son idéal  trouve dans son amitié avec Victor Hugo l’expression la plus parfaite du désir  de croiser les arts. Le peintre donne corps aux textes du poète en les  transposant dans ses œuvres, tandis que l’auteur révèle la poésie profonde des  toiles de son ami. Boulanger sera de toutes les luttes, de l’essor de la  lithographe jusqu’au théâtre, où il habille les drames d’Hugo et de Dumas. 
                            Ami  fidèle et éternel poète, Boulanger conservera toute sa vie la nostalgie de ces  temps exaltants, qu’il défend en peinture jusqu’à sa mort, en 1867. Souvent  évoqué comme l’illustrateur d’Hugo, il est en réalité l’un des penseurs du  mouvement et sa vie, à elle seule, une «histoire» du romantisme.
                            
                         
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                        | Texte du panneau didactique. |  | Louis Boulanger (1806-1867). Rosine et Figaro dans Le Barbier de  Séville, vers 1830. Aquarelle sur papier. Paris, collection Jean-Christophe  Baudequin, courtesy galerie La Nouvelle Athènes. 
 
 
Défendre un répertoire et des  auteurs mésestimés est l'un des enjeux du groupe d'amis, parmi lesquels  figurent des comédiens comme Régnier. Molière et Beaumarchais, figures  centrales de l’histoire de la Comédie-Française, n'y sont plus joués que par  obligation, et Boulanger et Devéria opèrent une véritable promotion en  multipliant les compositions empruntées aux pièces phares de ces auteurs. |   
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 1 - Un peintre dans le cénacle romantique
 
 
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                        | Scénographie 
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                            Né en  1806 à Vercelli dans le Piémont, Louis Boulanger montre durant son enfance à  Paris un goût prononcé pour les lettres. L’amitié qu’il tisse avec les neveux  de son professeur de latin, Achille et Eugène Devéria, sera déterminante. Achille,  l’aîné de cette famille d’origine créole, formé chez Lafitte et Girodet, s’est  déjà fait un nom dans l’illustration et il infuse les idées nouvelles dans  l’esprit de Louis et d’Eugène. En 1821, les deux étudiants poursuivent en  complément leur apprentissage avec l’académicien Guillaume Guillon Lethière,  sans doute choisi pour ses origines guadeloupéennes et sa peinture moins  marquée par le néoclassicisme des derniers élèves de David.La grande  maison familiale des Devéria - 45, rue Notre-Dame-des-Champs - devient à partir  de 1824 le quartier général de tous ceux qui veulent renouveler les arts. Les  médaillons de David d’Angers conservent le visage de ce cénacle, au sein duquel  Louis Boulanger et Victor Hugo sont parmi les personnalités les plus engagées. Dans  un atelier pris avec Eugène Devéria, Louis prépare le Salon de 1827 et  s’imprègne de la vie artistique, notamment au théâtre où son rêve de fraternité  des arts s’incarne le mieux.
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                        | Texte du panneau didactique. |  | Louis Boulanger (1806-1867)  et Achille Devéria (1800-1857). Kan-Kao,  1822. Crayon et craie blanche sur papier. Dijon, musée des Beaux-Arts.
 
 
Rares  sont les Chinois présents à Paris, aussi la possibilité de portraiturer  Kan-Kao, ou Kan-Gao, ramené en octobre 1820 à Paris par le capitaine de  vaisseau Philibert pour lui enseigner le français, est une véritable aubaine  pour Achille Devéria et Louis Boulanger. L'un des frères Devéria, Théodule,  avait embrassé comme leur père la carrière de marin et avait embarqué sur L'Amphitrite avec Philibert. Ce portrait  réaliste, dessiné sur le vif, tranche avec celui, peint, de Delaval (conservé à  Versailles), au costume et au décor exotiques. |  
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                        | Louis Boulanger (1806-1867). Léopoldine à quatre ans, 1827. Huile  sur toile. Paris, maison de Victor Hugo. Don d'Alice Leckroy, Georges et Jeanne  Hugo, en 1903. © Maisons de Victor Hugo Paris-Guernesey Paris Musées.  
 
 
Ce portrait, dans lequel se sent la forte  personnalité artistique de Louis Boulanger, fait partie des trois tableaux  refusés par le jury au Salon de 1827, où triomphe en revanche son Supplice de  Mazeppa. L'absence de réalisme, la recherche narrative et la palette évoquant  l'influence de la peinture anglaise sont trop en rupture avec les canons de  l'exposition officielle. |  | Louis Boulanger (1806-1867). Adèle à la cerise, 1831-32. © Maisons  de Victor Hugo Paris-Guernesey Paris Musées. |  
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                        | Scénographie  |  
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                        | Louis Boulanger (1806-1867). Paganini jouant, vers 1832. Encre sur  papier. Paris, Bibliothèque nationale de France, département des Estampes et de  la Photographie. |  | Louis Boulanger (1806-1867). Paganini en prison, 1832. Paris,  musée Carnavalet - Histoire de Paris. Lithographie sur papier. |  
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                        | Louis Boulanger (1806-1867). Herminie et Tancrède, vers 1826.  Aquarelle et plume sur papier.
 
 
 Parmi les auteurs du nouveau panthéon  romantique, le Tasse et les auteurs de la Renaissance italienne remplacent ceux  de l'Antiquité, chers à la génération précédente. La Jérusalem délivrée est l’une des sources favorites du jeune  peintre. |  | Guillaume Guillon Lethière  (1760-1832). Carlo et Ubaldo dans les  jardins d'Armide, vers 1815-1820. Huile sur toile. 
 
