GRAVURES D'EUGÈNE DELACROIX (1798-1863) POUR ILLUSTRER

FAUST

avec des visuels mis à la disposition de la presse,
d'autres glanés sur le Web
et nos propres prises de vue


Visuels complétant le parcours de l'exposition DELACROIX,
accompagnant l'article publié dans la Lettre n°455 du 23 mai 2018

 

 

En 1827, Delacroix exécute dix-huit lithographies d’après le Faust de Goethe à la demande de l’éditeur Charles Motte.

 

Ce portrait de Méphistophélès en diable volant, inspiré des Caprices de Goya, ouvre la série.

Cette lithographie et les suivantes, à l'exception de la deuxième, appartiennent à la Bibliothèque nationale de France (Paris), département des Estampes et de la photographie.

1 - Méphistophelès volant au-dessus de la ville...
Lithographie, 3e état, 1827.

La manière dont Delacroix plante le décor est d’une franchise totale : l’être maléfique ricane, sur de son fait en une sorte de promesse de destruction car, dans cette Babylone moyenâgeuse règne la corruption de l’argent, celle des mœurs aussi, à la manière dont l’entendait l’époque. Observons que des églises s’aperçoivent, en bas vers l’arrière. Le sommet de la tour d’une semble toucher l’aisselle de Méphisto. Un rappel de sa condition et de ce qu’il fut ?

« De temps en temps j’aime à voir le vieux père,
Et je me garde bien de lui rompre en visière... »

 
 

2 - Faust dans son cabinet.
Lithographie, 1er état avec remarques, 1827.
Paris, Petit Palais - Musée des Beaux-Arts de la Ville de Paris, legs Dutuit en 1902.

Le professeur Faust est un savant que tourmente le constat amer de la vanité des travaux de toute une vie : les livres ne lui ont rien livré des puissances de l’Esprit ni des trésors de la Terre. Ce désespoir le prédispose à accepter le pacte de Méphistophélès.

Faust, dans son cabinet de travail, apparaît triste, désemparé, livré à l’ennui de la réflexion devenue inintéressante à ses yeux. Il est figé sur place, dans un cadre « gothique revival » inattendu. La chaise curule, le lustre où une seule bougie est allumée et n’éclaire que très peu une antre bien sombre, la chaise en os de mouton plutôt renaissance espagnole, rendent difficiles la compréhension de l’environnement qui est censé être l’Allemagne du 16e siècle mais ce qui compte, c’est la vision de ce crâne, ultime « vanité » humaine : « Pauvre crâne vide que me veux-tu dire... ».

 
3 - Faust et Wagner. Lithographie, 2e état, 1827.
 
4 - Faust, Wagner et le Barbet.
Lithographie, 1er état, 1827.

En rentrant d’une promenade aux abords de la ville, le professeur Faust et son disciple Wagner sont suivis par un étrange chien, avatar de Méphistophélès. Delacroix donne aux figures la raideur stylisées des bas-reliefs égyptiens ou des miniatures mogholes.
 
5 - Méphistophélès apparaissant à Faust.
Lithographie, 4e état, 1827.

« Méph : Pourquoi tout ce vacarme ? Que demande monsieur ? Qu’y a-t-il pour son service ?.»
 

6 - Méphistophélès recevant l’écolier.
Lithographie, 2e état, 1827.

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7 - Méphistophélès dans la taverne des étudiants.
Lithographie, 2e état, 1827.

Afin de montrer à Faust « la bestialité dans toute sa candeur », Méphistophélès l’emmène dans une taverne d’étudiants où il s’amuse à faire jaillir du vin par des trous forés dans une table. Le liquide tombé à terre s’enflamme, trahissant la magie diabolique de Méphistophélès.

« — Au feu à l’aide, l’enfer s’allume....
— Sorcellerie ! jetez vous sur lui... son affaire ne sera pas longue. »

 

8 - Faust cherchant à séduire Marguerite.
Lithographie, 2e état, 1827.

Sous l’influence d’un filtre d’amour, faust se prend de passion pour Marguerite et exige que Méphistophélès l’aide à la séduire. Faust arbore le profil caprin et la pose affectée de son mentor : les deux complices se ressemblent à s’y méprendre.

« Faust.— Ma belle Demoiselle oserais-je vous offrir mon bras et vous reconduire chez vous ? ».

 

9 - Méphistophélès se présente chez Marthe.
Lithographie, 1er état, avec remarques, 1827.

Méphistophélès utilise la vanité de Marthe, une voisine de Marguerite, pour ourdir le premier rendez-vous galant de Faust avec la jeune femme.

