Parcours en images de l'exposition

DANS LA SEINE
Objets trouvés de la Préhistoire à nos jours

avec des visuels mis à la disposition de la presse
et nos propres prises de vue

Parcours accompagnant l'article publié dans la Lettre n°602 du 16 octobre 2024


 

Titre de l'exposition
La Crypte archéologique de l’île de la Cité

La Crypte archéologique de l’île de la Cité abrite des vestiges du Paris antique, médiéval et d'époque moderne mis au jour entre 1965 et 1970 lors de la construction d’un parc de stationnement souterrain. Cette fouille, exceptionnellement conservée en plein cœur de la capitale, est l’unique site archéologique ouvert au public à Paris. Sur près de 1800 mètres carrés, elle témoigne des transformations de la ville, dès sa fondation à la fin de la conquête de la Gaule par Jules César. Établie à la frontière de deux provinces romaines, la «celtique » et la «belgique», petite cité d’un grand fleuve, Lutèce-Paris construit son destin de capitale autour de son activité fluviale.
Au sein d’un parcours permanent, une exposition temporaire est dédiée à cet acteur incontournable de l'histoire de Paris qu’est la Seine. Une série d’objets archéologiques, issus de recherches ou de collectes, rappelle les interactions entre l’homme et le fleuve, à travers les fragments d’une histoire commune depuis la Préhistoire.
 
Texte du panneau didactique.
 
Une des vitrines du parcours permanent.
 
Parcours de l’exposition

Le parcours de l'exposition s'articule autour de quatre périodes chronologiques et plusieurs thématiques choisies parmi des découvertes archéologiques en lien avec la Seine. Ce sont d'abord les installations humaines de l'époque préhistorique, sur les berges du fleuve, puis dans l'Antiquité, le temps de ses premiers aménagements. Les périodes médiévale et moderne révèlent des armes, des ex-voto et des déchets, tandis que la Seine d'aujourd'hui nous livre encore des trouvailles fortuites, comme des morceaux de ponts.
Ces objets témoignent des récits d'hommes et de femmes qui ont construit leur quotidien avec la Seine, qu'il s'agisse des chasseurs néandertaliens ou du peuple parisien pieux et superstitieux.
L'exposition explore aussi la Seine en amont et en aval de Paris, avec l'évocation de ses sources en Bourgogne, d'une pêcherie antique dans l'Aube, et d'un site paléolithique à Clichy-la-Garenne. Les objets présentés appartiennent au registre de l'utilitaire ou de la magie.
Tout au long de la visite, un parcours illustré permet aux enfants de mieux comprendre les vestiges de la Crypte et les principales thématiques abordées par l’exposition.
Statuette d’Apollon trouvée dans le lit de la Seine, alliage cuivreux, époque gallo-romaine. © Paris Musées / Musée Carnavalet - Histoire de Paris.
 
Texte du panneau didactique.


1 - LA SEINE PRÉHISTORIQUE

Scénographie
Naissance de la Préhistoire

Au XIXe siècle, les carrières de sable, ou sablières, sont exploitées dans la boucle de la Seine entre Clichy et Levallois, en particulier lors des gigantesques travaux entrepris par le préfet Haussmann entre 1853 et 1870. Elles sont bien connues des géologues, des préhistoriens et des promeneurs amateurs qui viennent y collecter des silex taillés et des ossements de faunes disparues, attestant de la présence de l’Homme dans le Bassin parisien durant la Préhistoire.
À compter des années 1860, la multiplication des découvertes préhistoriques en France suscite un intérêt nouveau, dont témoigne le succès de la «Galerie de l’histoire du travail», collection éphémère réunie à l’occasion de l’Exposition universelle de 1867. C’est la première présentation publique de vestiges des premières occupations humaines et le début d’une nouvelle science de l’Homme, en train de se constituer sur les bancs de la Seine: la Préhistoire.
 
Texte du panneau didactique.
 
Grand éclat de silex produit par la technique dite « Levallois ». Trouvé par Jules Reboux à Saint-Ouen et donné au musée Carnavalet en 1881. Paléolithique moyen. © Paris Musées / Musée Carnavalet - Histoire de Paris.
 
Jules Reboux, un promeneur éclairé

Dans les années 1860 à 1870, un préhistorien amateur, Jules Reboux, parcourt Neuilly, Montreuil, Grenelle, Clichy et surtout Levallois, à proximité de chez lui, pour explorer les carrières de sable. À partir de ses trouvailles d’outils lithiques, il différencie des méthodes de taille et en propose un classement : les silex éclatés, taillés et polis. Sa classification en trois périodes successives (le Paléolithique, le Mésolithique et le Néolithique), inspirée de celle employée en géologie, est établie en combinant des données observées sur des coupes stratigraphiques et sur les outils. Ce vocabulaire est toujours utilisé aujourd’hui, même si les définitions et les interprétations ont changé.
Ensemble des outils en silex, retrouvés sur le site de Clichy-La-Garenne, octobre 2020. Paléolithique moyen. © Denis Glicksmann / Inrap.
 
Texte du panneau didactique.
Des Néandertaliens près de Paris

À Clichy-la-Garenne, un groupe d’hommes et de femmes de Néandertal a fait une halte sur une berge de la Seine pour tailler des outils. Il subsiste de cette occupation éphémère des éclats tranchants en silex, qui révèlent après analyse plusieurs activités, tels l’utilisation de fibres végétales, sans doute le raclage d’écorce ou la découpe de gibier issu de la chasse. Avant de céder la place à Homo sapiens – que nous sommes – il y a 30 000 ans, les Néandertaliens sont attestés en Europe depuis les débuts du Paléolithique moyen, vers −300 000. Longtemps considérés comme des êtres primitifs, ils sont aujourd’hui connus pour avoir construit des campements, enterré leurs morts et exploité chaque ressource disponible de leur environnement.
 
Texte du panneau didactique.
 
Panneau destiné au jeune public.
 
Expériences

Reboux est aussi le précurseur d’une discipline qui deviendra scientifique près d’un siècle plus tard, l’archéologie expérimentale. Pour retrouver les gestes et comprendre les outils, il imagine leurs fonctions et leur associe des types de manches dont il teste l’efficacité. Ses expériences de découpe de bœuf avec un couteau en silex et de préparation de peau avec un racloir se déroulent dans les abattoirs de Paris. Les premières restitutions raisonnées sont exposées à l’assemblée de la Société d’ethnologie en 1873.
Diversité des matériaux
Cet ensemble lithique, recueilli par Jules Reboux lors de diverses campagnes de ramassage dans les sablières de la Seine, illustre la diversité des matériaux sélectionnés par les hommes préhistoriques pour la fabrication de leurs outils. Ces matières premières sont choisies en fonction de leurs propriétés physiques et des besoins du groupe humain. Les outils peuvent être directement mis en forme à partir de galets ou de rognons, ou débités en éclats-supports (appelés aussi «éclats bruts»), qui seront transformés par la suite en outils. Ils sont récoltés dans les lits de rivières (alluvions), au sol (colluvions) ou directement dans un banc affleurant.
 
