Parcours en images de l'exposition

JAMES McNEILL WHISTLER (1834-1903)
Chefs-d’œuvre de la Frick Collection, New York.

avec des visuels mis à la disposition de la presse
et nos propres prises de vue

Parcours accompagnant l'article publié dans la Lettre n°543 du 16 mars 2022



 

The Frick Collection, New York, Fifth Avenue. Jardin et facade
Photo: Michael Bodycomb.
 
The Frick Collection, New York. Jardin Intérieur. Photo: Michael Bodycomb.
 
The Frick Collection, New York. Salle Fragonard. Photo: Michael Bodycomb.
The Frick Collection, New York. Salle Ovale. Photo: Michael Bodycomb.

 
The Frick Collection, New York. Le grand escalier. Photo: Michael Bodycomb.
 
Entrée de l'exposition

James McNeill Whistler (1834-1903)
Chefs-d’œuvre de la Frick Collection, New York

Henry Clay Frick (1849-1919) est de ces « self-made-man» américains de la fin du XIXe siècle, qui ont fait fortune dans l’industrie et ont rassemblé de formidables collections d’œuvres d’art. Constituée pour l’essentiel entre les années 1890 et 1919, la collection de Frick comprend des peintures, des sculptures, des œuvres sur papier et des objets d’art européens du début de la Renaissance à la fin du XIXe siècle. Selon ses dernières volontés, elle a ouvert au public en 1935 dans la maison des Frick à New York.

À la faveur de la fermeture pour travaux du site historique de la Frick Collection, un ensemble d’œuvres du peintre américain James Mc Neill Whistler (1834-1903) fait le

 

voyage jusqu’au musée d’Orsay. Henry Clay Frick, surtout connu comme amateur d’art ancien, avait aussi réuni plus d’œuvres de son contemporain Whistler que de tout autre artiste. Sans doute avait-il la conviction que ce peintre, célèbre pour sa modernité radicale, était aussi le dernier maillon d’une tradition, celle de Velázquez, Rembrandt ou Gainsborough, dont il possédait aussi des chefs-d’œuvre.

La venue de ces œuvres au musée d’Orsay est un événement exceptionnel. Certaines n’ont pas été vues à Paris depuis la rétrospective posthume de Whistler à l’École des beaux-arts en 1905, et d’autres n’ont même jamais été exposées en France. Elles viennent ici dialoguer avec Arrangement en gris et noir n°1 : portrait de la mère de l’artiste, icône de l’art américain et des collections nationales.
Texte du panneau didactique ci-dessus




Scénographie
James McNeill Whistler (1834-1903)

Né dans le Massachussetts, James Abbott Whistler, qui ajoutera le patronyme « McNeill » de sa mère à celui de son père, grandit entre les États-Unis, la Russie et l’Angleterre.
Il se rend à Paris en 1855, où il se forme dans l’atelier de Gleyre, copie au Louvre, et se lie avec Courbet, Fantin-Latour et Legros. Installé à Londres à partir des années 1860, il est un trait d’union entre l’avant-garde britannique (préraphaélisme et aesthetic movement) et le réalisme français. À mi-chemin entre les deux courants, son tableau, La dame blanche (Washington, National Gallery of Art) fait scandale à Paris au Salon des refusés (1863).

Dans les années 1870, avec ses paysages de la Tamise et de grands portraits aux titres musicaux (« Symphonie », «Nocturne», « Harmonie»), Whistler développe une manière très originale basée sur la recherches d’harmonies formelles. Sa peinture proclame l’indépendance de l’art vis-à-vis « des émotions qui lui sont totalement étrangères, telles que dévotion, pitié, amour, patriotisme ». Regardant aussi bien du côté des estampes japonaises que de Velázquez, Whistler simplifie ses compositions et applique ses couleurs en touches très fluides et en délicats glacis.

Ces audaces lui valent longtemps des critiques acerbes, mais il gagne patiemment des soutiens à Londres et à Paris et accède à une renommée mondiale autour de 1900. Revenu quelques années à Paris à la fin de sa vie, le dandy Whistler devient l’un des « phares » de la jeune génération symboliste qui voit dans son art une forme de rejet du monde moderne. Whistler meurt à Londres en 1903.
 
Texte du panneau didactique.
 
