Parcours en images de l'exposition

BERTHE MORISOT
(1841-1895)

avec des visuels mis à la disposition de la presse,
et nos propres prises de vue

Parcours accompagnant l'article publié dans la Lettre n°483 du 10 juillet 2019




1 - Peindre la vie moderne

 
Pour la première fois depuis son ouverture en 1986, le musée d’Orsay consacre une exposition à l’une des figures majeures de l’impressionnisme, Berthe Morisot (1841-1895). C’est aussi la première manifestation monographique dédiée à cette artiste par un musée national depuis la rétrospective organisée en 1941 au musée de l’Orangerie.
Née dans un milieu que son ami Renoir qualifiait d’« austèrement bourgeois », mais ouvert aux arts, Berthe Morisot affiche très tôt un goût de l’indépendance que reflètent sa carrière, au coeur des avant-gardes, et sa peinture, une des écritures les plus novatrices de l’impressionnisme.
Figure centrale du mouvement, elle participe à toutes les expositions du groupe, sauf celle de 1879. Elle travaille jusqu’à sa mort prématurée en 1895, laissant un ensemble d’un peu plus de quatre cents tableaux.
Cette exposition veut marquer une nouvelle étape dans la diffusion et la connaissance de Morisot en proposant et en suscitant de nouvelles approches, tout en déjouant les clichés d’une peinture « féminine » encore attachés à son oeuvre. L’exposition se concentre sur une facette essentielle de sa création : les tableaux de figures et les portraits.
Pour Morisot, portraits et tableaux de figures sont autant de scènes de la vie moderne. Elles se caractérisent par ce que la grande historienne de l’art, récemment disparue, Linda Nochlin, appelait de « stimulantes ambiguïtés ». Elles s’expriment tant du point de vue des modèles que des espaces mis en jeu et en scène, et d’une technique audacieuse et énergique, qui vise à suggérer plutôt qu’à décrire.
Près de la moitié des tableaux réunis ici sont issus de collections particulières et certains n’ont pas été vus en France depuis plus de cent ans. Le parcours, chronologique et thématique, invite à s’interroger sur les sujets représentés (la mode, la toilette, le travail), qui traduisent en effet le statut de la femme au XIXe siècle, mais aussi sur la technique unique de Morisot (le plein air, l’intérieur, l’importance des espaces intermédiaires tels les fenêtres, le fini). Ses tableaux sont une exploration de l’identité moderne que Morisot peint comme un équilibre fragile, sur un mode à la fois paisible et intranquille, lumineux et mystérieux, exigeant et poétique.

Entrée de l'exposition (début)
 
Texte du panneau didactique
Scénographie
« Je n’obtiendrai [mon indépendance] qu’à force de persévérance et en manifestant très ouvertement l’intention de m’émanciper », écrit Berthe Morisot en 1871. Pour une femme de son milieu, cette émancipation commence par l’affirmation publique de son ambition de peintre professionnelle. Elle participe ainsi au Salon, exposition officielle alors annuelle, à partir de 1864. Surtout, à l’invitation d’Edgar Degas, mais contre l’avis de ses amis Édouard Manet et Pierre Puvis de Chavannes, elle décide de présenter des oeuvres à ce qui deviendra la première exposition impressionniste en 1874.
La première moitié des années 1870 est décisive. Morisot accorde alors à la figure une place centrale dans son oeuvre. Sa soeur et compagne de peinture, Edma, en est le modèle de prédilection. Elle pose aussi bien en extérieur qu’en intérieur. Il s’agit pour Berthe Morisot de peindre le monde qui l’environne tel qu’il est. En 1876, dans un texte qui passe pour le manifeste de l’impressionnisme, le romancier et critique Edmond Duranty place au centre de ce qu’il définit comme « la nouvelle peinture » la représentation de la figure moderne dans un intérieur : « Notre existence se passe dans les chambres ou dans la rue », écrit-il.
C’est ainsi que la sphère domestique, qui relevait de la scène de genre, inférieure et méprisée, et constituait un sujet et un espace assignés aux femmes, est investie par les impressionnistes, en particulier Degas, Caillebotte, Cassatt, Morisot, Renoir et Monet au début de sa carrière.
Chez Morisot, les personnages à la fois présents et absorbés dans leur rêverie confèrent une silencieuse poésie et une part de mystère à ces scènes de la vie moderne.

