INDIENS DES PLAINES
Article
publié exclusivement sur le site Internet, avec la Lettre
n° 369
du
26 mai 2014
INDIENS DES PLAINES. Cheyenne, Sioux,
Comanche, Pawnee, autant de noms donnés par les européens à ces
peuples vivant dans les grandes plaines du centre des Etats-Unis
et du Canada actuels. La littérature et le cinéma, en ont donné
des images caricaturales, très éloignées de la réalité. La présente
exposition, à travers 140 objets provenant des deux côtés de l’Atlantique,
s’attache à présenter la richesse visuelle et la profondeur conceptuelle
de l’expression artistique amérindienne, une reconnaissance qui
n’est apparue qu’à partir des années 1930. Jusque-là les objets
amérindiens étaient considérés comme des curiosités exotiques et
présentés dans des musées ethnographiques.
La première section, en guise d’introduction, nous présente « Le
renouveau artistique dans la vie contemporaine, 1965-2013 ». Aujourd’hui
les indiens ont acquis les mêmes droits que les descendants d’immigrants
et ont même un musée en plein cœur de Washington. Les designers
et artistes indiens s’inscrivent dans les courants contemporains
tout en produisant des œuvres qui ont une forte dimension identitaire.
Des chaussures, des lunettes, des coiffes, des robes, des dessins
illustrent cela.
La deuxième section « Communautés et diaspora, 1910-1965 », décrit
l’époque où les indiens furent enfin reconnus et où leur population,
au nombre de 250 000 recommença à croître. Ils seraient quatre millions
d’individus aujourd’hui, vivant soit dans des réserves, soit en
milieu urbain, le second choix étant plus dicté par la politique
du pays et le chômage que par un choix délibéré. Un manteau et une
chemise d’homme, des manchettes de danseur, des patchworks, des
souliers de femme et des tableaux, comme cette Danse du soleil
cheyenne (1949) illustrent cette section.
Le parcours de l’exposition adopte ensuite un ordre chronologique.
Il commence par « Peuples anciens, Pré-contact » et l’année 1540,
où les conquistadors espagnols, menés par Francisco de Coronado,
explorent les territoires situés au nord du Rio Grande et s’installent
dans l’actuel Nouveau-Mexique. L’archéologie révèle qu’à l’arrivée
des Européens, les peuples des plaines font déjà partie de vastes
circuits commerciaux permettant l’échange de matériaux pour la réalisation
des objets. On a retrouvé de magnifiques sculptures parfois très
anciennes comme cette Pipe à effigie humaine (100 av. - 100
ap. J.-C.) du tumulus Adena (Ohio) ou cette autre pipe dite Le
Héros Corne Rouge ou Etoile du Matin (1100-1200) ou, plus proche
de nous, cette Effigie de bison (1400-1700).
La quatrième section est consacrée à « La vie dans les Grandes Plaines,
1700-1820 ». C’est là que l’on peut voir les plus beaux témoignages
de l’art de ces indiens avec ces robes en peau de bison tannée,
peintes de motifs et de dessins illustrant les évènements marquants
de l’année (épidémies, rencontres, échanges, conflits) « de la première
neige à la dernière neige », ces chemises d’homme, ces robes
de femme ou encore ces objets comme ce bol en bois à l’effigie
d’un castor, ces boucliers entièrement décorés de peintures,
ces coiffes en plumes et même une statuette en bois représentant
une Effigie humaine (18e siècle).
Les deux sections suivantes nous présentent l’art de ces indiens
durant les guerres. Ce sont tout d’abord, dans la section « L’épanouissement
d’une culture, 1820-1860 », les conflits tribaux pour acquérir des
chevaux ou pour l’honneur des jeunes guerriers. Certains conflits
sont aussi la résultante de l’arrivée des indiens des Plaines de
l’Est, vers celles du Nord et de l’Ouest sous la poussée des immigrants.
La situation devient catastrophique à partir de 1848 avec la découverte
de l’or de Californie qui attire un flux d’immigrants qui dégradent
l’environnement et chassent les bisons.
La sixième section, « La mort du bison, 1860-1880 » se situe à
l’époque la plus dramatique pour les indiens. La guerre de Sécession
(1860-1865) est terminée et l’implantation des colons à l’Ouest
s’intensifie. C’est l’escalade des conflits entre l’armée américaine
et les peuples des Plaines. Le bison a quasiment disparu. De 40
millions en 1800 il en reste moins de 1000 en 1895. Néanmoins la
production artistique continue avec même de nouveaux matériaux comme
le crayon, le papier ou des petits éléments de décoration (boutons,
perles, etc.). On voit dans cette section des robes en peau tannée
décorées, de très beaux vêtements, des parflèches, un
étuit d’arc et carquois en peau de loutre et hermine (entre
autres), un curieux pectoral confectionné avec des matériaux
modernes comme du maillechort et des têtes de clous en cuivre, etc.,
une magnifique poupée habillée comme une indienne adulte
et de nombreux dessins sur papier dont certains représentent des
scènes de combat avec des cavaliers.
Enfin, dans la septième section « Dans les vestiges des terres ancestrales,
1880-1910 », qui rejoint le début de l’exposition, nous voyons comment
l’art s’est transformé sous la contrainte de la vie dans des réserves,
de l’interdiction des fêtes religieuses comme la fameuse Danse
du Soleil, remplacée par la fête du 4 juillet, l’influence des
missions religieuses, etc. Néanmoins la spiritualité traditionnelle
continue d’être source d’inspiration pour des peintures représentant
des cérémonies du passé, tandis que la culture matérielle se transforme
avec l’indianisation d’accessoires comme une valise. Néanmoins
on trouve encore des porte-bébés, des boucliers, des
tambours à côté d’une curieuse ceinture de fillette
confectionnée avec, en miniature, tous les éléments typiques des
tenues féminines des Plaines. Des tipis modernes ont été
installés en fin de parcours, nous donnant une vue plus explicite
de la vie de ces indiens nomades que celle véhiculée par les films
hollywoodiens dont certaines scènes sont présentées dans la salle
de projection. Une exposition utile, riche en objets rares et très
bien présentés. Musée du Quai Branly 7e. Jusqu’au 20 juillet
2014. Pour
voir notre sélection de visuels, cliquez ici.
Lien : www.quaibranly.fr.
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