James Abbott McNeill Whistler. Symphonie en couleur chair et rose : portrait de Mrs. Frances Leyland [Symphony in Flesh Colour and Pink: Portrait of Mrs. Frances Leyland], 1871-1874. Huile sur toile. New York, The Frick Collection. © The Frick Collection; photo: Joseph Coscia Jr..

Ce portrait est celui de l’épouse du riche armateur et amateur d’art de Liverpool Frederick Leyland, l’un des principaux mécènes de Whistler. Dans sa quête de perfection formelle, le peintre a choisi chaque élément du tableau : la décoration de la pièce (le salon de Whistler à Londres), la pose originale, de dos, avec le visage de profil, qui met en valeur la robe qu’il a lui-même dessinée. À l’opposé des silhouettes corsetées de la mode victorienne, l’artiste choisit une robe d’intérieur (tea gown) fluide et ample, en mousseline blanche et rose, parsemée de fleurs. À partir de la chevelure auburn et du ton de chair de la jeune femme, l’artiste compose une « Symphonie en couleur chair et rose » rehaussée par des tons de blancs, de gris et quelques touches de vert.

 
James Abbott McNeill Whistler. Arrangement en brun et noir: portrait de Miss Rosa Corder [Arrangement in Brown and Black: Portrait of Miss Rosa Corder], 1876-1878. Huile sur toile. New York, The Frick Collection. © The Frick Collection; photo: Joseph Coscia Jr.

Avec ce portrait de la peintre anglaise Rosa Corder, Whistler prolonge ses recherches sur les « Arrangements en noir » débutés avec le portrait de sa mère. La palette est réduite aux bruns, aux noirs avec quelques touches de rose et de blanc. Le modèle est vêtu d’un ensemble de jour à la mode proche d’une tenue d’amazone, dont la sobriété et la monochromie plaisent à Whistler. Perfectionniste, l’artiste épuise par quarante séances de pose la jeune femme qui, après plusieurs malaises, ne revient à l’atelier que sur ses supplications. La critique est enthousiaste lors de l’exposition du tableau à Londres en 1879 ; elle y voit un «grand morceau d’exécution digne de Velázquez».

 
James Abbott McNeill Whistler. Arrangement en noir et or: comte Robert de Montesquiou-Fezensac [Arrangement in Black and Gold: Comte Robert de Montesquiou-Fezensac], 1891-1892. Huile sur toile. New York, The Frick Collection. © The Frick Collection; photo: Joseph Coscia Jr.

Ce portrait, l’un des derniers grands portraits réalisés par Whistler, représente Robert de Montesquiou-Fezensac, membre d’une grande famille aristocratique française, et flamboyant dandy homosexuel du Paris fin-de-siècle. Poète et esthète « décadent », il inspire à Huysmans le personnage de Des Esseintes et à Proust celui du baron de Charlus. Fasciné par Whistler, Montesquiou lui commande un portrait qu’il veut unique et atemporel. Whistler le peint en habit de soirée, portant au bras un manteau en chinchilla appartenant à sa nièce la comtesse Greffulhe, fixant le spectateur. L’« or » mentionné dans le titre du tableau serait celui du cadre, qui contribue à l’harmonie générale de l’œuvre. Par sa  luminosité, il tient à distance le modèle qui reste enveloppé d’une aura de mystère et dont seul le visage, la cravate blanche et le gant gris émergent véritablement de l’ombre.




Scénographie
 
Lors de la guerre de 1866 entre le Chili et l’Espagne, Whistler fait un incroyable voyage, participant à une expédition à Valparaiso planifiée par d’anciens soldats américains confédérés (dont son propre frère), pour vendre des torpilles aux chiliens. Le projet avorte, mais l’artiste reste à Valparaiso d’où il ramène une série de marines qui ne laissent rien deviner du bombardement de la ville par les espagnols, dont il a été témoin. Whistler réduit la composition en grandes zones colorées simplement animées par une jetée, quelques vagues et la discrète silhouette de navires tournés vers l’horizon.  L’espace est aplani comme dans les estampes japonaises, une influence visible également dans la branche de bambou ajoutée au premier plan, et dans le décor du cadre conçu par Whistler lui-même, sur lequel figure son monogramme au papillon et un motif de seigaiha (« vagues de mer bleues »).
James Abbott McNeill Whistler. Symphonie en gris et vert : l'Océan [Symphony in Grey and Green : The Ocean], 1866. Huile sur toile, 80,6 cm × 101,9 cm. New York, The Frick Collection. © The Frick Collection; photo: Joseph Coscia Jr.
 