 
Texte du panneau didactique
 
Edma Pontillon, née Morisot (1839-1921). Berthe Morisot, vers 1865. Huile sur toile, 100 x 71 cm.  Collection particulière.
 
Berthe Morisot (1841-1895).  La Lecture (L’ombrelle verte), 1873. Huile sur toile, 46 x 71,8 cm. Cleveland Museum of Art, don du Hanna Fund, 1950.89. Photo © The Cleveland Museum of Art.
 
Berthe Morisot (1841-1895)Les Soeurs, dit aussi Deux soeurs sur un canapé, 1869. Huile sur toile, 52,1 × 81,3 cm. Washington DC, National Gallery of Art, Inv. 1952.9.2.
Berthe Morisot (1841-1895).  Intérieur, 1872. Huile sur toile, 60 x 73 cm. Collection particulière. © Collection particulière. Droits réservés.
 
Berthe Morisot (1841-1895).  Le Berceau, 1872. Huile sur toile, 56 x 46.5 cm. Paris, musée d’Orsay, acquis en 1930, RF 2849. Photo © RMN-Grand Palais (Musée d’Orsay) / Michel Urtado.
 
Berthe Morisot (1841-1895).  Jeune femme à sa fenêtre (Portrait de Mme Pontillon), 1869. Huile sur toile, 54,8 x 46,3 cm. Washington, National Gallery of Art, legs de Mme Ailsa Mellon Bruce, 1970, n° inv. 1970.17.47. © Image courtesy National Gallery of Art, Washington, DC.
 
Berthe Morisot (1841-1895).  Portrait de Mme E.[dma] P.[ontillon], 1871. Pastel sur papier, 81,5 x 65,8 cm. Paris, musée d’Orsay, legs de Madame Pontillon, 1921, RF 5262. Photo © RMN-Grand Palais (Musée d’Orsay) / Adrien Didierjean.
 

Berthe Morisot (1841-1895)Cache-cache, 1873. Huile sur toile, 46,3 × 55,2 cm. S.b.d. : Berthe Morisot. From an American Friend of the musée d’Orsay.



2 - « Mettre une figure en plein air »



Scénographie
« Il y a beaucoup de lumière et de soleil. Il cherche ce que nous avons si souvent cherché : mettre une figure en plein air […] », s’enthousiasme Morisot après avoir admiré un tableau de Bazille en 1869. Elle a très tôt intégré à sa formation le travail en extérieur. Outil de connaissance de la nature, le plein air fait certes partie du cursus académique depuis la fin du XVIIIe siècle ainsi que de la pratique féminine en amateur ou professionnelle. À partir du milieu du XIXe siècle, les peintres y voient l’opportunité d’un regard neuf sur la nature, propice à la transcription d’une impression immédiate et libérée des routines académiques. Dans les années 1870, Morisot multiplie ainsi les figures prises sur le motif, évoluant dans les espaces auxquels une femme de son milieu a accès : Paris depuis la colline du Trocadéro, où se situe le domicile familial, les stations balnéaires des Petites Dalles ou de Fécamp, les jardins privés ou publics.
Le plein air est indissociable chez Morisot de la représentation de la vie moderne. Ces scènes bourgeoises du XIXe siècle reflètent certes le quotidien de l’artiste, mais elles constituent tout autant des terrains d’expérimentations plastiques privilégiés. La facture est nerveuse ; le pinceau, graphique, met en place les principaux repères et les personnages, parfois simplifiés à l’extrême et réduits à quelques touches schématiques de couleurs. Mettant l’artiste au défi avec ses incessantes variations, la lumière extérieure contraint à une exécution rapide, synthétique, économe de ses moyens, une « impression », pour être toujours en phase avec un motif fugace. Néanmoins, Morisot a certainement terminé dans l’atelier des tableaux commencés en extérieur.