Texte du panneau didactique.
 
Ensemble des outils en silex, retrouvés sur le site de Clichy-La-Garenne, octobre 2020. Paléolithique moyen. © Denis Glicksmann / Inrap.
 
Panneau destiné au jeune public.
Scénographie
 
Défense partielle de mammouth laineux (Mammuthus primigenius). Collection privée. Musée associatif espace Gaïa, Montereau-Fault-Yonne, Seine-et-Marne.

Dernier représentant de l'ordre des proboscidiens - famille des éléphantidés -, le mammouth laineux a disparu du continent eurasien, à la fin du Pléistocène, il y a 10000 ans. Cependant, des populations isolées ont survécu jusqu'à il y a 4000 ans, comme sur l'île Wrangel (Sibérie orientale). Cette défense fut découverte en 1991, dans une gravière de la commune de Fismes, dans le département de la Marne, en limite du département de l'Aisne (France).

 
Moulage d'une défense de mammouth laineux (Mammuthus primigenius). Résines polyuréthane et époxyde, armées de fibres de verre, coffrage en bois, 2012. Pascal Raymond.

Cette défense droite d'un mammouth adulte a été découverte sur le site de Changis-sur-Marne (Seine-et-Marne), Le Chemin de la Fosse de la Haie, à l'occasion d'une fouille préventive. Elle faisait partie d'un important amas d'ossements d'au moins deux individus, daté entre - 100000 et -90 000 ans, soit au début du dernier cycle glaciaire qu'a connu l'Europe.
 
Panneau didactique.
 
Panneau destiné au jeune public.
Scénographie
Exploiter les berges de la Seine

Les interactions entre les hommes et la Seine se poursuivent dans le temps, comme le montre un campement de chasseurs-cueilleurs du Mésolithique (-9600/-6000) découvert en 2008, rue Henry-Farman (Paris 15°). Leur installation sur le banc sableux d'un bras d'eau a laissé des traces de leurs activités: taille de pointes et d'armatures de flèches en silex pour chasser à l'arc, consommation de viande, fabrication d'outils en os. Le climat, comparable à celui  d'aujourd'hui, est alors doux et tempéré et des forêts riches en gibier couvrent les bords du fleuve.
Plus récemment encore, la sédentarisation des populations nomades de la vallée de la Seine, illustrée par le site néolithique de Bercy, est attestée sur la berge d'un paléochenal de la Seine, Les groupes humains ont ainsi exploité depuis des millénaires toutes les ressources que leur offrait l'environnement immédiat de ce fleuve emblématique de Paris.
 
Texte du panneau didactique.
 
Évocation d'une halte d'un groupe de Néandertal sur le site de Clichy-la-Garenne (92). Plusieurs éclats de silex taillés sur place, utilisés puis abandonnés ont été découverts dans un niveau sableux de la plaine alluviale de la Seine. Datés d'environ -70000 avant notre ère, ils témoignent des savoir-faire des Néandertaliens: la taille d'outils en silex, la boucherie et le travail de fibres végétales, au bord d'un fleuve très large où de grands bancs sableux permettent par endroits la traversée.
 
La Préhistoire au XXIe siècle

Près de cent cinquante ans après les découvertes des premières occupations humaines, de nouveaux projets urbains relancent les recherches archéologiques dans la même boucle du fleuve.
En 2020, à Clichy-la-Garenne, une équipe de préhistoriens de l’Inrap (Institut national de recherches archéologiques préventives) mène une fouille préventive sur une parcelle proche des berges, touchée par un programme immobilier. Sous quatre mètres de remblais modernes, ils découvrent l’histoire de l’ancien lit de la Seine, daté entre −85 000 et −25 000 ans avant notre ère (Paléolithique). Durant cette période, le lit du fleuve est très large et parsemé de bancs sableux. Les berges sont en pente douce et les îlots de sable permettent aux animaux et aux groupes humains de le traverser par endroits. Le climat est froid et venteux, et le paysage, dominé par une steppe de hautes herbes, de graminées et de quelques rares arbustes, est parcouru par de grands mammifères: rennes, chevaux, bisons et rhinocéros laineux.
Prélèvements des blocs de sédiments sur la coupe du site de Clichy-la-Garenne, septembre 2023. © Sophie Clément / Inrap.
 
Texte du panneau didactique.


2 - LA SEINE ANTIQUE

Scénographie
Un site d'îlots et de marécages La Seine et ses abords sont peu documentés pour la période gallo-romaine. Sur la rive gauche, une vaste zone humide s’étend sur plus de trois cents mètres entre la berge et l’actuel boulevard Saint-Germain. Au milieu de ce marécage, un monceau – butte peu élevée – est occupé dès le Ier siècle, à l’emplacement de l’actuelle église Saint-Séverin. La rive droite est une alternance de petits reliefs et d’anses, appelées «mouilles», dont la plus importante est celle de la Grève, au niveau de la place de l’Hôtel-de-Ville. Les paysages reconstitués évoquent des berges et des îles entrecoupées de bancs de sable et de parties en eau, touchées par de fréquentes phases de crue. Le couvert forestier est varié – pins, bouleaux, aulnes, noisetiers, quelques chênes –, et les occupations humaines, intermittentes et peu denses, n’ont laissé que des traces ténues.
 
Texte du panneau didactique.
 
Panneau destiné au jeune public.
 
Franchir la Seine

Après la colonisation de la Gaule, les Romains étendent le réseau routier entre Lugdunum (Lyon) – la capitale – et le nord des provinces conquises. À Lutèce, ils choisissent l’île de la Cité comme point de franchissement de la Seine. Pour faire passer le cardo maximus - axe nord-sud principal de la ville -, une plateforme est bâtie sur un dispositif de quatorze grands pieux de chêne dans une anse inondable.
Avec le développement du transport fluvial, les villes riveraines de grands fleuves se dotent de zones d’accostage. Le premier port parisien est édifié sur le petit bras de la Seine au début du Ier siècle. Conçu dès la première urbanisation, il est facilement accessible depuis le centre-ville et dispose d’un espace de déchargement ainsi que d’entrepôts.
Un tronçon du quai, unique vestige du port, est visible ici. Haut d’un mètre trente, cet ouvrage de soutènement permet de contenir la pression des terres du côté de l’île et la montée des eaux du côté de la Seine.
Illustration du panneau ci-contre
 
Texte du panneau didactique.
 
Panneau didactique sur la dendrochronologie.
 
Un bateau dragueur et la cathédrale Notre-Dame, 4e arrondissement, Paris, vers 1890. Photographie d'Hippolyte Blancard (1843-1924).
Lutèce au Haut-Empire (Ier – IIIe siècle) et Lutèce à l’Antiquité tardive (fin IIIe – Ve siècle).

Cliquer ici ou sur l'image pour voir un agrandissement.