 
Parmi les peintres qui  émergent sous la Révolution, Guillon Lethière montre un goût moins marqué que  les élèves de David pour l'esthétique néoclassique. Même si Boulanger ne se  revendique pas vraiment de lui, il retient de son professeur un sens de la  couleur et de la narration. Il reprend notamment en 1824 la composition de ce  tableau inspiré de La Jérusalem délivrée du Tasse, pour une toile de sujet identique, qu'il expose plus tard au Salon de  1833. |   
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 2 - Le temps des coups d'éclat
 
 
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                        | Scénographie 
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                          À la fin  de l’année 1827, Le Supplice de Mazeppa, sujet emprunté à l’écrivain anglais Lord Byron, impose Louis  Boulanger au Salon parmi les jeunes chefs de file du romantisme victorieux. Sa  toile monumentale revendique Rubens comme modèle et renverse la hiérarchie des  genres en traitant un sujet littéraire à travers la peinture d’histoire. L’État  préfère à son tableau, ainsi qu’à celui de Delacroix, ceux de Devéria et  Scheffer, ce qui convainc Boulanger de conserver une certaine radicalité.  L’éditeur Henri Gaugain, conscient du tournant qui s’opère, acquiert et offre  en 1835 ce tableau de cinq mètres de haut au musée de Rouen. Gaugain a déjà  compris l’impact du jeune artiste et réalise avec lui et Achille Devéria des  albums de lithographies pionniers, où l’image prévaut sur le texte, tels Souvenirs du théâtre anglais à Paris.C’est  néanmoins avec Charles Motte, l’un des éditeurs-lithographes les plus engagés  dans la promotion de la «nouvelle école», que Louis Boulanger se montre le  plus innovant. En 1829 il développe à son paroxysme son idéal d’échange entre  les arts, avec une série de lithographies mais aussi d’aquarelles et de  peintures à partir du recueil Les  Orientales de son ami Hugo, qui en contrepartie versifie les  œuvres de Boulanger.
 
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                        | Texte du panneau didactique. |  | Louis Boulanger (1806-1867). Sara la baigneuse [Les Orientales de Victor Hugo], 1830.  Lithographie sur papier. Paris, maison de Victor Hugo. |  
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                        | Louis Boulanger (1806-1867). Le Feu du ciel, 1829. Huile sur  toile. Paris, maison de Victor Hugo. © Maisons de Victor Hugo Paris-Guernesey  Paris Musées. 
 
 
Ce grand tableau prend sa source dans le poème d'ouverture des Orientales, véritable synthèse du  monstrueux et du sublime. Dès 1829 il a appartenu à Hugo, qui ne s'en est  jamais séparé au gré de ses déménagements. Boulanger en tire en 1832 chez  Lemercier l'une de ses magistrales lithographies de grand format et aux noirs  profonds, qui le font comparer à l'Anglais John Martin. Le sujet l'occupera  jusqu'à la veille de sa mort, au Salon de 1867, où il repart du souvenir de  cette esquisse pour en réaliser un tableau abouti, racheté lors de sa vente  après-décès par sa veuve et qui n'est jamais réapparu. |  | Louis Boulanger (1806-1867). Les Fantômes [Les Orientales de Victor Hugo], vers 1829. Lithographie sur papier  publiée chez Charles Motte. Paris, maison de Victor Hugo. |  
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                        | Louis Boulanger (1806-1867). Le Feu du ciel, 1832. Lithographie  sur papier publiée chez Lemercier. Paris, maison de Victor Hugo. 
 
 
Comme dans la Ronde du Sabbat quatre ans plus tôt,  Boulanger brouille les frontières entre la lithographie et la peinture, en  adoptant un format inhabituel pour une estampe. Au-delà de la virtuosité  technique qu'implique la réalisation d'une planche si ambitieuse, Le Feu du ciel revendique une esthétique  propre à la lithographie, véritable éloge du noir, et une égalité avec la  peinture. L'avantage est son coût plus modique et la possibilité de toucher le  plus grand nombre. Le sujet est pris dans Les  Orientales d'Hugo (1829), avec pour vocation de donner à voir l'esthétique  de son ami, dont la carrière s'est envolée entre-temps avec la sortie de Notre-Dame de Paris, en 1831.  |  
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                        | Louis Boulanger (1806-1867). Orientale, vers 1827-1828. Aquarelle  sur papier. Paris, maison de Victor Hugo. © Maisons de Victor Hugo  Paris-Guernesey Paris Musées.
 
 
 L'imaginaire de l'Orient est véhiculé tant par le  souvenir de la campagne d'Égypte que par Le  Giaour de Lord Byron ou Les Mille et  Une Nuits, Il est une source d'inspiration primordiale pour les jeunes  peintres. Eugène Devéria et Boulanger ne dérogent pas à la règle, avec des  sujets « indiens », comme les catalogues le mentionnent régulièrement. Cette  belle aquarelle, typique de l’art de Boulanger, n'a été présentée dans aucune  exposition au moment de sa réalisation. |  | Louis Boulanger (1806-1867). Les Fantômes [Les Orientales de Victor Hugo], vers  1829. Aquarelle sur papier. Paris, maison de Victor Hugo. © Maisons de Victor Hugo Paris-Guernesey Paris Musées.  
 
 
La publication du recueil de poésies Les  Orientales, en 1829, ouvre un pan iconographique de l'œuvre de Louis  Boulanger, qui met la lithographie, le dessin et la peinture au service de la  traduction, dans le monde des images, de l'univers de son ami. Les fantômes  donnent lieu à deux lithographies chez Motte, une aquarelle et un dessin.  Emblématiques du romantisme noir de Boulanger, ces visions alliant le  pittoresque au grotesque et le fantastique au frénétique incarnent son ambition  de porter à l'image l'univers poétique, dans la continuité de Füssli ou de Goya. |  
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                        | Louis Boulanger (1806-1867). Hamlet, acte 5, scène 1, 1827.  Lithographie en couleurs. Paris, collections de la Comédie-Française. |  | Louis Boulanger (1806-1867). Personnages en costumes grecs dans un  intérieur, vers 1827. Huile sur toile. Paris, collection particulière. 
 