 
Texte du panneau didactique
 
Berthe Morisot (1841-1895)Vue du petit port de Lorient, dit aussi Marine, 1869. Huile sur toile, 43,5 × 73 cm. S.b.m : B. Morisot. Washington DC, National Gallery of Art, Inv. 1970.17.48.
 
Berthe Morisot (1841-1895)Marine, dit aussi Le Port de Cherbourg, 1871. Huile sur toile, 41,91 × 56,2 cm. New Haven, Yale University Art Gallery, Inv. 2012.30.3.
 
Berthe Morisot (1841-1895)Marine en Angleterre, 1875. Huile sur toile, 43,8 × 64,8 cm. Timbre de la signature b.g. Collection particulière européenne.
Berthe Morisot (1841-1895)Dans les blés, 1875. Huile sur toile, 46,5 × 69 cm. S.b.g. : Berthe Morisot.
Paris, musée d’Orsay, Inv. RF 1937 45.
 
Berthe Morisot (1841-1895).  Femme et enfant au balcon, 1871-1872. Huile sur toile, 61 x 50 cm. Tokyo, Bridgestone Museum of Art, Ishibashi Foundation, Gaiyo 268. © Tokyo Fuji Art Museum / Bridgeman Images / Service presse.
 
Berthe Morisot (1841-1895).  La Terrasse, 1874. Huile sur toile, 45 x 54 cm. Tokyo, Tokyo Fuji Art Museum. © 2017 Christie’s Images Limited.
 
Berthe Morisot (1841-1895).  Femme et enfants sur le gazon (Les lilas à Maurecourt), 1874. Huile sur toile, 50 x 61 cm. Paris, collection particulière. © Private Collection / Bridgeman Images / Service presse.
 
Berthe Morisot (1841-1895)Sur l’herbe, dit aussi Sur la pelouse ou Dans un parc, vers 1874. Pastel sur papier contrecollé sur carton, 71 × 89 cm. S.b.d. : Berthe Morisot. Paris, Petit Palais, musée des Beaux-arts de la Ville de Paris, Inv. PPP746.
 
Berthe Morisot (1841-1895).  En Angleterre (Eugène Manet à l’île de Wight), 1875. Huile sur toile, 38 x 46 cm. Paris, musée Marmottan-Claude Monet, Fondation Denis et Annie Rouart, legs Annie Rouart, 1993, n° inv. 6029. © Musée Marmottan Monet, Paris / The Bridgeman Art Library / Service presse.
 
Berthe Morisot (1841-1895).  La Chasse aux papillons, 1874. Huile sur toile, 46 x 56 cm. Paris, musée d’Orsay, donation Etienne Moreau-Nélaton, 1906, RF 1681. CMR 36. Photo © Musée d’Orsay, Dist. RMN-Grand Palais / Patrice Schmidt.


3 - Femmes à leur toilette



Scénographie
Entre 1876 et 1894, Berthe Morisot exécute une vingtaine de scènes de toilette. Ces tableaux enregistrent la privatisation de moments qui, avant le XIXe siècle, ont été publics ou partagés. Les activités auxquelles se livrent ici les modèles – des professionnelles – sont variées. La toilette féminine au XIXe siècle est liée à de multiples codes vestimentaires. Ce qui intéresse Morisot semble bien la fabrication de l’intime, plutôt que le portrait, la description ou la chronique sociales. Les modèles sont ainsi représentés dans la tenue la plus privée qui soit, telle la chemise, qui se porte à même la peau, formant la toute première strate du vêtement féminin, et que les femmes convenables n’étaient pas censées révéler à leur époux. Sauf pour Nu de dos, entre 1876 et 1883, c’est la chambre même de l’artiste qui est représentée. Cette peinture de l’intimité chez Morisot, qui met en scène son propre cadre de vie privé, a eu un destin public. Morisot a exposé deux tableaux sur le sujet à l’exposition impressionniste de 1876, introduisant la première ce thème dans les expositions du groupe. Elle continuera à en exposer et à en vendre par la suite.