Scénographie
Ensemble de céramiques découvertes au port Saint-Bernard en 1874.
Destinés à la préparation des repas ou à la table, ces petits pots et ces gobelets proviennent en partie d'ateliers locaux de potiers localisés sur la rive gauche, au carrefour des actuelles rues Saint-Jacques et des Feuillantines, sur le cardo maximus, qui traverse la ville jusqu'au port. Elles sont datées des IIe et IIIe siècles, à l'exception de deux formes plus anciennes (AC 3113 et 1850). Le petit vase creux (AC 1989) est une amphorisque dont l'utilisation est incertaine: bouchon d'amphore miniature ou fiole. Il pourrait aussi s'agir d'un récipient pour tester le produit contenu dans les amphores.
Une ville nouvelle sur l'île

Au IVe siècle, l’île de la Cité devient le centre administratif de Lutèce et un lieu de cantonnement pour les troupes lors des campagnes militaires. Protégée par un rempart, l’île comprend une résidence impériale et plusieurs thermes. Le port de commerce devient port militaire. Selon la Notitia dignitatum – répertoire administratif de l’armée romaine –, Lutèce accueille le siège du commandement d’une flotte régionale chargée de la surveillance de la Seine, le Praefectus classis Anderetianorum. L’existence de deux ponts pour traverser la Seine est assurée, au milieu du IVe siècle, grâce au témoignage de l’empereur Julien («des ponts de bois y conduisent de deux côtés»), mais rien ne l’atteste pour les périodes antérieures. Des passages à gué ont pu coexister, comme c’est le cas sur la Saône. À l’intérieur de la fortification, l’île de la Cité compte douze hectares à la fin de l’Antiquité contre vingt-deux aujourd’hui.
 
Texte du panneau didactique.
 
Fibule à décor géométrique, alliage cuivreux, IIe siècle, traces d’émail incrusté. CC0 Paris Musées / Musée Carnavalet - Histoire de Paris.
 
Cruche en céramique fine blanche, Ier siècle. CC0 Paris Musées / Musée Carnavalet - Histoire de Paris.
 
Gobelet en céramique commune grise provenant d’un atelier de Lutèce, II-IIIe siècle. Fouille du port Saint-Bernard,1874. CC0 Paris Musées / Musée Carnavalet - Histoire de Paris.
Scénographie
Collectes d'antiquités

Les objets gallo-romains provenant de la Seine sont issus de dragages ou de surveillances archéologiques. En 1874, l’archéologue Théodore Vacquer fouille la berge lors des travaux du nouveau pont de Sully. Entre ce dernier et le pont d’Austerlitz s’étendent alors les quais de l’ancien port Saint-Bernard, à l’emplacement où la Seine reçoit la Bièvre, son unique affluent dans Paris. À l’époque antique, les plus modestes rivières – comme la Bièvre – sont presque toujours flottables et peuvent être utilisées ponctuellement pour le transport. On ignore si ce lieu de confluence a fait l’objet d’un aménagement particulier.
Deux lots de vaisselle sont recueillis, peut-être issus de cargaisons échouées, comprenant des ustensiles en métal, casseroles, jattes et situles qui appartiennent à un service de luxe, ainsi que des céramiques utilitaires. Parmi, celles-ci, des petits pots et des gobelets proviennent d’ateliers locaux de la rive gauche, datés des IIe et IIIe siècles.
 
Texte du panneau didactique.
 
Situle ou récipient à anse. Tôle d'alliage cuivreux martelé, Ier - IIe siècle. Musée Carnavalet - Histoire de Paris.
La vaisselle en bronze est utilisée, à l'origine, pour le transport de l'eau dans les cérémonies religieuses. Par la suite, elle est sortie lors de banquets ou d'événements publics, et devient un marqueur de luxe. Les pièces appartiennent principalement au service de table, destiné aux aliments liquides et solides, mais certaines vont au feu, comme des chaudrons. D'autres encore sont consacrées à la toilette, tels les bassins. Elles étaient probablement fabriquées en Italie.
 
Statuette de Mercure portant une bourse, symbole de prospérité, alliage cuivreux. Epoque gallo-romaine. CC0 Paris Musées / Musée Carnavalet - Histoire de Paris.
 
Bracelet en jonc ouvert, déformé, portant un décor spécifiquement gallo-romain d'ocelles (de cercles pointés). Alliage cuivreux, période gallo-romaine. Musée Carnavalet - Histoire de Paris.
Yan Tomaszewski. Ex-voto, série Sequana, 2023. Bois carbonisé, coton, charbon actif, gravier, corde de chanvre. 41 x 24,5 x 12,5 cm.
S'inscrivant dans le projet Sequana développé par Yan Tomaszewski depuis 2020, cette sculpture est issue d’un processus consistant à réactiver d'anciens gestes d'offrande au fleuve. Inspiré par les ex-voto anatomiques offerts par les Celtes à la déesse Sequana, un ensemble de sculptures en bois carbonisé a été immergé dans la Seine pour la Nuit Blanche 2023, à l'issue d'une procession allant du MAC VAL jusqu'au fleuve.
Au cours de cette performance, des sculptures représentant diverses parties du corps humain ont été emmaillotées dans des linceuls contenant du charbon actif, une matière connue pour ses qualités ultra-absorbantes et utilisée pour la purification de l'eau.
Ainsi immergées pendant plusieurs semaines, ces sculptures ont contribué symboliquement - mais aussi concrètement - à la purification de la Seine. Gorgée de polluants et d'impuretés du fleuve, l'œuvre présentée dans l'exposition Dans la Seine est une sculpture «martyre», sacrifiée pour soigner la Seine dans une logique de don contre-don.
Honorer l'eau vive

Dans le monde romain, les phénomènes de la nature sont des manifestations de forces invisibles et divines, l’eau est crainte pour sa puissance, et les sources honorées pour leur origine mystérieuse. Le dynamisme de la Seine et son poids économique ont peut-être donné à Sequana une renommée extrarégionale plus importante que celle d’autres divinités des rivières et des sources, féminines pour la plupart. Le culte de l’eau se généralise sous l’empereur Auguste (- 27 à 14), avec une nouvelle organisation politique et sacrée des territoires. L’eau de source n’a pourtant pas de qualité spécifique dans la médecine romaine, la guérison vient de la magie, aidée par des soins et des pratiques médicales rationnelles et par la bienveillance de Sequana, déesse guérisseuse, sollicitée par les ex-voto
 
Texte du panneau didactique.
 
Tête de statue en marbre, XXe siècle. Brigade fluviale / DRAC d’Ile-de-France, service régional de L’archéologie. © Marc Lelièvre / Ville de Paris.
 
Prier pour guérir

Quelque mille cinq cents ex-voto, en pierre, en métal et en bois, proviennent du lieu dédié à Sequana. Si les sculptures en bois, mises au jour dans une retenue d’eau marécageuse dans les années 1960, sont les plus exceptionnelles, les sculptures en pierre présentent une diversité remarquable : têtes d’hommes, de femmes ou d’enfants, personnages en pied, bébés emmaillotés, morceaux d’anatomie, animaux. Longtemps interprétées comme les marques de pathologies précises, elles sont désormais considérées comme des représentations symboliques. Les corps sont fragmentés pour localiser le mal, le séparer du corps sain, et permettre à la déesse de bien comprendre le point où pratiquer la guérison.
Ces vestiges matérialisent la demande d’intervention et le remerciement pour la prière exaucée, vœu exprimé ou vœu accompli, suivant la formulation VSLM (Votum Solvit Libens Merito, «il s’est acquitté de son vœu»).
Tête masculine, Ex-voto, calcaire. Epoque gallo-romaine. Don de Henry Corot en 1954. © Musée Archéologique de Dijon / Bruce Aufrère / TiltShif.
 