 
Le  comte Demetrius Palatiano, introduit par Richard Parkes Bonington, devient un  modèle populaire entre 1826 et 1827 dans les ateliers parisiens, où le  philhellénisme déchaîne les passions en pleine guerre d'indépendance grecque. Il  pose en costume souliote pour le jeune Anglais, mais également pour Delacroix,  et sans doute ici pour Boulanger, qui en tire ce tableau qu'il n'a jamais  exposé, en dépit de son format et de sa grande réussite picturale. Le second  personnage se retrouve dans d’autres compositions de Boulanger et d'Achille  Devéria. La composition a été   lithographiée en 1828 sous le titre Un  chef Albanais. |   
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 3 - Un romantique au Salon
 
 
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                        | Scénographie 
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                          Le jeune  peintre bouscule les règles académiques et affirme un univers sombre et  dramatique et déchaîne haines et passions. Le refus, en 1831, de la monumentale Mort de Bailly, de la Chasse infernale en 1835, du Roi Lear en 1836 ou de la Mort de Messaline en 1843 l’affectent mais multiplient ses soutiens inconditionnels,  notamment dans la revue L’Artiste, auprès de la jeunesse Romantique ou d’admirateurs, tels le duc  d’Orléans, dont les commandes assurent sa liberté picturale et sa subsistance  financière.Le  Salon s’ouvre sous la monarchie de Juillet à des genres et formats auparavant  jugés indignes de ce cadre officiel. Boulanger privilégie les sujets  littéraires, pris chez le Tasse, Cervantès, Goethe et Hugo, explore les sujets  espagnols, érige l’aquarelle et les petits formats empâtés en techniques  romantiques par excellence. Laissant de côté les considérations commerciales, il  cherche avant tout à faire la démonstration des références qui lui sont chères.  Entre 1837 et 1843, la fraternité des arts et la représentation du génie sont  ses sujets de prédilection, avec une galerie de portraits habités par une  flamme intérieure : Achille Devéria mais aussi les écrivains Balzac, Antoine  Fontaney, Pétrus Borel, Francis Wey et Hugo réaffirment la place du groupe dans  son cheminement artistique.
 
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                        | Texte du panneau didactique. |  | Louis Boulanger (1806-1867). Mort du cheval de Mazeppa, 1839.  Lithographie sur papier éditée chez Lemercier. Paris, maison de Victor Hugo. © Maisons  de Victor Hugo Paris-Guernesey Paris Musées (non exposée, remplacée par une  lithographie en noir et blanc, inversée, de 1839). 
 
 
Dans Les Orientales, Hugo transpose en vers Le Supplice de Mazeppa de son ami, à qui il dédicace le poème qui  révèle la complexe iconographie du génie indompté développée par Boulanger. Le  peintre reviendra à plusieurs reprises sur l'histoire de Mazeppa, notamment en  1839 dans une série de six lithographies avec Achille Devéria, et au Salon de  1843 avec un tableau à deux mains avec son élève Louis Amiel (mairie de  Dol-de-Bretagne). |  
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                        | Louis Boulanger (1806-1867). Ronde du Sabbat [Odes et ballades de Victor Hugo], 1861. Huile  sur toile. Paris, maison de Victor Hugo. © Maisons de Victor  Hugo Paris-Guernesey Paris Musées (non exposée, remplacée par une lithographie  sur papier de 1828). 
 
 
C'est avec les sujets inquiétants et diaboliques que  Boulanger s'impose dans le monde de la lithographie. La Ronde du Sabbat, feuille monumentale imprimée par Charles Motte,  l'éditeur des romantiques, entérine quelques mois après le Salon la place  acquise par Boulanger avec Le Supplice de  Mazeppa. Le sujet est pris dans un poème des Odes et ballades d'Hugo,  dédicacé à Charles Nodier, maître incontesté du frénétique. Le succès est tel  que la lithographie connaît deux tirages. |  | Louis Boulanger (1806-1867).  Fleurs des champs,  1837. Huile sur  toile. Paris, collection particulière, courtesy galerie Chaptal.
 
 
 Utilisant la  lithographie pour produire des œuvres originales, Boulanger ne rechigne pas à y  recourir pour reproduire et diffuser ses œuvres, en particulier lorsqu'elles ne  sont pas présentées au Salon. C'est le cas de cette composition, publiée en  1837 sous le titre Fleurs des champs. S'il a profondément marqué son temps avec  ses sujets diaboliques, Boulanger a aussi contribué à une iconographie  pittoresque, notamment dans les albums de sujets de la vie moderne composés  avec Devéria, Charlet, Scheffer ou Noël. Cette toile, réalisée l'année où il  envoya au Salon des portraits de proches, laisse supposer un réseau de  collectionneurs achetant ses œuvres hors de l'exposition officielle et qui  apprécient la profonde poésie de ce peintre à part. |  
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                        | Scénographie  |  
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                        | Louis Boulanger (1806-1867).  Don Quichotte et Sancho Pança, vers 1857-1859. Huile sur toile. Paris,  collection Paoli, courtesy galerie La Nouvelle Athènes. 
 
 
La fascination de  Boulanger pour l'Espagne passe par sa littérature, notamment Miquel de  Cervantès et son personnage Don Quichotte chez qui se retrouve le grotesque  cher à Hugo. Don Quichotte fait l’objet d’une véritable passion chez les  romantiques : en 1836 l'édition abondamment illustrée par Tony Johannot diffuse  largement le texte, et inspire Antonin Moine pour deux petits bronzes. Au Salon  de 1835, Boulanger expose l'épisode des Noces de Gamache et revient aux  aventures du chevalier errant en 1857 avec deux sujets qui réjouissent la  critique, heureuse de retrouver les thèmes de sa jeunesse. Ce tableau pourrait  être daté des années 1830, lorsque Paris s’éprend du roman, et crée un écho  direct aux sculptures de son ami Antonin Moine. |  | Louis Boulanger  (1806-1867). La Folie du roi Lear,  1836. Huile sur toile. Paris, Petit Palais, Musée des Beaux-Arts de la ville de  Paris. 
 