 
Texte du panneau didactique
 
Berthe Morisot (1841-1895).  Femme à sa Toilette, 1875-1880. Huile sur toile, 60,3 x 80,4 cm. Chicago, Art Institute of Chicago, Stickney Fund, 1924, n° inv. 1924.127. © Image Art Institute of Chicago.
 
Berthe Morisot (1841-1895).  Jeune femme se poudrant, 1877. Huile sur toile, 46 x 39 cm. Paris, musée d’Orsay, legs Antonin Personnaz, 1937, RF 1937 44. Photo © Musée d’Orsay, Dist. RMN-Grand Palais / Patrice Schmidt.
 
Berthe Morisot (1841-1895).  La Psyché, 1876. Huile sur toile, 64 x 54 cm. Madrid, Museo Nacional Thyssen-Bornemisza, n° inv. 686 (1977.87). © Museo Thyssen-Bornemisza, Madrid.
 
Berthe Morisot (1841-1895)Nu de dos, 1885. Huile sur toile, 55,2 × 46 cm. Collection particulière.
 
Berthe Morisot (1841-1895)Devant la psyché, 1890. Huile sur toile, 55 × 46 cm. S.b.d. : B. Morisot. Martigny (Suisse), collection Fondation Pierre Gianadda.


4 - Le « beauté de l'être en toilette »



Scénographie
Le poète Jules Laforgue célébrait ainsi les ressources du costume contemporain pour les artistes :
« Cette beauté de l’être en toilette, cela avec nos visages si expressifs, n’est-il pas aussi intéressant, aussi solide, aussi humain, aussi naturel que le nu grec ? » Pour les impressionnistes, la mode et le vêtement moderne sont des éléments essentiels de la « nouvelle peinture ». La mode des tableaux de Morisot n’est pas celle des grands couturiers : elle dépeint les robes élégantes, adaptées par des couturières ou des magasins de prêt-à-porter, pour des jeunes femmes de la grande bourgeoisie parisienne, qui, comme l’artiste, ne font peut-être pas la mode, mais la suivent.
À la fin des années 1870 et au début des années 1880, le cadrage se resserre sur les modèles, la figure conquiert une ampleur inédite et devient le sujet principal du tableau. L’identité de ces modèles professionnels – Morisot ne puise plus dans le cercle familial et amical – nous est inconnue, ajoutant au mystère de ces jeunes femmes. De même, les robes y sont plus suggérées que décrites. Les cols, jabots, fleurs, accessoires, étoffes ou fourrures des toilettes modernes sont autant de prétextes à déployer une touche nerveuse et allusive, coups de pinceau rapides, lignes brisées, grattages et reprises, en somme une technique qui est le contraire de la grâce induite par le sujet représenté.
Ces figures en buste forment comme une suite dans l’oeuvre de Morisot qui les présente aux expositions impressionnistes, où elles remportent l’adhésion critique. C’est avec l’une d’elles, Jeune Femme en toilette de bal, que l’artiste fait de son vivant son entrée au musée.
 
Texte du panneau didactique
 
Berthe Morisot (1841-1895).  Été, dit aussi Jeune femme près d’une fenêtre, 1879. Huile sur toile, 76 × 61 cm. Montpellier Méditerranée Métropole, musée Fabre, Inv. 07.5.1. © Photo Studio Thierry Jacob.
 
Berthe Morisot (1841-1895)Jeune fille au chien, 1887. Huile sur toile, 78,8 × 60,1 cm. Collection particulière.
 
Berthe Morisot (1841-1895).  Hiver, 1880 Huile sur toile, 73.5 x 58.5 cm. Dallas Museum of Art, don de la Fondation Meadows Incorporated, 1981, n° inv. 1981.129. © Photo Dallas Museum of Art.
Scénographie
 
Berthe Morisot (1841-1895)Figure de femme, dit aussi Femme en noir ou Avant le théâtre, 1875. Huile sur toile, 57,3 × 30,7 cm. S.b.d. : Berthe Morisot. Tokyo, The National Museum of Western Art, Inv. P. 2017-0002.
 