Texte du cartel.
 
James Abbott McNeill Whistler. Nocturne. Eau-forte et pointe sèche sur papier vélin, 1880. Inclus dans Venice, A Series of Twelve Etchings (First Venice Set). New York, The Frick Collection. © The Frick Collection; photo: Joseph Coscia Jr.

Dans le domaine de la gravure, Whistler se montre particulièrement novateur dans son emploi d’encres de surface. Laissant sur certaines zones, voire sur la totalité de la plaque, une fine couche d’encre, il fait apparaître des zones ombrées, des reflets, des effets de crépuscule ou de nuit, comme dans Nocturne, eau-forte dont on connaît des variantes, parfois très obscurément encrées. Qualifiée d’impure ou de trop picturale par certains graveurs ou critiques du temps, cette technique héritée de Rembrandt est également prisée par Edgar Degas.

 
James Abbott McNeill Whistler. La Petite Venise [Little Venice]. Eau-forte et pointe sèche sur papier Vélin, 1880. Inclus dans Venice, A Series of Twelve Etchings (First Venice Set). New York, The Frick Collection.
 
James Abbott McNeill Whistler. La Petite Lagune [Little Lagoon]. Eau-forte et pointe sèche sur papier. Inclus dans Venice, A Series of Twelve Etchings (First Venice Set). New York, The Frick Collection.

Pour ses eaux-fortes et ses pastels, Whistler varie ses sujets et ses compositions. Les vues les plus éloignées de la ville sont sans doute parmi les premières. L’extrême dépouillement visible dans La Petite Venise et La Petite Lagune fait davantage écho à ses dernières vues de la Tamise qu’à la tradition des vedutte vénitiennes. Les silhouettes de bateaux ou d’architectures, réduites à de minuscules griffures de la plaque, flottent dans un espace vide et calme. Whistler se détourne des sites touristiques, hormis pour quelques vues comme La Piazzetta ou La Riva. Certaines estampes de la Suite vénitienne s’attachent aux figures de mendiants, de gondoliers ou d’enfileurs de perles.

 
James Abbott McNeill Whistler. Le Mât [The Mast]. Eau-forte et pointe sèche sur papier vélin, 1880. Inclus dans Venice, A Series of Twelve Etchings (First Venice Set). New York, The Frick Collection.

À la fin des années 1870, Whistler est ruiné par un procès retentissant engagé contre le critique Ruskin, qui l’avait qualifié d’escroc. Il perd aussi le soutien de son mécène Leyland, avec qui il s’est querellé. La commande par la Fine Art Society d’une série d’eaux-fortes de Venise vient à point nommé et lui permet de séjourner dans la cité des doges de septembre 1879 à novembre 1880. Il en revient chargé de quelques peintures, d’une centaine de pastels et de près de cinquante estampes. Une première « Suite vénitienne » de douze gravures est éditée à une centaine d’exemplaires à partir de 1880, puis vient une seconde série en 1886. Pour ces tirages, Whistler s’adjoint l’aide de jeunes artistes, l’Australien Mortimer Menpes et l’anglais Walter Sickert.

 
James Abbott McNeill Whistler. Le Petit Mât [The Little Mast]. Eau-forte et pointe sèche sur papier vélin, 1880. Inclus dans Venice, A Series of Twelve Etchings (First Venice Set). New York, The Frick Collection.
 
James Abbott McNeill Whistler. La Piazzetta [The Piazzetta]. Eau-forte et pointe sèche sur papier vélin. Inclus dans Venice, A Series of Twelve Etchings (First Venice Set). New York, The Frick Collection.