Texte du panneau didactique.
Retour aux sources

Aux confins de la Bourgogne et de la Champagne, à une quarantaine de kilomètres de Dijon, sept minces filets d’eau se réunissent au fond d’un vallon étroit pour donner naissance à la Seine. C’est là qu’est construit, au début de notre ère, le premier sanctuaire dédié à Sequana, la déesse de la Seine. Le site, découvert en 1836, est acheté en 1864 par le conseil municipal de Paris, et plusieurs fouilles menées aux XIXe et XXe siècles permettent de reconstituer une partie du sanctuaire. Il se déploie en terrasses successives, incluant un espace sacré compris entre le jaillissement de la source et le temple, ainsi qu’un espace profane où les pèlerins sont accueillis. Ils circulent dans une cour à portique et ont accès à différents bâtiments, où ils peuvent se nourrir, se loger et surtout acquérir des ex-voto. Ceux-ci, exécutés sur place dans les ateliers spécialisés et très productifs, sont ensuite déposés dans le temple ou immergés dans un bassin où se font les ablutions rituelles.
 
Texte du panneau didactique.
 
Ex-voto, tête d'homme barbu. Époque gallo-romaine, calcaire. Dijon, Musée archéologique, don Henry Corot 1954.
 
Ex-voto, buste de pèlerin. Époque gallo-romaine, calcaire.
 

Les ex-voto en métal
Certains ex-voto représentant des yeux ou des sexes féminins et masculins ont été fabriqués dans des plaquettes de métal. Ils étaient rassemblés à l'écart des ex-voto en pierre et en bois, dans un vase offert par un certain Rufus, avec huit cent trente monnaies d'argent. Un exemplaire du même type, en forme d'œil unique, a été découvert à Paris, sur la colline de Montmartre. Au moins quatre sources y sont localisées à l'époque antique, près des vestiges supposés de temples de Mars et de Mercure ainsi que de thermes d'un sanctuaire des eaux.

Scénographie
Scénographie
En amont de Lutèce

Aucune installation de pêche antique n’a été conservée sur les berges de Lutèce, mais une fouille plus lointaine permet d’en imaginer la configuration. À Pont-sur-Seine, dans l’Aube, à quelque cent vingt kilomètres de la capitale, un ancien bras de la Seine révèle en 2013 une pêcherie du Ier siècle de notre ère. Colmaté par des dépôts sédimentaires issus de crues et de l’érosion des rives, ce lit secondaire à l’eau calme et peu profond constituait un milieu favorable à la pêche. Des vestiges de joncs, de nénuphars et d’iris jaunes confirment cet environnement. Dans un paysage de forêts humides, certaines essences – comme le charme et le hêtre – marquent des zones plus sèches et clairsemées qui témoignent de l’impact considérable, dès le Ier  siècle, de la déforestation, des fortes érosions des bords de rives et des inondations.
 
Texte du panneau didactique.
 

Moulage d'une nasse de pêche
Résines polyuréthane et époxyde. Fouille de Pont-Sur-Seine, Le Gué Dehan (Aube), 2018.
Excavation de Pont-sur-Seine, Le Gué Dehan (Aube), 2018. Une nasse avait été entraînée par une inondation et déposée au-delà de la pêcherie. Conservée sur soixante et un centimètres de long, elle était formée de brins de saule tressés. Sa datation est estimée entre 86 et 246 de notre ère.

 
Une pêcherie sur la Seine

Le dispositif ingénieux présente une morphologie typique en « V », long de plus de trente mètres et large de quatorze en amont. Les parois sont constituées de roseaux entrelacés en clayonnage, maintenus par des armatures de piquets de bois. Une fois piégés à l’intérieur de la pêcherie, les poissons sont contraints par des filets lestés sur le fond avec des pierres. Ils sont ainsi guidés vers de grandes nasses immergées et arrimées à des pieux. Leur relève se fait à pied ou en barque. La scène exceptionnellement conservée a sans doute été figée par une crue.
D’après la forme et les dimensions des pièges, les poissons recherchés seraient longs et peu ventrus, principalement des anguilles, mais aussi des espèces remontant la rivière en quête de zones d’abri ou de reproduction – saumons, lamproies et aloses. Des aménagements du même type, intégrant filets et nasses, ont probablement été utilisés sur les berges parisiennes de la Seine, mais le pêcheur à la ligne ou au harpon est également une figure fréquente sur les décors de céramiques et de mosaïques.

Nasse de pêche du Ier siècle.
Fouille de Pont-sur-Seine, Le Gué Dehan (Aube), 2018. Excavation de Pont-sur-Seine, Le Gué Dehan (Aube), 2018.
Découverte dans un état exceptionnel de conservation, cette nasse, qui avait gardé son volume intact, a été prélevée pour être restaurée. Elle a été réalisée en vannerie clayonnée de branches de sureau et de noisetier, des arbustes habituels des berges de la Seine. Les nasses sont des pièges à poissons, qui permettent de capturer des espèces migratrices remontant ou descendant le fleuve. Elles sont utilisées avec des parcs à poissons en forme de V, les bouchots.

 
Texte du panneau didactique.
Les poissons

À Lutèce, la pêche joue un rôle essentiel dans l’alimentation de la cité. Un fournisseur de produits de la pêche, fier de son statut, figure sur sa stèle funéraire avec deux poissons suspendus par les ouïes en arrière-plan.
Deux fouilles ont permis d’identifier et de compter les espèces les plus représentées, à partir de sédiments prélevés dans les endroits susceptibles d’avoir reçu des détritus – dépotoirs, latrines ou puits. Leur tamisage permet ensuite d’isoler les restes osseux puis de les trier. La reconnaissance des poissons consommés se fait à partir d’ossements parfois aussi petits que des grains de riz. Les habitants de Lutèce se sont ainsi nourris, aux Ier et IIe siècles, de gardons, d’anguilles et de perches. On note de plus la présence de brochets, de barbeaux et de brèmes communes.
Quelques spécimens marins – harengs ou maquereaux – complètent la table, mais aussi, plus rare, un maquereau espagnol. Il rappelle l’existence d’un circuit de distribution de produits méditerranéens comme les sauces et les poissons conservés par salage, fumage ou séchage.
 
Texte du panneau didactique.
 
Légende.