Delacroix donne libre cours à sa fantaisie dans les marges, ce dont ce rare tirage conserve le souvenir : fauves, cavaliers en duel et têtes grimaçantes trahissent les obsessions de son imagination.

 

10 - Marguerite au rouet.
Lithographie, 1er état, avec remarques, 1827.

Marguerite semble s’ennuyer auprès de son rouet qu’elle regarde sans le voir. Son cadre quotidien est très défini : un coffre sur lequel elle est assise, une table à tréteaux recouverte d’une large nappe et un pot de fleurs. Sa robe magnifique paraît rutilante..

« Sans lui l’existence,
N’est qu’un lourd fardeau,
Ce monde si beau,
N’est qu’un tombeau
Dans son absence ».

(texte sur les états suivants)

 

11 - Duel de Faust et Valentin.
Lithographie, 1er état, avec remarques, 1827.

Dans le but de la séduire, Faust se rend nuitamment chez Marguerite pour lui chanter une sérénade. Son frère Valentin le surprend et le provoque en duel. Mais Faust, aidé des pouvoirs de Méphistophélès, le blesse mortellement.

Le drame c’est l’assassinat de Valentin par Faust, car il ne s’agit évidemment pas d’un « duel » loyal , suivi de sa fuite éperdue. Sur un fond de ville médiévale, près d’un puits et d’un mur, Faust transperce de son épée son adversaire. Solidement arc-bouté sur d’impressionnantes jambes, le coup porté tue sur l’instant Valentin qui s’écroule en lâchant son arme. L’impression de vérité immédiate qu’a réussi à donner à la scène Delacroix est extraordinaire : on s’y croirait... Si l’on y croyait. Faust et Méphisto s ’enfuient par une ruelle (estampe suivante).

« Meph... Pousse... oh !... Meph... Voilà mon rustaud apprivoisé. » (texte dans les états suivants).

 
12 - Méphistophélès et Faust fuyant après le duel.
Lithographie, 1er état, avec remarques, 1827.
 

13 - Marguerite à l’église.
Lithographie, 3e état, 1827.

« Marg... Malheureuse ! Ah ! si je pouvais me soustraire aux pensées qui se succèdent en tumulte dans mon âme et s’élèvent contre moi.
Le mauvais Esprit... La colère de Dieu fond sur toi ! la trompette sonne... Malheur à toi !
CHŒUR. Judex erbo cum sedebit,
Quidquid latet apparebit,
Nil inultum remanebit. ».

 

14 - Faust et Méphistophélès dans les montagnes du Harz.
Lithographie, 1er état, avec remarques, 1827.

Faust et Méphistophélès escaladent la montagne afin d’assister au sabbat de sorcières qui a lieu à son sommet lors de la nuit de Walpurgis. Les reptiles et les chevaux lâchés qui hantent l’image et ses marges annoncent le spectacle diabolique.

 

15 - L’ombre de Marguerite apparaissant à Faust.
Lithographie, 4e état, 1827.

« Meph — Laisse cet objet, on ne se trouve jamais bien de le regarder... tu as bien entendu raconter l’histoire de Méduse ? Faust — Assurément ce sont là les yeux d’un mort, qu’une
main amie n’a point fermés ; c’est là le sein que Marguerite m’a livré, c’est le corps charmant que j’ai possédé. »

16 - Faust et Méphistophélès galopant dans la nuit du sabbat.
Lithographie, 4e état, 1827.

On retrouve Faust et Méphistophélès s’échappant à cheval. Leurs destriers foncent vers un inconnu épouvantable : la présence de la sorcière, celle du gibet avec le pendu sont là pour le prouver. Même la crinière des deux quadrupèdes s’effiloche au vent...Le ressenti de peur est partout...La damnation de Faust devient totale...

« Faust : Que vois-je remuer autour de ce gibet ?
… Ils vont et viennent. Ils se baissent et se relèvent
Meph : C’est une assemblée de sorciers.
Faust : Ils sèment et consacrent
Meph : En avant ! en avant ! ».

 

17 - Faust dans la prison de Marguerite.
Lithographie, 4e état, 1827.

Suite à la mort de son frère et celle de l’enfant qu’elle a eu de Faust, Marguerite est emprisonnée. Méphistophélès trouble le sens de son geôlier pour permettre à Faust de la délivrer, mais la jeune femme, ayant perdu la raison, refuse de le suivre.

« Faust — Reviens à toi. Un seul pas, et tu es libre...
Meph — ... que de paroles inutiles ! que de délais et d’incertitudes !
mes chevaux frissonnent, l’aube blanchit l’horizon. »

 
 
Goethe.