Berthe Morisot (1841-1895).  Jeune femme en toilette de bal, 1879. Huile sur toile, 71 x 54 cm. Paris, musée d’Orsay, RF 843. Photo © RMN-Grand Palais (Musée d’Orsay) / Hervé Lewandowski.


5 - Fini / non fini : « Fixer quelque chose de ce qui passe »



Scénographie
La question du fini traverse l’entière production de Berthe Morisot et, plus généralement, se situe au coeur des débats sur l’impressionnisme. Morisot est certainement l’artiste qui mène à cet égard les expérimentations les plus radicales, en particulier à partir de la fin des années 1870, tant dans les scènes de plein air que d’intérieur. La recherche d’un effet d’instantanéité la conduit alors à adopter une touche de plus en plus rapide et esquissée, fusionnant figure et fond dans un all-over privé de repères spatiaux. En extérieur, la végétation, parfois l’eau, envahit l’arrière-plan ; le ciel disparaît durablement.
Selon un procédé cher à Morisot, les angles et parfois les pourtours de la toile ne sont que peu ou pas recouverts de peinture, la touche se fait toujours plus lâche dans les angles précisément, et c’est parfois la toile à nu, sans préparation, que l’artiste laisse apparente. Un journaliste la surnomme en 1880 « l’ange de l’inachevé ». Cette absence de fini n’est, dans le cas de Morisot et contrairement aux autres impressionnistes, pas toujours envisagée par la critique de l’époque comme un projet artistique, mais souvent comme le signe d’une timidité et d’une indécision toutes féminines. Pourtant, à y regarder vraiment, c’est moins l’incertitude que la détermination et l’autorité qui s’imposent. L’artiste s’affirme comme la seule à décider si un tableau est achevé ou non.
C’est que le « non-fini » est au coeur de la démarche artistique de Morisot et de sa vision du monde. La surface du tableau est mobile et énergique, jouant des effets de déséquilibre. Plus radicale encore, Morisot intègre au rendu final et exploite visuellement les traces de la mise en oeuvre et de la progression de son travail.
Tout se passe comme si cette technique, complexe et vigoureuse, assurée et personnelle, spontanée et maîtrisée, mettait en scène une course contre le temps, l’esthétique de l’« oeuvre en devenir » inscrivant une temporalité dans le monde immobile du tableau. L’impression de rapidité est aussi une tentative chez Morisot de refléter et d’endiguer la fuite du temps.

 
Texte du panneau didactique
 
Berthe Morisot (1841-1895).  Le lac du bois de Boulogne (Jour d’été), vers 1879. Huile sur toile, 45,7 x 75,2 cm. Londres, The National Gallery, legs de Sir Hugh Lane, 1917, NG3264. © National Gallery, London.
 
Berthe Morisot (1841-1895).  M.[onsieur] M.[anet] et sa fille dans le jardin à Bougival, 1881. Huile sur toile, 73 x 92 cm. Paris, musée Marmottan-Claude Monet, Fondation Denis et Annie Rouart, legs Annie Rouart, 1993, n°inv. 6018. © Musée Marmottan Monet, Paris / Bridgeman Images / Service Presse.
 
Berthe Morisot (1841-1895)Le Jardin de Maurecourt, 1884. Huile sur toile, 54 × 65,1 cm. S.b.g. : Berthe Morisot. Toledo, Toledo Museum of Art, Inv. 1930.
 
Berthe Morisot (1841-1895)La Jatte de lait, 1890. Huile sur toile, 55,5 × 56,5 cm. S.b.d. : B. Morisot. Collection particulière.
 
Berthe Morisot (1841-1895)Portrait de Mlle L.[ambert], dit aussi Isabelle au jardin, 1885. Huile sur toile, 100 × 81 cm. France, collection particulière.
Scénographie
 
Berthe Morisot (1841-1895).  Jeune fille à la poupée, 1884. Huile sur toile, 82 x 100 cm. Paris, collection particulière. © Photo: Christian Baraja.
 