3 - LA SEINE MÉDIÉVALE

Scénographie
La ville médiévale

Au Moyen Âge, Paris est un grand centre de consommation dans les secteurs de l’alimentation, de l’artisanat et du bâtiment. Le ravitaillement des biens s’effectue surtout par voie d’eau, et la Seine est le moyen de transport le moins cher et le plus rapide, en particulier pour les cargaisons importantes de marchandises.
Si certaines institutions ecclésiastiques, comme l’église Saint-Germain-l’Auxerrois ou l’abbaye Sainte-Geneviève, possèdent leur propre débarcadère (ports de l’école Saint-Germain et de la Bièvre), le port de la Grève, le plus important de Paris, est géré par la corporation des marchands de l’eau. Ils détiennent, à l’image des nautes de l’Antiquité, le monopole du commerce fluvial en amont et en aval de Paris. Situé dans une anse naturelle, sous l’actuel Hôtel de Ville, le port de la Grève ne cesse de s’étendre le long de la rive droite en une série de pontons. Ils servent au débarquement de marchandises spécifiques, sous le contrôle de la prévôté des marchands, institution administrative municipale équivalente à nos mairies actuelles.
 
Texte du panneau didactique.
 
Plan de Truschet et Hoyau, dit « plan de Bâle », représentant Paris, vers 1550 (détail). CC0 Bibliothèque publique et universitaire de Bâle-Ville, Kartenslge.
 
Vivre au bord de la Seine

La vie quotidienne des Parisiens est rythmée par les caprices de la Seine, par le gel et le dégel de ses eaux, ainsi que par la montée et la baisse imprévisibles de son niveau. Les quartiers riverains, plus bas qu’aujourd’hui de plusieurs mètres, sont souvent immergés, et le lit du fleuve est largement étalé. Il est encombré de pêcheries, de digues, de moulins ainsi que d’îlots qui s’égrènent le long des rives et seront intégrés progressivement aux îles principales ou aux berges. Celles-ci sont occupées par de nombreuses activités artisanales, comme les tanneries, où l’on traite les peaux, et les blanchisseries. Le premier quai maçonné est celui des Grands-Augustins, bâti en 1313 puis entre 1500 et 1600 les quais couvrent toute la rive droite entre le Louvre et le Châtelet.
Jusqu’au XVIIe siècle, tous les ponts sont reliés à l’île de la Cité. Souvent mal construits, encombrés de moulins entre leurs piles, et surchargés de « maisonnées », ils s’effondrent régulièrement. Il faut attendre 1607 pour traverser la Seine directement d’une rive à l’autre, avec l’édification du Pont-Neuf, premier pont en pierre et sans maisons.
Un pieu dans la berge.
En 1983, huit pieux de chêne sont découverts enfouis dans les alluvions de la Seine, au nord de l'île de la Cité. Hauts de plus de quatre mètres, épointés et munis de sabots métalliques, ils forment un pilotis interprété comme les fondations d'une maison accolée à l'ancien Petit-Pont, ou comme les soubassements d'une pile du pont ou d'un quai. La puissance des crues et des débâcles détruit régulièrement les ponts parisiens. De plus, jusqu'au XVIIIe siècle, la plupart sont «habités», c'est-à-dire couverts de maisons, ce qui accroît les risques d'effondrement. Ce pieu, daté de 1298-1308, appartient peut-être aux réfections entreprises après la grande crue de 1280.
 
Texte du panneau didactique.
Théodore-Josef-Herbert, dit Fedor Hoffbauer (Neuss, Allemagne, 1839 - Paris, 1922).
Vue panoramique de Paris en 1588, depuis les toits du Louvre, avec le Pont-Neuf en construction
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CC0 Paris Musées / Musée Carnavalet - Histoire de Paris.
Scénographie
Un bric-à-brac dans la Seine

Les travaux de curage ou de dragage de la Seine, comme le rehaussement de ses quais et l’installation d’écluses, font partie des opérations décidées par la municipalité parisienne, au milieu du XIXe siècle, pour améliorer la navigation dans Paris. Il s’agit d’augmenter la profondeur de l’eau, alors que le fleuve n’est navigable que quatre à six mois par an. À partir de 1849, des bateaux dragueurs interviennent dans les zones ensablées par les sédiments déplacés par le courant. C’est au moment de l’extraction du sable ou lors de son utilisation dans les maçonneries des quais que des objets sont découverts et prélevés. La construction ou la réfection de ponts, comme les chantiers du pont au Double en 1883 et du pont Marie en 1850, entraînent aussi des creusements qui dévoilent de nombreux petits outils et ustensiles.
 
Mais certaines collectes se font également dans le lit du fleuve lorsqu’il est presque à sec. À la saison chaude, le niveau de l’eau est au plus bas, et la Seine peut se traverser à pied, surtout par son petit bras. Dans la vase, des chiffonniers appelés « ravageurs » récoltent ce qui est recyclable ou revendable. Leurs trouvailles entrent dans une industrie de seconde main, bon marché, alimentée de pertes, de vols et de rebuts, parfois d’objets remarquables, dont certains intégreront des collections d’antiquaires et de musées.
Texte du panneau didactique.
Figurines de chevaliers et soldats de plomb, XVe - XVIe siècle. Musée Carnavalet - Histoire de Paris, collection Brigade fluviale.
Présentes dans plusieurs collections privées, dont celle d'Alberto Giacometti ou d'André Breton, ces statuettes étaient considérées par les artistes comme des objets singuliers, magiques ou maléfiques. Les personnages représentés sont des hommes en armes, de type fil de fer, aux visages caricaturaux, lèvres, nez et yeux façonnés en colombins. Sur leur cuirasse sont ajoutés des décors et des croix, et dans leurs mains des armes. Ce sont probablement des ex-voto jetés dans le fleuve, autour de Notre-Dame, au moment des départs en croisade ou vers d'autres combats aux enjeux chrétiens. Une statuette de cavalier, bien que différente, montre quelques similitudes dans le matériau, dans la représentation de l'arme de combat et dans les traits physiques. Toujours en alliage de plomb, un guerrier incomplet et un fragment de cheval constituent, avec un exemplaire du musée de Cluny, les premiers soldats de plomb connus en tant que jouets d'enfants.
 
Statuette de chevalier ou de guerrier, alliage de plomb. Époque moderne. CC0 Paris Musées / Musée Carnavalet - Histoire de Paris.
 
Figurine de chevalier, XVe - XVIe siècle. Musée Carnavalet - Histoire de Paris, collection Brigade fluviale.
Poteries parisiennes de la Seine. Pièces de vaisselle, médiévales et modernes, trouvées dans la Seine.
Certaines sont décorées de «flammules» rouges peintes au peigne sur la panse. D'autres portent des revêtements de glaçure verte, en particulier à l'intérieur des formes, pour éviter l'absorption des contenus (huile, aliments, boissons, épices) par la terre cuite. Le carreau est orné d'un motif peint à l'engobe jaune et rouge, et d'une couverte plombifère. La juxtaposition au sol des motifs floraux ou animaliers formait comme un tapis ornemental.
1 - Coquemar, pot à anse allant au feu, XIIIe siècle. Musée Carnavalet - Histoire de Paris.
2 - Carreau de pavement, XIIIe siècle. Pont au Change, Paris Ier arr.
Musée Carnavalet - Histoire de Paris.
3 - Tasse polylobée, XIIIe siècle.
Musée Carnavalet - Histoire de Paris.
4 - Lampe, XVIe - XVIIe siècle.
Musée Carnavalet - Histoire de Paris.
5 - Petit pot à double compartiment, salière, XVIe - XVIIe siècle. Pont au Double, Paris IVe arr. Musée Carnavalet - Histoire de Paris.
 