Scénographie
Scénographie
 
Whistler utilise des papiers teintés brun-roux comme base tonale de ses pastels. Avec une grande économie de moyens, il indique les contours des éléments d’architecture à la craie noire, puis ajoute quelques touches de tons plus vifs. À propos des couleurs de Venise, Whistler écrit à sa mère : « Après la pluie, les couleurs des murs et leurs reflets dans les canaux sont plus somptueux que jamais – et quand le soleil brille sur le marbre poli, mêlé aux briques aux riches tonalités et au plâtre, cette stupéfiante ville de palais se transforme en un royaume féerique dont on dirait qu’il a été créé tout spécialement pour le peintre. »

 

 

 

À Venise, Whistler travaille sur le motif malgré le froid de l’hiver, sa boîte de pastels ou sa plaque de cuivre et son stylet de graveur en poche. À la recherche de visions nouvelles de la ville, il s’aventure sur les petits canaux où se trouvent des façades décaties et des cours secrètes, loin des clichés touristiques. Il multiplie les points de vue en dessinant depuis une gondole, tel Le Cimetière, réalisé lors d’un déplacement vers l’île de San Michele, ou d’une fenêtre, dans Nocturne : Venise, une vue croquée depuis l’appartement qu’il occupe à la Casa Jankovitz, au bout de la Riva degli Schiavoni

James Abbott McNeill Whistler.  Canal vénitien [Venetian Canal], 1880. Craie noire et pastel sur papier teinté brun. New York, The Frick Collection. © The Frick Collection; photo: Joseph Coscia Jr.
 
Texte des cartels.
 
James Abbott McNeill Whistler.  Nocturne : Venise [Nocturne: Venice],  1880. Pastel sur papier teinté brun, 20,3 × 30,2 cm.  New York, The Frick Collection.  © The Frick Collection; photo: Joseph Coscia Jr.
 
James Abbott McNeill Whistler.  Le Cimetière : Venise [The Cemetery: Venice],  1879.  Pastel et traces de dessin au crayon graphite sur papier teinté brun.  New York, The Frick Collection.  © The Frick Collection; photo: Joseph Coscia Jr.
 
Scénographie.
 
James Abbott McNeill Whistler.  Les Mendiants [The Beggars]. Eau-forte et pointe sèche sur papier vélin.  Inclus dans Venice, A Series of Twelve Etchings (First Venice Set).  New York, The Frick Collection.  © The Frick Collection; photo: Joseph Coscia Jr.
 
James Abbott McNeill Whistler. La Traghetto, no 2 [The Traghetto, No. 2]. Eau-forte et pointe sèche sur papier vélin. Inclus dans Venice, A Series of Twelve Etchings (First Venice Set). New York, The Frick Collection.
 
James Abbott McNeill Whistler. La Riva, no 1 [The Riva, No. 1]. Eau-forte et pointe sèche sur papier vélin. Inclus dans Venice, A Series of Twelve Etchings (First Venice Set). New York, The Frick Collection.
 
À Venise, Whistler s’intéresse aux façades et porches de palais décatis et révèle la poésie de ces lieux rarement représentés. Dans Le Porche, il joue du contraste entre une façade richement ornée et l’intérieur obscur et simple où s’aperçoit l’atelier d’un fabricant de chaises. Le peintre a animé le premier plan d’une silhouette de jeune fille qui apporte une touche de lumière au centre de la composition. Cette gravure est caractéristique du style de Whistler qui varie les traits longs ou courts, précis ou tremblés, et les types de hachures, parallèles ou croisées, supprimant même parfois les contours des objets pour n’en garder que les ombres.
James Abbott McNeill Whistler. Le Porche [The Doorways]. Eau-forte et pointe sèche sur papier vélin. Inclus dans Venice, A Series of Twelve Etchings (First Venice Set). New York, The Frick Collection. © The Frick Collection; photo: Joseph Coscia Jr.
 
Texte du cartel.
 
James Abbott McNeill Whistler.  Les Palais [The Palaces].  Eau-forte et pointe sèche sur papier vélin.  Inclus dans Venice, A Series of Twelve Etchings (First Venice Set).  New York, The Frick Collection.  © The Frick Collection ; photo: Joseph Coscia Jr.
 
James Abbott McNeill Whistler. Deux porches [Two Doorways]. Eau-forte et pointe sèche sur papier vélin. Inclus dans Venice, A Series of Twelve Etchings (First Venice Set). New York, The Frick Collection. © The Frick Collection; photo: Joseph Coscia Jr.




Scénographie
Whistler dans les collections du Musée d’Orsay

Au XIXe siècle, l’art américain est largement ignoré des collectionneurs et des musées français. En 1891 quelques personnalités influentes proches de Whistler, dont le poète Mallarmé, œuvrent à ce que l’une de ses toiles entre au musée du Luxembourg à Paris («musée des artistes vivants»). Whistler est alors âgé d’une cinquantaine d’années, et, espérant voir un jour une de ses œuvres au Louvre, accepte de vendre pour une somme modeste l’Arrangement en gris et noir n°1, qu’il considère comme son chef d’œuvre. En 1909, L’homme à la pipe est légué au musée du Luxembourg, et en 1995 les musées nationaux font l’achat de Variations en violet et vert.

