GIACOMETTI
Entre tradition et avant-garde

Article publié dans la Lettre n° 466
du 14 novembre 2018


 
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GIACOMETTI. Entre tradition et avant-garde. On ne présente plus ce grand sculpteur suisse dont les œuvres sont exposées régulièrement tant en France qu’à l’étranger. Aujourd’hui, le musée Maillol s’intéresse au style de Giacometti (1901-1966), artiste inclassable mais entretenant des relations avec les sculpteurs de son temps. Pour cela le parcours adopte un ordre à la fois chronologique et thématique, depuis la première sculpture, une tête de son frère Diego, réalisée à l’âge de 13 ou 14 ans jusqu’à son fameux Homme qui marche (ici la version II, en plâtre coloré, de 1960). Entre ces deux œuvres, que de recherches et de variations.
À ses débuts, le jeune Giacometti, part pour Paris où il suit les cours de Bourdelle, lui-même formé par Rodin. Bourdelle et ses contemporains Maillol et Despiau ont cherché à renouveler la tradition du portrait classique en faisant poser leurs proches, un procédé que suivra Giacometti durant toute sa carrière.
Mais à cette époque, dans les années vingt, Paris est en proie à l’effervescence des arts et en particulier des avant-gardes. Giacometti s’y intéresse et conçoit des sculptures avec des figures humaines géométrisées qui rappellent celles de Zadkine, Lipchitz, Csaky et Laurens dont des œuvres sont mises en regard de celles de Giacometti. C’est aussi l’époque où les artistes se passionnent pour les arts extra-occidentaux, l’Afrique en particulier. Le Personnage accroupi de Giacometti (vers 1926) et surtout son Couple (vers 1925-1927) s’inspirent de ces formes tout autant que de Verre et bouteille (1919) d’Henri Laurens.
Néanmoins, après 1935, Giacometti abandonne l’imaginaire onirique surréaliste et revient au travail d’après nature. La section 4 présente une quinzaine de têtes et de bustes réalisés par Giacometti, en regard de têtes sculptées par Maillol et par Bourdelle, les trois utilisant des modèles. Cette section s’intéresse aussi à la place du socle dans la sculpture, un sujet qui passionnait déjà Rodin, Bourdelle et bien d’autres sculpteurs (Lettre n°250). Le Petit buste de Silvio sur double socle (vers 1943-1944) est très révélateur à cet égard.
À partir du début des années 1950, Giacometti s’inspire du travail de Rodin pour Les Bourgeois de Calais (1885) et de Maillol pour Les Trois Nymphes de la Prairie (1930-1937), deux ensembles exposés ici, pour faire lui aussi des groupes de figures. C’est ainsi, par exemple, qu’il plante ses figurines sur un plateau pour composer des paysages qu’il appelle La Clairière (1950) ou La Forêt (1950). Le travail préparatoire au stylo à bille, dont on voit un exemple ici, est révélateur de la manière de travailler de Giacometti. D’ailleurs, à la suite de ces groupes, dans une section intitulée « D’après l’antique », nous avons des dessins de Giacometti d’après des sculptures antiques, qu’il voyait au Louvre ou ailleurs, une pratique qu’il poursuivra sans interruption, et des œuvres, comme Femme assise (1956) qui rappellent certaines divinités égyptiennes.
L’une des salles du musée Maillol donne sur une reconstitution de l’atelier de ce dernier. Catherine Grenier, la commissaire générale, en profite pour nous montrer des dessins par Giacometti de son tout petit atelier (23 m2) du 46 rue Hippolyte-Maindron où il restera toute sa vie à partir de 1927. Nous avons aussi des photos de cet atelier prises par les plus grands photographes de son époque tels Robert Doisneau, Sabine Weiss, Ernst Scheidegger, Richard Winther, Emmy Andriesse ou Henri Cartier-Bresson.
Avec les « Figures féminines », thème de la section suivante, nous abordons l’un des sujets de prédilection pour certains artistes du XXe siècle et tout particulièrement pour Giacometti. À côté de sa Femme qui marche (1932), au corps bien lisse, et de sa Femme de Venise III (1956), solidement ancrée sur son socle, au corps plein d’aspérités, nous avons des sculptures de Bourdelle et de Richier, comparables à l’une ou à l’autre de ces sculptures de Giacometti. La comparaison continue avec des œuvres de Maillol et de Zadkine dont on voit Vénus cariatide (1919), proche de la sculpture polynésienne.
L’exposition s’achève avec L’Homme qui marche (1960), une sculpture destinée au parvis du gratte-ciel de la Chase Manhattan Bank à New York. Sa conception rappelle le Saint Jean-Baptiste de Rodin (1880) mais avec des pieds comme englués dans la boue et une détermination à avancer absolument sans faille. Avec plus de cinquante sculptures de Giacometti et vingt-cinq d’autres artistes majeurs, cette exposition est l’une des plus intéressantes qui ait été consacrée à cet artiste. R.P. Musée Maillol 7e. Jusqu’au 20 janvier 2019. Lien : www.museemaillol.com.


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