Carreau de pavement décoré d’un motif floral, terre cuite glaçurée,
XIVe siècle. Trouvé dans le lit de la Seine, au Pont-au-Change, Paris, 1875.
CC0 Paris Musées / Musée Carnavalet - Histoire de Paris.
 
Lampe sur pied composée d'un réservoir à combustible fermé pour faciliter son transport sans risque. XVIe - XVIIe siècle. Musée Carnavalet - Histoire de Paris.
Petits objets recueillis dans la Seine. À la hauteur du pont Notre-Dame ou du pont au Double (Paris, 4e arr.).
Le pont au Double est élevé au XVIIe siècle pour faire la liaison entre les bâtiments de l'ancien Hôtel-Dieu, situé de part et d'autre de la Seine. Il est reconstruit en 1708 et 1847, puis remplacé en 1883 par le pont actuel à une seule arche.
Le pont Notre-Dame, bâti en 1853 sur fondations du XVIe siècle (1512), est démoli et remplacé par l'édifice actuel en 1919. De nombreux objets furent mis au jour lors de l'érection de ces deux ouvrages.
1 - Deux broches et fragments de boucles. Alliage cuivreux argenté. Époque moderne. Musée Carnavalet - Histoire de Paris.
2 - Bague de promesse. Ornée de deux mains jointes dissimulant un cœur, elle est offerte aux fiançailles ou au mariage.  Alliage cuivreux. Époque moderne. Musée Carnavalet - Histoire de Paris.
3 - Petite bague au chaton en forme de rosace cruciforme. Alliage cuivreux. Époque moderne. Musée Carnavalet - Histoire de Paris.
4 - Bouton portant la lettre M. Époque moderne. Musée Carnavalet - Histoire de Paris.
5 - Lot de dés à coudre. Alliage cuivreux. Époque moderne. Musée Carnavalet - Histoire de Paris.
Statuette de sainte Agnès. Parmi ses nombreux attributs, c'est ici le port d'un agneau qui permet de l'identifier. Période médiévale. Musée Carnavalet - Histoire de Paris.
Petite vaisselle miniature, dînette, comportant gobelet, cuillère et assiettes. L'une de ces pièces porte des incisions de découpe, preuve qu'elle a été utilisée. Période médiévale ou moderne.
Musée Carnavalet - Histoire de Paris.
Croyances et dévotions

Les enseignes (insignes) de pèlerinage sont des petites appliques ou médailles rapportées par les voyageurs comme attestation de leur venue sur des lieux saints. Elles se portent sur la besace, le vêtement ou le chapeau. Produites en masse et vendues dans les petites échoppes des lieux de culte, les enseignes sont peu coûteuses, fabriquées dans un mélange de plomb et d’étain, facile à travailler. Elles témoignent des cultes de saints locaux d’Île-de-France – comme à Saint-Maur-des-Fossés ou à la basilique Saint-Mathurin-de-Larchant –, de l’Orléanais ou de Picardie mais, en l’absence d’inscription, il est parfois difficile d’identifier les saints ou leurs attributs. On leur accordait des pouvoirs magiques et protecteurs. Leur dépôt dans les cours d’eau pour accompagner la formulation d’un vœu est constaté à Paris dans la Seine autour de Notre-Dame et à Saint-Denis, avec la découverte d’une série d’enseignes dans le Croult, la rivière qui traversait la ville. L’ensemble, daté entre le XIIe et le XVIIe siècle, témoigne des pratiques et des croyances populaires.
 
Texte du panneau didactique.
 
Panneau didactique
 
Statuette de sainte Agnès. Parmi ses nombreux attributs, c'est ici le port d'un agneau qui permet de l'identifier. Période médiévale. Musée Carnavalet - Histoire de Paris.
 
Gaine d’encrier, alliage de plomb, XVe-XVIe siècle. CC0 Paris Musées / Musée Carnavalet - Histoire de Paris.
Ensemble de dix cuillères. Alliage cuivreux, fer. Époques médiévales ou moderne (1492-1789). Dragage de la Seine au niveau du Pont Marie, Paris, 4e arr., 1875. Musée Carnavalet - Histoire de Paris.
Lot d'objets trouvés dans la Seine comprenant de nombreux robinets et chandeliers. Époque médiévale ou moderne.
1 - Déversoir. En mufle de lion ou de tête de chien. Musée Carnavalet - Histoire de Paris.
2 - Chandelier. Avec couvercle à charnière décoré d'oiseau, robinet de fontaine à tête d'animal. Musée Carnavalet - Histoire de Paris.
3 - Embouchure de pichet. Musée Carnavalet - Histoire de Paris.
4 - Cannelle ou robinet de tonneau ou de pressoir. Constituée de deux parties, elle permet de régler le passage du liquide. Musée Carnavalet - Histoire de Paris.
Scénographie
Les « plombs » de la Seine

Rassemblés par milliers dès le milieu du XIXe siècle par l’antiquaire Arthur Forgeais, les « plombs de la Seine » sont des petits objets issus des dragages du fleuve et des quais de l’île de la Cité. Dans cette collection figurent surtout des méreaux et des enseignes de pèlerinage, mais également des figurines religieuses, des badges politiques, des jouets miniatures, des encriers ou des reliquaires portatifs.
Les méreaux sont des jetons à multiples fonctions, des « bons pour » – des laissez-passer –, par exemple pour le péage à l’entrée des villes. Ce sont aussi des monnaies d’échange au sein de confréries religieuses (jetons de présence des chanoines) ou laïques (badges de corporations de métiers et de groupes politiques). Les méreaux sont décorés de symboles ou d’armoiries, souvent de scènes religieuses, mais également d’animaux fantastiques ou de motifs sexuels.
 
Texte du panneau didactique.
 
Enseigne de pèlerinage à l’effigie de saint Christophe portant Jésus, XIIIe-XVIe siècle. CC0 Paris Musées / Musée Carnavalet - Histoire de Paris.
Méreaux, plombs et enseignes de pèlerinage.
 
Panneau destiné au jeune public.
 