Berthe Morisot (1841-1895)Au jardin, dit aussi Dames cueillant des fleurs ou Dans le bois de Boulogne, 1879. Huile sur toile, 61 × 73,5 cm. Stockholm, Nationalmuseum, Inv. NM 5525.
 
Berthe Morisot (1841-1895)La Barrière à Bougival, 1884. Huile sur toile, 54 × 64 cm. S.b.d. : Berthe Morisot. Collection particulière.
 
Berthe Morisot (1841-1895)La Leçon au jardin, 1886. Huile sur toile, 60,3 × 73 cm. Denver, Denver Art Museum, Inv. TL-32569.
Scénographie
 
Berthe Morisot (1841-1895)M.[onsieur] M.[anet] et sa fille, 1883. Huile sur toile, 60 × 73 cm. Collection particulière.
 
Berthe Morisot (1841-1895)Sur la plage, dit aussi Plage de Nice, 1882. Huile sur toile, 46,5 × 56 cm. Timbre de la signature b.g. États-Unis, collection particulière.
 
Berthe Morisot (1841-1895)Les Pâtés de sable, 1882. Huile sur toile, 92 × 73 cm. Boston, collection particulière.
 
Berthe Morisot (1841-1895)Sur le lac, dit aussi Petite fille au cygne, 1883. Huile sur toile, 65 × 54 cm. Collection particulière.


6 - Femmes au travail



Scénographie
Servantes, bonnes et nourrices sont des modèles de prédilection pour Morisot. Au coeur de la maison, elles sont aussi un autre indice de cette peinture de l’intime à l’oeuvre chez l’artiste. Ce travail silencieux et invisible, cantonné à la sphère privée, n’a pas la dimension politique ou naturaliste des représentations des mondes paysan, artisan et ouvrier qui abondent au Salon à partir des années 1880, mais Morisot leur donne dignité et poésie. Elle est la seule impressionniste, avec Cassatt et Pissarro, à représenter avec régularité les domestiques dans le quotidien de leurs tâches. Ainsi, si sa fille Julie, née en 1878, a grandi sous le pinceau tendre et empathique d’un parent artiste, comme les fils de son ami Renoir, Morisot la représente en compagnie des bonnes qui prennent soin d’elle. Dans ces peintures, la mère ne materne pas, elle peint des femmes au travail, par conséquent elle aussi travaille. L’oeuvre peint de Morisot n’est certes pas une critique de la maternité, mais elle montre en tout cas qu’elle n’est pas la seule voie d’accomplissement et la destinée unique d’une femme. Si elles font partie de son quotidien et de la peinture de la vie moderne, servantes, bonnes et nourrices sont aussi le miroir de l’artiste au travail, comme l’avait montré une grande historienne, Linda Nochlin. C’est ainsi que Morisot a tenu à se mettre en scène dans son magnifique Autoportrait, unique occurrence dans son oeuvre peint où elle se montre seule et, précisément, au travail.

 
Texte du panneau didactique
 
Berthe Morisot (1841-1895).  Autoportrait, 1885. Huile sur toile, 61 x 50 cm. Paris, Musée Marmottan-Claude Monet, fondation Denis et Annie Rouart, legs Annie Rouart, 1993, n°inv. 6022. © Musée Marmottan Monet, Paris / Bridgeman Images / Service Presse.
 
Berthe Morisot (1841-1895)La Nourrice, dit aussi Nourrice et bébé, vers 1880. Huile sur toile, 73 × 60 cm. Copenhague, Ny Carlsberg Glyptotek, Inv. MIN 2707.
 
Berthe Morisot (1841-1895)Dans la salle à manger, 1880. Huile sur toile, 91,8 × 73 cm. Timbre de la signature b.d. Collection particulière.
Berthe Morisot (1841-1895).  Blanchisseuse (Paysanne étendant du linge), 1881. Huile sur toile, 46 x 67 cm.
Copenhague, Ny Carlsberg Glyptotek, NCG MIN 2715. © Ny Carlsberg Glyptotek, Copenhagen.

