CRANACH ET SON TEMPS
Article
publié dans la Lettre n° 325
le
11 avril 2011
CRANACH ET SON TEMPS. Pour ceux qui
n’ont pas pu admirer l’exposition homonyme au Palais des Beaux-Arts
de Bruxelles (article
sur notre site Internet avec la Lettre 319), c’est l’occasion
de voir une cinquantaine d’œuvres parmi les quelque cent cinquante
qui étaient exposées en Belgique, ainsi qu’une trentaine d’autres,
essentiellement des gravures, spécifiques à cette exposition.
Le Musée du Luxembourg vient d’être rénové. A part la queue dans
la rue qui a disparu (elle est maintenant dans le jardin) et la
cafétéria dans la cour qui a été démontée, les changements les plus
visibles portent sur l’aménagement de l’accueil. La rénovation concerne
surtout la sécurité. Quant à la surface des salles d’exposition,
elle n’a évidemment pas changé! Cela explique le choix d’un nombre
d’œuvres relativement limité et surtout de plus petites tailles.
Comme à Bruxelles, l’exposition confronte les œuvres de Lucas Cranach
(1472-1553) à celles de ses contemporains. Le parcours de l’exposition
se déroule en six étapes. Dans la première salle nous voyons le
magnifique Autoportrait de 1531, quand l’artiste allemand
était au faîte de sa gloire et plusieurs Crucifixions dont
une gravure de Dürer (1471-1528), l’autre grand maître de la Renaissance
allemande. Dans la deuxième salle sont exposés de nombreux portraits,
comme ceux de Frédéric le Sage, protecteur de Lucas Cranach
à Wittenberg, la capitale de la Saxe, où le peintre séjourna près
de cinquante ans, ainsi que diverses scènes religieuses parmi lesquelles
se détachent l’impressionnant Martyre de sainte Catherine
(vers 1508) et les deux volets de bois avec des scènes de la
vie de la Vierge Marie (vers 1510). Ces sujets se retrouvent
dans la salle suivante avec, en particulier, La Vierge allaitant
l’enfant (1515) confronté à des œuvres analogues de Quinten
Metsys et de Dürer et surtout le sujet de Lucrèce traité
par quatre artistes, dont Lucas Cranach Le Jeune, l’un des fils
de Lucas Cranach l’Ancien, qui reprit l’atelier de son père à partir
de la captivité de celui-ci, en 1550.
Nous entrons ensuite dans la salle des nus, sujet qui assura la
renommée de Cranach, qui s’entoura dans son atelier d’une très grande
équipe de peintres pour satisfaire les demandes. Les sujets sont
aussi bien empruntés à la religion, comme les nombreux Adam et
Eve, qu’à la mythologie comme l’Allégorie de la Justice
(1537) ou La Nymphe à la source (après 1537) dont on peut
admirer la subtilité des drapés transparents. En revanche, il n’y
a aucun tableau pour montrer l’un des apports de Cranach à la peinture
de son temps de ce coté des Alpes, les représentations des personnages
grandeur nature.
Après ce thème majeur mais peu illustré, la cinquième salle nous
montre l’influence de Martin Luther sur Cranach. Ce dernier, qui
publiera à ses frais dans son imprimerie la traduction du Nouveau
Testament par Luther, a toujours soutenu son ami, malgré la position
critique de celui-ci à l’égard des images, entraînant une diminution
des commandes de tableaux religieux ! Pour illustrer cet épisode
important dans la vie de Cranach, nous avons plusieurs Portraits
de Martin Luther et des œuvres traitant de La Loi et la Grâce,
de La Charité ou encore de La Mélancolie (1532), dont
on peut voir aussi une gravure de Dürer (1514). Cranach s’adaptait
ainsi à la Réforme avec des sujets à caractère didactique.
La dernière salle présente deux magnifiques tableaux, Hercule
chez Omphale (1537) et La Bouche de la Vérité (vers 1525-1530),
qui évoque la ruse d’une femme qui a trompé son mari, et surtout
plusieurs tableaux montrant comment Cranach travaillait. Ainsi,
avec le même visage féminin, il nous représente aussi bien un Portrait
idéalisé de jeune femme (1530), que Salomé tenant la tête
de saint Jean-Baptiste (vers 1526-1530) ou encore la femme dans
Les Amants mal assortis : Vieil Homme et Jeune femme (1522).
Ce n’était pas du travail en série mais cela y ressemblait fort
et, comme son fils Lucas Cranach le Jeune était imprégné du style
de son père, l’attribution de certaines œuvres est un véritable
casse-tête. Au final, cette exposition nous donne un bon aperçu
de l’œuvre de cet artiste majeur de la Renaissance allemande. Musée
du Luxembourg 6e. Jusqu’au 23 mai 2011. Pour
voir notre sélection de visuels, cliquez ici. Lien
: www.museeduluxembourg.fr.
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