 
Shakespeare est l’une des sources de prédilection de Louis Boulanger. Il  reviendra notamment à plusieurs reprises sur Le Roi Lear, au Salon de 1834 puis à nouveau au Salon de 1836 avec  ce tableau, qui est refusé par le jury. Très intéressé par la question de la  narration et du narrateur, l'artiste ne se concentrant pas sur un théâtre vu  mais sur un théâtre lu, propice à l'imagination. La revue L'Artiste, vouée aux artistes romantiques, s'offusque du jugement  du jury et reproduit le tableau, que Boulanger renverra quelques années plus  tard au Salon de 1853. Il est acheté par Renduel, qui réédite la même année les  œuvres d'Hugo illustrées par Boulanger. |  
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                        | Louis Boulanger (1806-1867). La Liberté, allégorie des journées de  juillet 1830, vers 1830. Huile sur toile. Paris, musée Carnavalet -  Histoire de Paris. 
 
 
L'avènement de la monarchie de Juillet et l'arrivée au  pouvoir de Louis-Philippe, franc soutien des romantiques, apportent un élan  dans les arts. Boulanger, comme Delacroix avec La Liberté guidant le peuple, songe à une allégorie. Il envoie  finalement au Salon de 1831 un Départ du  roi pour l'Hôtel de Ville (non localisé, 160 x 130 cm). |  | Louis Boulanger (1806-1867). Scène de la Renaissance, vers  1830-1832. Huile sur toile. Paris, Édouard Cattagni. |  
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                        | Scénographie  |  
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                        | Louis Boulanger (1806-1867). Achille Devéria, 1837. Huile sur  toile. Paris, musée du Louvre, département des Peintures. 
 
 
Ce portrait d'Achille  Devéria a ancré l'image d’un artiste austère, loin de la franche générosité qui  le caractérise. Boulanger a su capter la fièvre du scientifique, tenant à la  main, dans une idée faustienne de la collection, l’une des précieuses pièces de  son médaillier. Devéria construira son existence sur la quête du savoir, qu’il  réunit dans des recueils avant de terminer sa vie, de 1848 à 1857, comme  conservateur au département des Estampes de la BnF, dont il a conçu le  classement. Il mourra dans son bureau un 23 décembre peu avant minuit. |  | Louis Boulanger (1806-1867). Madame Victor Hugo, 1839. Huile sur  toile. Paris, maison de Victor Hugo. |   
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                        | Louis Boulanger (1806-1867). Céleste Devéria, vers 1835-1840.  Huile sur carton. Paris, collection particulière. 
 
 
Céleste Motte, fille de  l'imprimeur-lithographe romantique Charles Motte, épouse en 1829 Achille  Devéria, bras droit de son père. Ensemble ils auront sept enfants, dont un  égyptologue, conservateur au Louvre, et un éminent sinologue. Céleste est le  principal modèle de son mari, si bien que son visage est indissociable de la monarchie  de Juillet, tant il a circulé dans les milliers d'estampes d'Achille, En 1838,  Eugène Devéria, à Milan, s'étonne de voir les artistes italiens et autrichiens  peindre Céleste, à force de copier les lithographies de son frère. Boulanger en  trace un portrait qui n'est pas sans évoquer les visages des Trois Amours poétiques, auxquelles il a  donné les traits de celle qui a enchanté le salon des Devéria. |  | Louis Boulanger (1806-1867). Trois Amours poétiques : Beatrix, Laure,  Orsolina, vers 1839-1840. Huile sur toile.   Toulouse, musée des Augustins. 
 
 
Les auteurs de |a Renaissance italienne,  notamment Dante, Pétrarque et l’Arioste, forment un nouveau panthéon pour la «nouvelle école» romantique, véhiculant un idéal poétique autant qu'amoureux.  Dans cette grande toile, que le duc d'Orléans fait envoyer à Toulouse pour  enrichir le musée, Boulanger met à l'honneur les muses des poètes, à l'instar  du sculpteur Henry de Triqueti qui, la même année, les place dans les niches du  piédestal du vase de Dante et de Pétrarque qu'il réalise pour Ferdinand  d'Orléans. |   
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 4 - Boulanger, Hugo et Dumas :
 regarder la littérature
 
 
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                        | Scénographie 
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                          Victor  Hugo, rencontré en 1824, devient un alter ego avec qui rêver d’abattre les  barrières entre les arts. Après les  Orientales, Notre-Dame-de-Paris donne lieu à une série de huit aquarelles  plongeant dans l’univers truculents du roman, que Boulanger aborde avec une  exactitude d’historien.Peu  enclin dans un premier temps à abuser de l’illustration, dont l’abondance au  sein du livre risque de détourner du texte, Hugo doit se plier, sous la  monarchie de Juillet, à cette nouvelle exigence éditoriale. D’abord engagée  dans la recherche de fraternité des arts, la vignette devient en effet un enjeu  commercial déterminant le succès d’une publication. Boulanger, qui a déjà mis  l’œuvre d’Hugo en image, est l’artiste tout désigné pour accompagner les  rééditions de son ami. Dumas à son tour le sollicite pour ses Crimes célèbres, registre  iconographique dont Boulanger a le secret.
 La  littérature est plus que jamais au cœur de ses préoccupations. Traducteur  visuel d’écrits du présent ou du passé, révèle également le génie des auteurs. Le Triomphe de Pétrarque, commandé par  le marquis de Custine et connu grâce à un carton préparatoire, réunit la  génération romantique invitée à poser pour cette allégorie d’un nouveau panthéon,  où la Renaissance remplace l’Antiquité des classiques.
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                        | Texte du panneau didactique. |  | Louis Boulanger (1806-1867). Après le duel [illustration pour Marion de Lorme], vers 1836. Lavis de  sépia sur papier. Paris, maison de Victor Hugo. |  
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                        | Louis Boulanger (1806-1867). Honoré de Balzac, 1836. Huile sur  toile. Tours, musée des Beaux-Arts, dépôt du département des Peintures du musée  du Louvre. 
 