Panneau destiné au jeune public.
Des armes dans l'eau, offrandes ou tactiques

Les collections archéologiques du musée Carnavalet - Histoire de Paris recèlent de nombreuses armes provenant du lit de la Seine. Leur quantité, plus d’une centaine, interroge les archéologues. La question n’est pas spécifiquement parisienne, et sur l’ensemble du cours du fleuve, particulièrement en Normandie, les dragages ou travaux de curage du fond du fleuve ont fourni presqu’exclusivement des épées, poignards, haches et fers de lance, intactes bien que très corrodées. Les dépôts les plus importants sont datés de l’Âge du Bronze et du haut Moyen Âge. Certains de ces objets immergés, sans contexte, sont interprétés comme des dépôts intentionnels et rituels liés aux combats. Après la bataille, l’armement du vainqueur ou du vaincu est confié en offrande à l’eau, surtout lorsque le fleuve s’inscrit dans une géographie religieuse des territoires. Ainsi certains récits de la bataille de Roncevaux, en 778, rapportent que l’épée de Roland est noyée dans un ruisseau marécageux, coulée dans une rivière, ou jetée dans un lac par Charlemagne lui-même. L’épée sanctuarisée par l’eau ne sera plus utilisée.
 
Texte du panneau didactique.
 
Hache de guerre ou francisque à double lame en fer. Période mérovingienne, haut Moyen Âge. CC0 Paris Musées / Musée Carnavalet - Histoire de Paris.
 
De l'âge du Bronze au haut Moyen Âge

L’âge du Bronze (−2200/−800), première période de la Protohistoire est définie par des avancées technologiques comme la métallurgie et l’usage du bronze, alliage de cuivre et d’étain. Les armes comprennent principalement des haches et des épées. La hache est un outil produit en série pour tailler ou fendre le bois, et aussi une arme de combat. Les formes évoluent et se diversifient – hache à rebords latéraux, à talon, ou à douille. La découverte du bronze, facilement malléable et résistant à l’usure, a permis l’invention de l’épée. De nombreux spécimens ont été collectés dans la Seine au niveau du pont Saint-Michel.
L’équipement du guerrier mérovingien comprend des lances, des scramasaxes, des épées et des haches d’armes. Le scramasaxe, coutelas à un seul tranchant, est l’arme la plus répandue au VIIe siècle en Europe occidentale. Les haches d’armes, bien que très lourdes, peuvent être projetées sur plus de dix mètres. L’utilisation mais aussi la taille et la forme – en flamme, en losanges, ovales ou barbelées – des pointes de lance sont très variées.
Lance à ailerons en fer. Période mérovingienne. CC0 Paris Musées / Musée Carnavalet - Histoire de Paris.
 
Texte du panneau didactique.
Scénographie
Armes perdues et cachées

Les armes des XIXe et XXe siècles trouvées dans la Seine ont une tout autre signification, tels la perte accidentelle ou l’abandon volontaire, les cours d’eau étant fréquemment utilisés comme dépotoirs. Obus, pistolets, casques des Première et Seconde guerres mondiales sont tombés, ou ont été dissimulés, conséquence d’un combat sur un pont ou sur les berges. Pendant le conflit de la Commune ou la Seconde Guerre mondiale, beaucoup d’insurgés ou de résistants ont caché leurs armes et leurs équipements dans les puits ou les cours d’eau, peut-être au moment où ils allaient être faits prisonniers. En 2022, cent cinquante-quatre obus de 1939-1945 ont été récupérés au niveau du pont d’Austerlitz par la brigade fluviale et les démineurs du laboratoire central de la Préfecture de police.
 
Texte du panneau didactique.
 
Petit pistolet de poche jeté dans la Seine avec son étui à fermoir métallique. Au milieu du XIXe siècle, les pistolets miniatures deviennent des accessoires courants à porter sur soi au même titre qu'une montre ou un portefeuille. Drac d'Île-de-France, service régional de l'archéologie, conservé par la brigade fluviale de Paris.
 
Scénographie
 
Scénographie
 
Panneau sur la corrosion des métaux en eau douce.
 
Exemple d'oxydation d'un objet en fer. Paris, Musée Carnavalet - Histoire de Paris.
 
Exemple d'un obus issu de la Seine, entouré de concrétions dues au dépôt de sédiments fluviatiles. Drac d'Île-de-France, service régional de l'archéologie, conservé par la brigade fluviale de Paris.
 
Le même obus dégagé de sa gangue de roche. Drac d'Île-de-France, service régional de l'archéologie, conservé par la brigade fluviale de Paris.


4 - LA SEINE AUJOURD'HUI

Scénographie
Trouvailles en plongée

Au cours de leur surveillance, les plongeurs de la brigade fluviale de Paris collectent divers objets, des oeuvres d’art et des éléments de décors des ponts. Parmi ceux-ci, une sculpture retrouvée au pied du Pont-Neuf en 2014, rapidement identifiée comme un mascaron – décor en forme de masque – ou, en 2022, un candélabre du pont Alexandre III. Bien que, en plongée dans la Seine, la visibilité s’estompe très vite – au-delà d’un mètre cinquante –, d’autres trouvailles hétéroclites sont parfois remontées du fond. « En amont en aval toujours la même manivelle des fortunes de pinard de charbon et de blé qui remontent et descendent le fleuve en suivant le cours de la Bourse des fortunes de bouteilles et de verre brisé des trésors de ferraille rouillée de vieux lits-cages abandonnés ré-cu-pé-rés » (Jacques Prévert, La Seine a rencontré Paris).
 
Texte du panneau didactique.
 
Mascaron retrouvé en novembre 2014 dans la Seine, au pied du Pont-Neuf, par les plongeurs de la Brigade fluviale de Paris. © Brigade fluviale de Paris / DRAC d’Ile-de-France, Service régional de l’archéologie.
 
Surveiller la Seine dans Paris

La brigade fluviale est créée par le préfet de police Louis Lépine au moment de l’Exposition universelle de 1900. L’événement se déroule principalement sur des sites en bordure de Seine – Champ-de-Mars, Invalides et Trocadéro –, mais aussi sur les berges des deux rives, entre les ponts d’Iéna et Alexandre III. L’objectif est alors d’assurer la sécurité des dizaines de millions de visiteurs, car beaucoup circulent en bateau. La sûreté est également en jeu, car ce grand rassemblement attire de nombreux voleurs en quête de victimes. Aujourd’hui, la brigade supervise la sécurisation des biens et des personnes, les missions de police technique et scientifique et contrôle la navigation sur la Seine dans sa partie parisienne. Elle y est aussi réglementée que la circulation en ville, et l’article 5.2 du règlement des berges interdit, notamment, de jeter «tout liquide ou solide de quelque nature que ce soit», pour préserver l’environnement.
Mascaron du Pont-Neuf.
Retrouvé en novembre 2014 au fond de la Seine, il appartenait au décor du Pont-Neuf, qui en comptait trois cent quatre-vingt-un lors de sa construction, en 1578. Figure grotesque de divinités champêtres comme les satyres, le mascaron est renommé pour son pouvoir protecteur et orne de nombreuses façades parisiennes aux XVIe et XVIIe siècles. Identifié par comparaison avec d'autres sculptures du pont, il a sans doute été supprimé en raison de son mauvais état, et un séjour prolongé dans l'eau a accentué sa dégradation. Une prochaine étude déterminera s'il s'agit d'un original du XVIe siècle ou d'une autre copie du XIXe siècle.
 
Texte du panneau didactique.
Thomas Pesquet. Paris sous le soleil, 25 avril 2021. © ESA/NASA – T. Pesquet.

