L’ART DE LA PAIX
Secrets et trésors de la diplomatie

Article publié dans la Lettre n° 405
du 30 novembre 2016


 
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L’ART DE LA PAIX. Secrets et trésors de la diplomatie. On parle plus souvent d’« art de la guerre » que d’« art de la paix » et pourtant, comme on nous le montre ici, la paix ne se fait pas toute seule. Il faut des connaissances et de la pratique pour parvenir à cet état. La présente exposition, la première du genre, organisée par le ministère des Affaires étrangères et du Développement international, nous explique cet art bien particulier, comme on le verra.
Dans l’entrée, une tapisserie des Flandres du XVe siècle célébrant les exploits guerriers d’Alexandre le Grand, un tableau de Georges Leroux intitulé Aux Eparges, soldats enterrant leurs camarades au clair de lune (1915) et un film diffusé à la télévision à l’occasion du 50e anniversaire d’Hiroshima, évoquent l’effroi de la guerre et les raisons de la paix.
La première salle « La paix des princes, une affaire de famille » rappelle qu’après le partage de l’empire de Charlemagne entre ses trois petits-fils, l’Europe conserve la nostalgie de l’unité, gage de paix. Pour contrecarrer cette dispersion du pouvoir, l’Eglise crée la « paix de Dieu », garantie par des sanctions spirituelles. De leur côté, les familles princières tentent d’étendre leur pouvoir tant par la guerre que par des alliances et des mariages. Un grand nombre d’œuvres d’art illustrent ces propos. Citons un tableau du XVe siècle représentant Philippe le Bon et Isabelle de Portugal ; les Noces de Catherine de Médicis avec Henri II de France, de Jacopo Chimenti l‘Empoli (vers 1600) ; le moulage du bas-relief du Camp du drap d’or de l’Hôtel de Bourgtheroulde à Rouen ; François Ier et Charles-Quint se réconcilient sous l’impulsion du pape Paul III (1538), peint en 1687-1688 par Sebastiano Ricci ; la Paix de Nimègue, bas-relief en bronze de Martin Van den Bogaert, dit Desjardins ; l’Allégorie de la Paix d’Amiens, par Anatole Devosge ; l’Apothéose de Napoléon Ier par Ingres (vers 1853). On le voit, les sujets ne manquent pas ! Le plus intéressant dans cette salle (et les suivantes) sont les traités originaux signés dans toutes sortes de circonstances : le Traité de paix entre Louis IX et Jacques Ier d’Aragon (11 mai 1258) ; le « honteux » Traité de Troyes entre la France et l’Angleterre (21 mai 1420) ; la Confirmation du traité de paix d’Arras (5 janvier 1436) ; le Traité de paix entre la France et l’Espagne (Nimègue, 17 septembre 1678), etc. Le traité le plus original est  la Grande Paix de Montréal (4 août 1701) entre la France et des nations indiennes, celles-ci ayant signé avec des symboles.
La salle suivante « L’idéal de paix » présente divers tableaux et sculptures représentant la Paix, la plupart du temps sous des formes allégoriques, comme ces colombes de Vénus installant leur nid dans le casque de Mars ! Néanmoins, la Paix ainsi représentée se définie face à l’allégorie de la Guerre et, finalement, symbolise avant tout le triomphe des vainqueurs…
Avec « La paix, mode d’emploi », on entre de plain-pied dans le domaine de la diplomatie. À partir du XVIe siècle, les souverains limitent leurs déplacements et renoncent peu à peu aux rencontres au sommet. Des spécialistes font leur apparition dans les négociations et la rédaction des traités. Des livres enseignent l’art de la diplomatie (Le Parfait Ambassadeur, 1709). Les cadeaux diplomatiques font leur apparition comme ce magnifique service de Sèvres offert par Louis XV à la princesse des Asturies, future reine d’Espagne, et surtout cette Table de Breteuil dite de Teschen, offerte par l’électeur de Saxe au baron Breteuil, médiateur français de la paix de Teschen. Cette table fut acquise en 2014 par le Louvre, grâce au mécénat public, pour la somme de douze millions d’euros.
Dans cette salle on trouve aussi un tableau avec seize « artisans de la paix » allant de Richelieu à François Mitterrand et divers objets et manuels permettant le chiffrement des communications, comme le fut cette imposante et fameuse Dépêche du père Joseph à Richelieu (22 août 1630).
Dans cette salle les commissaires montrent aussi l’importance de la ville de Paris dans les négociations internationales, depuis le traité de 1259 jusqu’à la COP21, illustrée dans la dernière salle par le petit marteau vert utilisé par Laurent Fabius pour clore la conférence, en passant par le traité de la CECA, ancêtre de la Communauté européenne, ou la fin de la guerre du Viêt-Nam, en 1973, qui ne concernait pas la France.
On entre alors dans une petite salle où sont exposés les « Trésors de la diplomatie ». Dans un ordre chronologique, allant du Cartulaire de Christophe Colomb (1502) jusqu’à un traité avec la Chine du 28 février 1946, sont exposées de véritables œuvres d’art, avec de splendides calligraphies, des illustrations soignées et une profusion de sceaux comme sur ce parchemin scellé de 120 sceaux de cire rouge par lequel la noblesse polonaise élit roi Henri de Valois (23 mai 1573). Parmi tous ces trésors, la Lettre du roi du Siam à Napoléon III (17 mars 1861) écrite sur une feuille d’or, est la plus surprenante.
Dans la dernière salle, « Ordre et désordre international », l’exposition évoque les efforts faits un peu partout en faveur de la paix, aboutissant à la Société des Nations, puis à l’ONU. Un tableau nous présente, cette fois, treize « Penseurs de la paix » depuis Saint Augustin jusqu’à Stéphane Hessel. Les commissaires nous montrent aussi l’importance des intellectuels, tels que Victor Hugo, Lamartine, Daumier et ses caricatures sur le congrès de la paix de 1849, Verechtchaguine et son effroyable Apothéose de la guerre (1871) ou encore le douanier Rousseau avec Les représentants des puissances étrangères venant saluer la République en signe de paix (1907). Nous voyons aussi le bureau plat attribué à Cressent (vers 1725-1730), sur lequel les allemands ont proclamé l’Empire allemand en 1871 et signé le traité de 1919, ainsi que le traité instituant la CEE (1957) et le traité de Maastricht (1992), tous deux nettement moins artistiques, avec leurs milliers de pages, que ceux vus dans les salles précédentes. Une exposition passionnante grâce à tous ces documents historiques dont les noms ont bercé notre enseignement, avec une scénographie très soignée. R.P. Petit Palais 8e. Jusqu’au 15 janvier 2017. Lien: www.petitpalais.paris.fr.


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