 
L'écrivain du cénacle Antoine Fontaney témoigne dans son Journal des séances de pose de Balzac en  septembre 1836 : «Description de ses robes blanches. Il n’a plus voulu d'autre  costume depuis qu'il a visité les Chartreux. Il ne fait blanchir une robe  qu'une fois. Il ne se tache jamais d'encre.» Ce portrait emblématique  n'est connu que par cette esquisse, qui laisse imaginer la forte impression  qu'a pu produire le tableau de l'auteur à succès au Salon de 1837, aux côtés  entre autres de ceux de Fontaney et de Devéria. Alors que d'autres se font  représenter en Costume bourgeois, les membres du cénacle se font inscrire à la  postérité comme des personnalités habitées et hors des normes. |  | Louis Boulanger (1806-1867). Victor Hugo, 1837. Craie de cire et  gouache sur papier. Paris, Société historique et littéraire polonaise,  Bibliothèque polonaise de Paris. |  
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                        | Scénographie  |  
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                        | Louis Boulanger (1806-1867). Le Sire de Gyac [d'après Alexandre  Dumas], vers 1832. Aquarelle sur papier. Collection particulière, courtesy  galerie La Nouvelle Athènes.
 
 
 Cette aquarelle et sa voisine constituent une  paire qui a appartenu à François Buloz, directeur de la Revue des Deux Mondes à partir de 1831. Si le sujet de la seconde  n'est pas identifié, la première est pris dans une nouvelle d'Alexandre Dumas,  publiée en 1832 dans ce périodique (qui devient avec Buloz le réseau de  diffusion de la littérature romantique) Le  Sire de Gyac, reprise en 1835 sous le titre La Main droite du Sire de Giac, il y a fort à penser que la  seconde, également transmise par Buloz à sa fille Marie Pailleron, puise son  sujet dans une nouvelle de Dumas, ou du moins dans un texte paru dans la revue. |  | Louis Boulanger (1806-1867). Sujet non identifié, vers 1832.  Aquarelle sur papier. Orléans, musée des Beaux-Arts. |  
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                          Louis Boulanger  (1806-1867). L'Empoisonnement de la  marquise de Ganges; La Marquise de Ganges, vers 1838. Aquarelle sur papier.  Villers-Cotterêts, musée Alexandre Dumas.
                         |  | Louis Boulanger (1806-1867). Exili apparaissant au chevalier de  Sainte-Croix dans un cachot de la Bastille; La Marquise de Brinvilliers,  vers 1838. Aquarelle sur papier. Villers-Cotterêts, musée Alexandre-Dumas. |  
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                        | Scénographie  |  
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                          Série  d’aquarelles inspirées de Notre-Dame de Paris de Victor Hugo. Salon de 1833.
 Le désir  romantique de démocratiser les arts passe par le recours à des techniques moins  coûteuses et appropriées aux petits formats : lithographie, lavis ou aquarelle.  Cette dernière, très influencée par l'art britannique, est l'expression même du  romantisme et exacerbe la spontanéité du pinceau et la fraîcheur des couleurs,  rehaussées de gouache et de gomme arabique. Cette série n'a pas vocation à être  gravée en illustrations. C'est une approche de l'œuvre en une succession  d'images construisant un ensemble narratif. Notre-Dame de Paris, publiée deux  ans avant que Louis Boulanger expose au Salon ces aquarelles, connaît un succès  tonitruant. Le but est moins de promouvoir le roman que de permettre aux  lecteurs de pleinement percevoir l'esthétique du livre.
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                        | Texte du panneau didactique |  | Louis Boulanger (1806-1867).  Claude  Frollo et la Esmeralda. Illustration de « Notre-Dame  de Paris », vers 1831. Aquarelle sur papier. Paris, maison de Victor Hugo.  © Maisons de Victor Hugo Paris-Guernesey Paris Musées. |  
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                        | Louis Boulanger (1806-1867). La Esmeralda enlevée par Quasimodo et Claude Frollo appelle Phœbus au  secours,  1831. Aquarelle sur papier. Paris, maison de Victor Hugo. © Maisons  de Victor Hugo Paris-Guernesey Paris Musées. |  | Louis Boulanger (1806-1867). La Esmeralda chez Madame de Gondelaurier, 1831. Aquarelle sur papier.  Paris, maison de Victor Hugo. © Maisons de Victor Hugo Paris-Guernesey Paris  Musées. |  
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                        | Louis Boulanger (1806-1867). La Esmeralda choisit Gringoire pour époux, 1831. Aquarelle sur papier.  Paris, maison de Victor Hugo. © Maisons de Victor Hugo Paris-Guernesey Paris  Musées. |  | Louis Boulanger (1806-1867). La Esmeralda défendue par la Sachette, 1831. Aquarelle sur papier. Paris, maison de Victor Hugo. © Maisons de Victor Hugo Paris-Guernesey Paris  Musées. |   
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                        | Louis Boulanger (1806-1867). La Sachette, la Esmeralda et Claude Frollo, 1831. Aquarelle sur papier.  Paris, maison de Victor Hugo. © Maisons de Victor Hugo Paris-Guernesey Paris  Musées. |  | Louis Boulanger (1806-1867). La Procession du pape des fous [illustration pour Notre-Dame de Paris],  vers 1836.  Aquarelle et lavis de sépia  sur papier. Paris, maison de Victor Hugo. |   
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 5 - La réforme du théâtre
 