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Texte du panneau didactique.
 
James Abbott McNeill Whistler. Arrangement en gris et noir n°1 : portrait de la mère de l’artiste [Arrangement in Grey and Black, No.1: Portrait of the Painter’s Mother], 1871. Huile sur toile, 144,3 × 163 cm. Paris, musée d’Orsay, acquis de l’artiste par l’État pour le musée du Luxembourg en 1891. © Musée d’Orsay, Dist. RMN-Grand Palais / Patrice Schmidt.

Anna McNeill a 67 ans lorsqu’elle pose pour ce portrait. Veuve, elle s’est installée chez son fils à Londres. Elle s’occupe de la maison, se passionne pour son art et tente aussi de lui faire adopter une vie plus chrétienne. Dans une lettre à sa sœur, Anna McNeill dit avoir occupé ses séances de pose à prier. Whistler représente sa mère dans son atelier, simplement décoré d’un textile japonais et de quelques-unes de ses gravures. Il supprime tout détail narratif ou sentimental. Renouant avec l’austérité des portraits hollandais et espagnols du XVIIe siècle, et regardant aussi du côté de Fantin-Latour et de Manet, il réduit sa palette à une austère harmonie de tons noirs, gris et blancs tout juste rehaussée des tons de chairs. Réduit à quelques lignes, formes et couleurs, le tableau proclame la supériorité des éléments plastiques de l’œuvre sur le sujet. C’est dans cet esprit que Whistler expose pour la première fois le tableau sous le titre abstrait Arrangement en gris et noir en 1872.

 
James Abbott McNeill Whistler. Tête de vieux fumant une pipe dit aussi L’Homme à la pipe [Head of an Old Man Smoking], vers 1859. Huile sur toile. Paris, musée d’Orsay, accepté par l’État à titre de legs de Charles Drouet au musée du Luxembourg en 1909. © RMN-Grand Palais (Musée d’Orsay) / Hervé Lewandowski.

Arrivé à Paris en 1855, à vingt-et-un ans, Whistler apprend le dessin et la peinture dans l’atelier du peintre académique Charles Gleyre, mais il trouve ses véritables maîtres parmi les peintres flamands et hollandais du XVIIe siècle vus au Louvre, et auprès de Courbet et des « réalistes » français. On décèle ces influences dans cette « trogne » d’un colporteur rencontré aux Halles qui est aussi l’une des premières peintures connues de l’artiste qui pratiquait alors surtout la gravure. Whistler finit par prendre ses distances avec le réalisme et rejette même à partir de 1867 toute influence de Courbet sur son art.
 
James Abbott McNeill Whistler. Variations en violet et vert [Variations in Violet and Green], 1871. Huile sur toile. Paris, musée d’Orsay, acquis par les musées nationaux avec le concours du Fonds National du Patrimoine et la participation de Philippe Meyer en 1995. © Musée d’Orsay, Dist. RMN-Grand Palais / Patrice Schmidt.

Au début des années 1870 Whistler renoue le fil des paysages chiliens pour donner le jour à un exceptionnel ensemble de paysages de la Tamise. Certains d’entre eux, peint dans l’atelier d’après des esquisses réalisées lors de ses excursions nocturnes entre le pont de Westminster et celui de Battersea, mais surtout de mémoire, sont bientôt rebaptisées Nocturne : « En utilisant le mot "nocturne", je voulais uniquement exprimer un intérêt pictural, en laissant le tableau libre de tout propos anecdotique extérieur qu’on aurait pu lui attribuer par ailleurs. Un nocturne est tout d’abord un agencement de lignes, de formes et de couleurs. La peinture est un gigantesque problème que j’essaie de résoudre. » Très critiquées lors de leur première présentation à Londres en 1872 puis à Paris chez Durand-Ruel l’année suivante, ces peintures ne sont pas comprises et sont regardées comme des pochades. Dans Variations en violet et vert se mêlent une vue du fleuve au coucher du soleil et des éléments japonais (le format vertical de certaines estampes, la femme à l’ombrelle, les branchages en fleurs, etc.).