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Tête de statue en marbre, XXe siècle. Brigade fluviale / DRAC d’Ile-de-France, service régional de L’archéologie. © Marc Lelièvre / Ville de Paris.
 
Tête de statue. Marbre blanc.

Joana Hadjithomas & Khalil Joreige. Time Capsules: Crypte archéologique de l'île de la Cité. Parvis de Notre-Dame de Paris, 2024. Du projet Unconformities / Discordances (2017-en cours).
Recomposition d'éléments issus de forages, résine expérimentale et tube en Perspex.
Carottage: Bureau Sols Consultant. Archéologues: Julien Avinain et Sylvie Robin. Production résine: Factum Arte. Remerciements: Tara El Khoury Mikhael, Fondation Emerige.
Dans Time Capsules, une installation tirée de leur projet en cours Unconformities / Discordances, les artistes Joana Hadjithomas et Khalil Joreige récupèrent, avant qu'ils ne soient détruits, des carottages extraits de forages d'exploration des sous-sols pour en prélever des échantillons et les étudier. Avec l'aide d'archéologues, de géologues et d'historiens, ils sculptent ces sédimentations pour raconter l'histoire enfouie des villes. Ils les rendent visibles en les fixant dans une résine expérimentale qui permet de révéler les détails de vestiges ainsi que les narrations possibles de ces lieux.

 
Les Time Capsules de la Crypte archéologique de l'île de la Cité racontent l'histoire naturelle et humaine du site et en montrent la complexité. L'Histoire n'apparaît pas toujours comme une stratification linéaire mais comme des actions qui perturbent la succession chronologique et juxtaposent des fragments d'époques parfois éloignées dans le temps. C'est un palimpseste vertigineux montrant les cycles constants de désastres et de régénérations, propres aux civilisations présentes et passées, chacune utilisant à nouveau des ruines de la précédente.
Dans Unconformities / Discordances, les recompositions poétiques des artistes interrogent la construction d'imaginaires ainsi que la représentation d'histoires fluctuantes et erratiques reflétant l'impact des actions humaines sur l'environnement et la planète. Ce que nous laissons derrière nous.


5 - LA CRYPTE ARCHÉOLOGIQUE DE L'ÎLE DE LA CITÉ

La première fortification de Paris. Ces imposants blocs de pierre forment le soubassement du rempart édifié au IVe siècle. Ils ont été récupérés sur les monuments de la rive gauche de Lutèce - nom antique de Paris. Ils ont gardé des traces de leur précédent usage, comme des marques d'outils et des lettres d'anciennes inscriptions.
De Lutèce à Paris

Le parcours archéologique met principalement en lumière les vestiges de la fin de l'Antiquité. Au IVe siècle, Lutèce, fondée vers la fin de la conquête romaine est encore une cité de taille moyenne, Après deux siècles de stabilité politique et économique, la ville subit de profondes modifications au moment où l'Empire est menacé par les Germains, les Francs et les Alamans, des peuples appelés «barbares» en raison de leurs cultures et de leurs langues différentes.
De nombreux quartiers de la rive gauche de la Seine sont abandonnés, l'aqueduc ne fonctionne plus et les carrières ne sont plus exploitées, Les grands monuments emblématiques de la romanité (forum, amphithéâtre, thermes) sont désaffectés et démantelés pour fournir en matériaux le grand chantier de l'île de la Cité qui devient le cœur do la ville. Le changement de nom de Lutèce en Paris - en référence au territoire gaulois d'avant la conquête romaine - s'opère progressivement au cours du IVe siècle.
 
Texte du panneau didactique.
 
L'Hôtel-Dieu
Le plus vieil hôpital parisien est construit au cœur de l'île de la Cité, au milieu du VIIe siècle. La crypte archéologique conserve des vestiges de ce premier Hôtel-Dieu: un pilier de fondation de la grille du jardin de l’ancien édifice. Au XIXe siècle, l'hôpital est déplacé au nord de l'île pour répondre aux besoins des malades.
L’hospice des Enfants-Trouvés.
Ce long mur appartient à l’ancien hospice des Enfants-Trouvés, premier orphelinat parisien construit par l'architecte Germain Boffrand entre 1746 et 1750, à la demande du roi Louis XV. L'édifice est détruit en 1877 pour agrandir le parvis de la cathédrale.
Scénographie et quai romain.
Un quai romain du premier port de Paris

Vous êtes à l'emplacement de la berge antique de la Seine, en retrait de 55 mètres par rapport au quai actuel. Avant la conquête romaine, le site naturel est très différent du paysage d'aujourd'hui: les monceaux des rives et les îles du fleuve forment un chapelet d'îlots séparés par des bras d’eau peu profonds. La Seine est alors considérée comme un cours d’eau calme, mais ses débordements fréquents transforment les deux rives en de vastes marécages. Afin de les franchir et de traverser, les ingénieurs et militaires romains ont choisi ce site pour y créer un gué.
On voit encore ici le premier quai du port, construit au début du Ier siècle de notre ère sur le petit bras de la Seine. Les traces d'une pêcherie ont également été retrouvées. Marchandises et denrées arrivent dans la ville par voie d'eau ou sont acheminées par la rue principale, le cardo maximus, qui descend directement vers le port. Elles sont stockées dans les entrepôts de l'île.
 
Texte du panneau didactique.
 
Jean-Claude Golvin. L'Île de la Cité au IVe siècle, depuis le sud: la zone portuaire. Aquarelle, 2010.
 
La Seine et les Nautes

La Seine est une voie navigable dès la fin de l'indépendance gauloise. Les navires de commerce disposent de ports fluviaux à Melodunum (Melun) et à Lutèce. Dans La Guerre des Gaules, César évoque cinquante navires récupérés dans ce premier port et de multiples barques dans le second. Ce sont des bateaux à rames ou des chalands à fond plat équipés d’un mât, avançant à la voile ou par halage depuis la rive.
Selon la législation romaine, les fleuves, leurs rives et les ports sont affectés à l’usage commun; chacun peut y pêcher et y circuler en bateau mais sous la surveillance des bateliers ou mariniers de la Seine, les nautes. Ces derniers sont responsables de la navigation et du commerce fluvial en amont et en aval de Lutèce, sur les deux rives du fleuve et sur ses affluents. Ils contrôlent aussi les transports terrestres entre les rivières. Ils ont, par délégation du pouvoir impérial, la charge de l’approvisionnement en blé et du transport du vin, ce qui en fait une corporation riche et influente dans la vie politique et économique de la cité.
Laurent Renou. Maquette du pilier des Nautes, plâtre, PM121, 1984.
 
Texte du panneau didactique.
Le port antique. Premier quai du port de Lutèce, construit au début du Ier siècle de notre ère, sur le petit bras de la Seine.
Ce mur est le seul vestige du port antique, aménagé après la colonisation de Lutèce par les Romains. Son emplacement actuel révèle que la surface de l’île était plus réduite. Les bateaux y accostaient pour décharger ou embarquer des marchandises.