 
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                        | Scénographie 
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                          Convaincu du rôle de  l’artiste de faire revivre la trame de l’histoire, Boulanger accorde une grande  importance à l’exactitude des vêtements et des accessoires, copiés sur  des documents du temps, sur lesquels repose  la sacro-sainte couleur locale chère aux romantiques. Ce souci en fait un allié  précieux du baron Taylor, nommé en 1825 commissaire royal près le  Théâtre-Français, avec le souhait de réformer le costume, jusqu’alors confié  aux comédiens, pour donner à la scène une plus grande véracité historique. En  1827, la Comédie-Française publie même les dessins de Boulanger pour  l’adaptation de Quentin Durward de Walter  Scott, première collaboration, qu’il prolonge à partir de 1830 avec le théâtre  d’Hugo puis de Dumas, dans une démesure de moyens qui rend parfois difficile  les représentations. Hernani, en 1830  sera une étape cruciale dans l’histoire du drame, mais un gouffre financier,  comme Caligula de Dumas  en 1837, qui marque la naissance du trio que Dumas et Boulanger forment avec  Eugène Giraud, amis désormais inséparables.Le costume connaît un  engouement sans précédent et justifie le succès ou l’échec d’une pièce. Pour  Boulanger, il fait partie intégrante du drame romantique, et ses maquettes  transforment les comédiens en véritable personnages sortis de ses tableaux.
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                        | Texte du panneau didactique. |  | Louis Boulanger (1806-1867). Charles VII chez ses grands vassaux [Alexandre Dumas]. Paris, collections de la  Comédie-Française. © Comédie  Française. |  
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                        | Scénographie  |  
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                          Dumas  revient en 1837 à la Comédie-Française avec le premier drame romantique à sujet  antique, qu'il conçoit dans une mise en scène à grand spectacle. Les cent  costumes romains sont confiés à Boulanger et à Eugène Giraud, qui semble  intégrer le trio à cette date, pour ne plus le quitter. Les amis voyageront  notamment ensemble en Espagne en 1846. Sans doute cette recherche pour habiller  Caligula attise-t-elle l'intérêt de Boulanger pour le registre antique, qu’il  développera à partir de cette date avec La Mort de Messaline en 1843 où La  Douleur d'Hécube commandée en 1849. Giraud, qui collabore pour la première fois  avec la Comédie-Française, en devient alors le dessinateur régulier, poste  qu'il occupera jusqu'au début des années 1860.
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                        | Texte du panneau didactique |  | Louis Boulanger (1806-1867). La Litière de Richelieu [Marion de Lorme], vers 1836. Aquarelle  sur papier. Paris, maison de Victor Hugo. |  
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                          Louis Boulanger (1806-1867). Projet de costume  pour Ruy Blas au théâtre de la  Renaissance, 1838. Aquarelle et graphite sur papier. Paris, maison de Victor  Hugo. De haut en bas et de gauche à droite :
 - Ruy Blas, 2e acte
 - Ruy Blas, 3e acte
 - La Reine, 1er acte
 - Ruy Blas, 5e acte
 - Don Guritan, 2e acte
 - Don Guritan, 4e acte
 - Ruy Blas, 1er acte
 - Don César de Bazan
 
 
En 1838, Hugo et Dumas  ouvrent le théâtre de la Renaissance, destiné à présenter leur répertoire. Ruy Blas, qui lance la programmation,  reçoit un accueil mitigé, y compris de ses soutiens habituels. Les costumes du  XVIIe siècle de Boulanger sont pourtant parmi les plus admirables qu'il ait réalisés  pour donner la pleine mesure des personnages d’Hugo.
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                        | Louis Boulanger (1806-1867). Guanhumara [projet de costume pour Les Burgraves au Théâtre-Français],  1842-1843. Lavis d'encre sur papier bleu. Paris, collections de la  Comédie-Française. 
 
 
Avec Les Burgraves,  Hugo se confronte en 1843 à un XIIe siècle peu représenté au théâtre, rendant  plus indispensable que jamais l'intervention de Boulanger, dont les costumes  donnent cohérence visuelle et couleur locale à la pièce. La critique a vu dans  ce texte la chute du drame romantique. Les trente-trois représentations sont  pourtant couronnées de succès et ramènent à une esthétique aux sources du romantisme. |  | Eugène  Giraud (1806-1881). Heure de la nuit  (Mlle Abit) [projet de costume pour Caligula au Théâtre-Français], 1837. Aquarelle et graphite sur  papier. Paris, collections de la Comédie-Française. |  
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                        | Louis Boulanger (1806-1867). Le Page laquez [projet de costume  pour Mlle Despréaux dans Hernani de  Victor Hugo au Théâtre-Français], vers 1829-1830. Aquarelle et graphite sur  papier. Paris, maison de Victor Hugo. 
 
 
Au théâtre, Boulanger travaille avec les  artistes de l'ombre enrôlés par le baron Taylor et son bras droit Duponchel -  deux fidèles du salon de Charles Nodier. C'est naturellement lui qui est chargé  de donner un modèle à Mlle Despréaux pour son costume dans Hernani de Victor  Hugo, créée le 25 février 1830. Les premiers rôles doivent encore fournir leur  costume, et l'enjeu est de les contraindre à suivre une esthétique commune  plutôt que de reprendre un vêtement de leur garde-robe. Boulanger pense le  costume dans une approche picturale, composant l'ensemble de la pièce comme un  tableau mis en mouvement. |  | Louis Boulanger (1806-1867). Cherea (Firmin) [projet de costume  pour Caligula au Théâtre-Français],  1837. Aquarelle et graphite sur papier. Paris, collections de la  Comédie-Française. |  
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                        | Louis Boulanger (1806-1867). L'Affront [Lucrèce Borgia], 1833-1834. Aquarelle sur papier. Paris, maison de  Victor Hugo. © Maisons de Victor Hugo Paris-Guernesey Paris Musées.
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 6 - Le grand décor
 
 
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                        | Scénographie 
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                          Boulanger  fait preuve dès ses débuts d’une appétence pour les très grands formats, qui  dénotent à la fois son ambition de peintre d’histoire et son goût pour la  monumentalité. Si pour des raisons d’espace cette exposition ne peut montrer que  partiellement cet aspect, celui-ci imprègne sa carrière, dans un équilibre  permanent entre formats liés au grand genre autant qu’au grand décor. Cette  approche n’est pas sans lien avec l’exemple de Rubens et de Véronèse, étudiés  avec passion au Louvre. Comme eux, Boulanger pose ce double enjeu de l’histoire  et du décor dans Le Triomphe de Pétrarque, réalisé en 1836 pour l’hôtel particulier de Custine, avant de  continuer à Versailles avec la Procession  des députés des États-Généraux à Versailles, 4 mai 1789, puis pour la  Chambre des Pairs (Sénat).Une  dimension décorative naît plus clairement à partir de 1846 avec la salle à  manger de l’hôtel Mahler (52, rue du Faubourg Saint-Honoré), pour laquelle  Boulanger peint une Danse des Muses et un Festin à la mode vénitienne, inspiré de Véronèse, qu’il accompagne de deux trumeaux et quatre  dessus-de-porte sur les quatre saisons. Ce motif des saisons revient jusqu’à sa  mort dans des décors aujourd’hui disparus. En 1859, la grande allégorie de La Paix entre l'abondance et le travail est acquise par  l’État pour servir de plafond au nouveau musée Massey à Tarbes, mais elle est depuis  restée en réserve, éclipsant ainsi la recherche de Boulanger dans le grand  décor.
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                        | Texte du panneau didactique. |  | Louis Boulanger (1806-1867). Ophélie, vers 1850-1860. Huile sur  toile. Paris, collection particulière, courtesy galerie La Nouvelle Athènes.
 
