LES BATAILLES DE L'EMPEREUR DE CHINE

Article publié dans la Lettre n° 296


LES BATAILLES DE L’EMPEREUR DE CHINE. Ce qui est intéressant dans cette exposition, ce n’est pas tant les seize magnifiques planches gravées à Paris de 1767 à 1775, représentant la victorieuse campagne militaire menée par l’empereur Qianlong (1736-1796) en Haute Asie, que l’histoire de la réalisation de ces planches.
Un édit impérial du 13 juillet 1765 demandait l’envoi en Europe de quatre dessins préparatoires, suivi de l’envoi de douze autres en 1767. Cette commande transita par les marchands hannistes, seuls habilités à Canton pour le commerce avec l’Occident, qui signèrent un traité avec la Compagnie françaises des Indes, d’où le mythe de la commande impériale !
Celle-ci fut effectivement traitée comme telle et Louis XV donna des instructions au marquis de Marigny, Directeur Général des Bâtiments du Roy et directeur de l’Académie royale de Peinture, de Sculpture et de Gravure. Celui-ci confia la direction générale de l’ouvrage à Charles-Nicolas Cochin qui s’entoura d’une équipe de huit graveurs, parmi les plus renommés, et qui apposa la mention, unique dans l’histoire de l’estampe, de « c. n. cochin direxit » alors qu’il ne participa pas à leur exécution !
La livraison des planches, exécutées à l’eau forte et au burin, débuta par l’envoi de sept d’entre elles à Pékin fin 1772 tandis que la dernière livraison eut lieu en 1775, sous le règne de Louis XVI. Rien n’arrêta la commande impériale à laquelle le roi attachait une grande importance. En effet c’était aussi un moyen de séduire l’empereur par l’excellence et la perfection de l’art français après l’humiliation du Traité de Paris qui dépossédait la France des premières fondations de son empire colonial.
Les gravures elles-mêmes sont extraordinaires par leurs grandes dimensions (70 x 110 cm), la multitude de personnages qui y sont représentés, les paysages qui ornent le fond des différentes scènes et la finesse des détails dont rend bien compte le petit film projeté sur le lieu même de l’exposition.
Les modèles ont été dessinés par quatre missionnaires jésuites travaillant pour l’empereur Qianlong. Parmi eux nous retrouvons le Frère Giuseppe Castiglione souvent mentionné dès qu’il s’agit de la Chine et de cette époque.
Quelques privilégiés, dont Louis XV, reçurent un exemplaire de la série des Batailles, mais c’est à Pékin que la quasi-totalité des planches furent tirées, avec régularité, grâce à Cochin, qui avait organisé les ateliers de taille-douce, et trouvèrent leur finalité, l’illustration de poèmes épiques célébrant les conquêtes de Qianlong. La Chine qui avait maîtrisé la technique de l’estampe sur bois quelques siècles avant l’Europe, reçut ainsi en retour la technique de la taille-douce. « La série des Batailles, dessinée à Pékin, gravée à Paris, imprimée en France puis en Chine, dévoile un aspect inédit des échanges culturels et technologiques entre l’Orient et l’Occident ». Musée du Louvre 1er. Pour voir notre sélection de visuels, cliquez ici. Lien : www.louvre.fr.


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