 
Berthe Morisot (1841-1895)La Petite Servante, 1886. Huile sur toile, 71 × 44 cm. Londres, collection particulière.
 
Berthe Morisot (1841-1895)La Fable, 1883. Huile sur toile, 65 × 81 cm. Collection particulière.


7 - Fenêtres et seuils



Scénographie
À bien y regarder, les espaces dépeints par Berthe Morisot sont souvent des seuils, des espaces liminaires où l’intérieur est ouvert vers l’extérieur et en lien avec lui. Morisot affectionne les balcons, fenêtres, vérandas et jardins d’hiver, particulièrement mis à l’honneur par l’architecture domestique de la seconde moitié du XIXe siècle. Elle privilégie ces lieux de perméabilité entre extérieur et intérieur, indéterminés, à une époque où, précisément, les espaces se différencient sexuellement et se spécialisent au sein de la maison selon les usages et rituels sociaux.
De nombreux historiens y ont vu l’expression du cantonnement des femmes à la sphère domestique, l’accès à l’espace public étant limité pour les femmes « convenables » et la rue vue depuis le cocon protecteur de l’intérieur. Mais chez Morisot, et tout particulièrement dans la suite des tableaux de Bougival, intérieur et extérieur s’interpénètrent et se prolongent souvent. La végétation abondante du jardin semble envahir la pièce et transforme l’arrière-plan en une sorte de surface décorative.
Pour une impressionniste passionnée par les interactions du plein air et de la figure, fenêtres, vérandas ou jardins d’hiver offrent également une source de lumière naturelle filtrée et mieux maîtrisable qu’en extérieur.
Ces « seuils » sont propices à des mises en espace complexes, novatrices et poétiques où l’on perd ses repères. Par ces jeux de construction, l’artiste échappe aussi définitivement à la description et au récit.
Enfin, ces dispositifs spatiaux, ces fenêtres qui s’ouvrent vers l’extérieur et le « cadrent », introduisent autant de tableaux dans le tableau qui sont aussi des métaphores de l’acte de voir.

 
Texte du panneau didactique
 
Berthe Morisot (1841-1895)Enfant au tablier rouge, 1886. Huile sur toile, 60 × 49,9 cm. Providence, Museum of Art, Rhode Island School of Design, Inv. 2010.57.
 
Berthe Morisot (1841-1895)Dans la véranda, 1884. Huile sur toile, 81,2 × 100,2 cm. S.b.g. : Berthe Morisot. Monaco, collection particulière.
 
Berthe Morisot (1841-1895)La Lecture, 1888. Huile sur toile, 74,3 × 92,7 cm. S.b.d. : Berthe Morisot. St Petersburg (Florida), Museum of Fine arts, Inv. 1981.2.
Scénographie
 
Berthe Morisot (1841-1895)Fillette au chien (second fragment), 1886. Huile sur toile, 92 × 73 cm. Collection particulière.
 
Berthe Morisot (1841-1895)Sur le banc, dit aussi Jeune fille dans un parc, 1888-1893. Huile sur toile, 90 × 81 cm. Toulouse, musée des Augustins, Inv. RO 708.
 
Berthe Morisot (1841-1895).  À la campagne (Après le Déjeuner), 1881. Huile sur toile, 81 x 100 cm. Collection particulière. Photo © Christie’s Images / Bridgeman Images / Service presse.
 
Berthe Morisot (1841-1895)Jeune femme assise sur un sofa, vers 1879. Huile sur toile, 80,6 × 99,7 cm. S.b.g. : Berthe Morisot. New York, The Metropolitan Museum of Art, Inv. 1992.103.2.