 
Le  format de ce tableau évoque les panneaux de décor que Boulanger réalise dans  les vingt dernières années de sa carrière, sans que l'on sache s'il a dépassé  l’état de projet. L'artiste revient ici à l’un des sujets phares de ses débuts,  pris dans Hamlet de Shakespeare,  qu'il aborde dans une composition tournoyante rappelant celle de la Ronde du Sabbat, qu'il transpose en 1861  à l'huile sur toile, la recherche de couleurs argentées commune à ces deux  œuvres laisse penser que cette petite esquisse lui est sans doute contemporaine. |  
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                        | Louis Boulanger (1806-1867). Festin à la mode vénitienne, 1846-1851. Huile sur toile.  Paris, musée Carnavalet - Histoire de Paris.
 
 
 Ces panneaux appartiennent au  grand décor commandé en 1846 pour la salle à manger de l'hôtel Mahler, 52, rue  du Faubourg Saint-Honoré. Le descendant du commanditaire a fait don, en 1913,  au musée Carnavalet, d'une partie de l'ensemble, à savoir le Festin à la mode  vénitienne et La Danse des muses, auxquels s'ajoutaient des dessus-de-porte et  deux trumeaux vendus séparément. Fidèle à ses convictions esthétiques,  Boulanger emprunte à Véronèse les modèles de son décor, avec une couleur locale  qui trahit les heures passées au Louvre à copier son maître.  |  
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                        | Louis Boulanger (1806-1867). Marie Madeleine, vers 1840. Encre sur  papier. Paris, collection particulière.
 
 
 Louis Boulanger a fait de la plume sa  technique graphique de prédilection. Ce choix atypique (les artistes utilisent  plutôt le crayon graphite) évoque très directement le dessin du XVIIe, qui  reste le modèle affirmé de Boulanger. Il a réalisé des centaines de feuilles à  sujets littéraires ou, comme ici, de figures de la Passion abordées dans une  veine baroque. |  | Louis Boulanger (1806-1867).  Marie Dumas, vers 1855-1856. Pierre noire, craie blanche et sanguine sur  papier. Paris, maison de Victor Hugo. 
 
 
En 1831, Dumas est père pour la deuxième  fois. Marie, qu'il a avec la comédienne Belle Krelsamer, lui donne le goût de  la paternité, et il reconnaît son fils, Alexandre, né sept ans plus tôt d'une  relation avec sa voisine de palier. En 1856, Victor Hugo, en exil, ne peut  assurer son rôle de témoin pour le mariage de la jeune femme et demande à  Boulanger de le remplacer, avec d'autant plus de légitimité que son amitié avec  Dumas n'a jamais faibli. C'est sans doute à cette occasion qu'il dessine ce  portrait. |  
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                        | Scénographie  |   
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                        | Louis Boulanger (1806-1867). Les Anges et les instruments de la Passion,  vers 1850. Huile sur toile. Paris collection particulière. 
 
 
Les commandes  religieuses qu'il reçoit à partir de 1845 confrontent Boulanger à une  iconographie qu'il avait jusqu'alors laissée de côté. Parallèlement eux grands  formats, de petites compositions comme celle-ci tissent un lien entre la  mélancolie de l'artiste et la Passion du Christ. |  | Louis Boulanger (1806-1867). Paysage, vers 1846. Aquarelle sur  papier brun. Paris, maison de Victor Hugo. |   
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 7 - Conserver, se souvenir et transmettre, le legs romantique
 
 
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                        | Scénographie 
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                          Les  derniers feux du romantisme dans le cœur du public affectent Boulanger, qui  n’en dépose pas pour autant les pinceaux. À côté des portraits mondains, genre  triomphant du Second Empire, il bénéficie de commandes publiques et d’achats de  l’État en faveur des églises, qui lui valent des revenus réguliers et la  possibilité de continuer de travailler dans le grand format. Sa  peinture se teinte également de lumière à la suite du voyage à Madrid qu’il  réalise en 1846, pour le mariage du duc de Montpensier, avec les Dumas père et  fils, Auguste Maquet, Amédée Achard, Eugène Giraud et Adolphe Desbarolles. Les  amis prolongent leur périple vers l’Andalousie puis l’Afrique du Nord, d’où  Boulanger rapporte des croquis qui alimentent jusqu’à sa mort ses tableaux  lumineux. Les sujets littéraires restent toutefois plus que jamais son centre  d’intérêt. Ses soutiens lui obtiennent en 1849 la commande de La Douleur d’Hécube, en 1855  l’achat de Saint Jérôme et les Romains fugitifs d’après Chateaubriand et surtout, en 1860, la nomination à la  direction de l’École et du musée des Beaux-Arts de Dijon. Marié en 1856, après  la mort de sa sœur Annette, père en 1860 d’un Louis-René qui deviendra à son  tour peintre, Boulanger défend depuis Dijon ses idéaux de jeunesse. Velléda de Chateaubriand, La Ronde du sabbat et les brigands de Notre-Dame de Paris d’Hugo, Virgile, en écho à Dante, viennent rappeler le  temps des convictions. Il meurt le 5 mars 1867 à Dijon, salué dans la presse  qui pleure le plus vaillant soldat du romantisme.
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                        | Texte du panneau didactique. |  | Louis Boulanger (1806-1867). La Douleur d’Hécube, 1850. Huile sur  toile. Draguignan, musée des Beaux-Arts. 
 
 
Régulièrement soutenu par l'État,  Boulanger reçoit la commande, en 1849, d'une Douleur d'Hécube qu'il termine pour le Salon de 1850 (qui ouvre le  30 décembre). Ce sujet antique pourrait sembler étonnant pour un peintre  habitué au Moyen Âge ou au XVIIe siècle, mais il le puise dans l'Enfer de Dante, l'une de ses sources  favorites, en pendant d'un autre épisode, La  Prison d'Ugolin et de ses fils. Comme dans La Folie du Roi Lear, la composition se concentre sur le sentiment  dramatique qui émane de la reine de Troie « qui se met à aboyer comme un chien  tant la douleur avait bouleversé son esprit » en découvrant le corps noyé de  son fils Polydore, dernier de ses dix-neuf enfants, encore en vie après la  guerre de Troie. |  
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                        | Louis Boulanger (1806-1867). Rencontre de Gil Blas et de Melchior  Zapata, 1859. Huile sur toile. Paris, galerie La Nouvelle Athènes.
 
 
 En 1857  et 1859, la critique du Salon reçoit avec enthousiasme le retour de Boulanger  aux petits sujets littéraires. Parmi les épisodes pris notamment chez  Shakespeare, Walter Scott et Cervantès, cette scène de l'Histoire de Gil Blas de Santillane, roman picaresque de Lesage  publié en 1715, renoue avec les sujets de jeunesse du peintre. Il n'est pas  rare que Boulanger envoie au Salon des tableaux anciens, cherchant plus à  réunir des séries thématiques qu'à faire la démonstration de ses dernières  productions. Il semble toutefois que celui-ci ait été peint peu de temps avant,  avec un goût renouvelé pour les thèmes qu'il apprécie déjà dans le théâtre de  Molière ou de Beaumarchais. |  | Louis Boulanger (1806-1867).  Jeunes musiciens aragonais, vers 1846. Huile sur toile. Paris, collection  particulière, courtesy galerie La Nouvelle Athènes. |  
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                        | Eugène  Giraud (1806-1881). Souvenir du voyage de  Paris à Cadix en 1846, vers 1847. Huile sur toile. Paris, musée Carnavalet  - Histoire de Paris. 
 
 
Ce tableau peint au retour du voyage de Madrid jusqu'en  Afrique du Nord réunit le groupe d'amis avec, de gauche à droite : Giraud, de  profil au-dessus du guide, Boulanger dessinant, Desbarolles, Dumas père, Maquet  et Dumas fils. |  | Louis Boulanger (1806-1867). Danseuse espagnole, après 1846. Encre  sur papier. Dijon, musée des Beaux-Arts. 
 
 
Fasciné de longue date par l'Espagne,  Boulanger rapporte de son voyage un répertoire d'images prêtes à alimenter  vingt ans de compositions. Après les fantômes et les conversations en costume  du XVIIe siècle, les danseuses reviennent régulièrement sous sa plume. |  
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                        | Scénographie  |  
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                        | Louis Boulanger (1806-1867). Adélaïde Boulanger, née  Lemonnier-Delafosse, 1858. Huile sur toile. Paris, Musée du Louvre,  département des peintures. 
 
 
Toute sa vie, Louis vécut avec sa sœur aînée,  Annette. Artiste comme lui, restée célibataire, obligeant sans doute Boulanger  à une vie d'abnégation pour celle qui a tenu leur maison. La mort d’Annette, en  1853, marque un tournant pour Boulanger qui n’a jamais eu la vie sulfureuse de  ses compagnons romantiques. En 1856, il épouse Adélaïde Lemonnier-Delafosse, de  vingt-trois ans sa cadette. Leur amour dure onze ans, jusqu’à la mort du  peintre. Adélaïde se remarie avec M. Vallée dont elle portera le veuvage. Ce  portrait de la fin de la vie de l'artiste conserve la manière de ses tableaux  des années 1830, avec un goût inchangé pour les contrastes ténébreux. |  | Louis Boulanger (1806-1867). Le Martyre de saint Laurent, 1856.  Huile sur toile. Paris, Conservation  des œuvres d'art religieuses et civiles, église Saint-Laurent.
 
 
 Louis Boulanger  bénéficie au début du Second Empire de deux commandes de la préfecture de la  Seine pour des églises de Paris : Les  Âmes dans le purgatoire et Les Âmes  délivrées, en 1855, pour l'église Saint-Roch, puis l’année suivante ce  tableau pour l'église Saint-Laurent (10e arrondissement). Loin des modèles  contemporains de la peinture religieuse, incarnés par les élèves d'Ingres, il  emprunte à la peinture napolitaine du XVIIe siècle (Ribera, Giordano) sa  composition, son coloris et la puissance de ses figures. Ce choix continue de  défendre un panthéon romantique qui cherche à régénérer la peinture en puisant  ses formes chez les grands maîtres flamands et italiens, comme Hugo le  demandait en 1827 dans la Préface de  Cromwell. |   
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                        | Louis Boulanger (1806-1867). Ne crains rien, tu portes César et sa  fortune [ou La Barque de César],  1865. Huile sur toile. Vic-sur-Seille, Musée départemental Georges-de-La-Tour.
 
 
 Au  salon de 1865, Boulanger crée la surprise en continuant de renouveler son  répertoire à la lueur de la littérature antique. Le sujet de sa Barque de César est pris chez Plutarque,  auteur qu'il a croisé, comme Virgile, dans l'Enfer de Dante, l'une de ses sources de prédilection. Le tableau  est aujourd’hui perdu, mais la composition est connue grâce à cette esquisse. |  | Louis Boulanger (1806-1867). Les Laboureurs de Virgile, 1863.  Huile sur toile. Paris, collection Olivier d'Ythurbide et Benoît Fauquenot. 
 
 
Les  années passées à Dijon, à transmettre ce qui fut son idéal, conduisent  Boulanger à repenser les grands sujets de sa carrière. À la suite de La Ronde du Sabbat, il se tourne à  nouveau vers des figures littéraires de l'antiquité, la Velléda de  Chateaubriand ou Les Bergers de Virgile,  déjà abordés dans une autre composition au Salon de 1845. L'influence de la  peinture du XVIIe siècle n'est pas étrangère au traitement du sujet, alors  qu'il dirige l'école et le musée des Beaux-Arts. |  |