8 - Un atelier à soi



Scénographie
Le titre de cette section renvoie à un texte de la romancière anglaise Virginia Woolf qui soulignait l’importance d’« une chambre à soi si [une femme] veut écrire une œuvre de fiction ». Si Berthe Morisot n’a pas toujours eu un atelier à proprement parler, elle a pu se ménager des espaces de création que l’on retrouve dans ses tableaux. En 1883, elle créé un salon-atelier dans l’immeuble qu’elle fait construire avec son mari rue de Villejust, actuelle rue Paul Valéry, à Paris. On retrouve les murs rosés ou le porte-dessins dans plusieurs compositions du début des années 1890. Mais c’est bien l’intérieur dans son ensemble qui semble se saturer d’art et qui en devient le miroir. À la fin de sa vie, Morisot multiplie en effet les compositions où sa fille Julie, ses nièces ou quelques modèles professionnels sont occupés à jouer de la musique, dessiner ou peindre. Cette mise en abyme de la création est renforcée par la présence de peintures de la collection de Morisot et de photographies. Ces effets d’images dans l’image sont autant de souvenirs qui inscrivent le passé dans le présent. Ils brouillent les repères dans l’espace et le temps. La figure devient le support d’une réflexion nouvelle sur le temps qui passe et le souvenir. Au tournant de 1890, l’œuvre de Berthe Morisot prend des accents symbolistes et interroge la notion même d’espace et de temps réels. La touche fluide et longue, aux couleurs saturées, fond les figures dans leur environnement.
Les intérieurs de Morisot, assimilables à des projections de l’intériorité, de la musique jouée par les modèles ou de leurs rêveries, se déréalisent : « Le rêve c’est la vie – et le rêve est plus vrai que la réalité ; on y agit soi, vraiment soi – si on a une âme elle est là. »
 
Texte du panneau didactique
 
Berthe Morisot (1841-1895).  Jeune fille au lévrier (Julie Manet et sa levrette Laërte), 1893. Huile sur toile, 73 x 80 cm. Paris, musée Marmottan-Claude Monet, Fondation Denis et Annie Rouart, legs Michel Monet, 1966, n° inv. 5027. © Musée Marmottan Monet, Paris / Bridgeman Images / Service Presse.
 
Berthe Morisot (1841-1895)Fillette à la mandoline, 1890. Huile sur toile, 60 × 73 cm. Collection particulière.
 
Berthe Morisot (1841-1895).  La Mandoline, 1889. Huile sur toile, 55 x 57 cm. Paris, collection particulière. CMR 242. © Galerie Hopkins, Paris.
 

 

 

Berthe Morisot (1841-1895)Fillette assise, dit aussi Julie Manet tenant un livre, 1889. Huile sur toile, 65 × 54 cm. Collection particulière.
 
Citations
Scénographie
 
Berthe Morisot (1841-1895)Jeune fille en blanc, 1891. Huile sur toile, 64,8 × 54 cm. Timbre de la signature b.d. San Francisco, collection Famille Cuggino.
 
Berthe Morisot (1841-1895)Portrait de Mlle J.[ulie] M.[anet], dit aussi Julie rêveuse, 1894. Huile sur toile, 65 × 54 cm. Collection particulière.
 
Berthe Morisot (1841-1895)Le Violon, dit aussi Julie Manet jouant du violon en robe blanche, 1894. Huile sur toile, 85,3 × 60,4 cm. S.b.g. : Berthe Morisot. Collection particulière.
 
Berthe Morisot (1841-1895)Le Violon, dit aussi Julie Manet au violon, 1893. Huile sur toile, 65 × 54 cm. Timbre de la signature b.g. Collection particulière.
 
Carnet de dessins et de notes, 1890, crayons noir et de couleurs et encre noire sur papier, 15 × 8,5 cm. Inv. D.5-1986.2014.4, Paris, musée Marmottan Monet.
 
Carnet de dessins et de notes, 1885-1888, crayons noir et de couleurs sur papier, 15 × 10,3 cm. Inv. D.5-1986.2014.1, Paris, musée Marmottan Monet.
 
Berthe Morisot (1841-1895)Lucie Léon au piano, 1892. Huile sur toile, 65 × 80 cm. S.b.g. : Berthe Morisot. Collection particulière.

Carnet de dessins et de notes, 1885, crayons noir et de couleurs, aquarelle et encre noire sur papier, 17,3 × 11,6 cm. Inv. D.5-1986.2014.2, Paris, musée Marmottan Monet.
 
Citation



Chronologie