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                        | Entrée de l'exposition  | 
                      
                      
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                          «La  voie qui mène à l'art passe par la nature et l'attitude que nous avons envers  elle.» Anna-Eva Bergman, 1950 Anna-Eva  Bergman (1909-1987) est une figure clé de la peinture de l'après-guerre. Elle a  su inventer un langage pictural très singulier, basé sur un vocabulaire de  formes simples inspiré par les paysages nordiques et méditerranéens. Bien que  célébrée et exposée dans le monde entier de son vivant, son œuvre est  aujourd’hui méconnue. Cette  première grande rétrospective apporte un éclairage décisif dans la redécouverte  de cette artiste. Le parcours, chronologique, permettra d'apprécier la  précocité de sa vocation, ses dons d'observatrice et de caricaturiste, qui ont  fait d'elle une chroniqueuse alerte, témoin des bouleversements sociaux et  politiques des années 1930. Ces œuvres graphiques, les premières qui ont été  exposées, ne sauraient la réduire au statut d'illustratrice. Elles témoignent  d'une puissante individualité, signe d’une émancipation précoce et d’une grande  liberté d'esprit.
 
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                          À  l'orée des années 1950, elle confirme sa vocation de peintre à travers le choix  d’une voie non figurative mais toujours symbolique. L'observation de la nature  passe au premier plan, nourrie par une profonde introspection sur laquelle  l'artiste va fonder sa propre théorie esthétique. Elle conçoit un alphabet  formel qu'elle n'a de cesse de pratiquer au tournant de chaque décennie,  jusqu'au développement d’un minimalisme solennel, en lien avec sa relation  particulière au paysage, à la pureté radicale des couleurs et des formes. L'exposition  met en avant la richesse des techniques plastiques abordées par Bergman et  l'usage très spécifique d’un matériau devenu sa signature: la feuille de métal. Ce  projet ambitieux qui rassemble plus de 300 œuvres, archives, documents visuels  et audiovisuels, dont certains encore inédits, a été réalisé en étroite  collaboration avec la Fondation Hartung-Bergman à Antibes et le Nasjonalmuseet  à Oslo. | 
                      
                        | Texte du panneau didactique. | 
                      
                       
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 1 - UNE JEUNESSE EUROPÉENNE
 
 
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                        | Scénographie 
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                            Anna-Eva  Bergman incarne l’Europe du XXe siècle. Elle grandit en Norvège, où elle  développe très vite une grande faculté d'observation; elle croque des saynètes  avec un sens de l'humour tranchant, à la fois à l'écrit et par le dessin. Elle  suit une formation artistique à Oslo qu'elle complète à Vienne en 1928. À Paris  en 1929, elle rencontre Hans
                            Hartung,  jeune peintre abstrait alors inconnu. Elle l'épouse aussitôt en Allemagne et  fréquente les cercles d'artistes engagés de Dresde.                            
                           En  1933-1934, Bergman vit comme un «paradis» son installation sur l'île de  Minorque, aux Baléares, dans une maison qu'elle fait construire avec Hartung en  bord de mer. Elle documentera et racontera longuement ce séjour dans un livre, Turid en Méditerranée, publié en 1942.  Devenue allemande par son mariage, Bergman connaît plusieurs démêlés avec les  autorités du IIIe Reich et hait ce régime qu'elle brocardera dans une autobiographie  non publiée écrite entre 1940 et 1945: Une  bagatelle suédo-norvégienne. Elle signe à cette période des articles et des  dessins pour la presse et séjourne, au gré des contraintes matérielles et des occasions,  à Berlin, Oslo, Paris, puis en Italie, où, en 1937-1938, elle est bouleversée  par les villages de Ligurie, les mosaïques byzantines et l'art de la  Renaissance. Ce foisonnement d'expériences nourrit jusqu'à ses 30 ans un  univers visuel vivant et drôle qui ne va pas tarder à gagner en gravité. Le  traumatisme de la guerre, qu'elle passe dans une Norvège durement occupée,  participe à cette évolution personnelle dans une Europe malmenée par la folie  meurtrière des totalitarismes.
                            
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                        | Texte du panneau didactique. |  | Anna-Eva Bergman. [Autoportrait], vers 1946. Huile sur panneau de bois  Isorel. Fondation Hartung-Bergman. | 
                      
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                        | Anna-Eva Bergman, 1929, photographe non connu. Épreuve gélatino-argentique. Fondation Hartung-Bergman. |  | Biographie d'Anna-Eva Bergman (1909 - 1938). | 
                      
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                        | Récépissé de demande de carte d’identité française d’Anna-Eva Bergman,  24 octobre 1930. Fondation Hartung-Bergman. |  | Anna-Eva Bergman et Hans Hartung devant leur maison à Minorque avec leur  chien Pan, 1933, Photographe non connu. Épreuve gélatino-argentique. Fondation Hartung-Bergman. | 
                      
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                        | Scénographie  | 
                      
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                        | Anna-Eva Bergman. [Le mendiant à  « La colle », France, 1931], 1931. Huile sur panneau de bois  contreplaqué. Fondation Hartung-Bergman. |  | Anna-Eva Bergman. [Non titré], vers 1927. Encre de Chine sur papier. Fondation  Hartung-Bergman. | 
                      
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                        | Anna-Eva Bergman. [Fête d’Arendal],  1925. Mine de plomb sur papier. Fondation Hartung-Bergman. |  | Bao Lund-Bergman et Anna-Eva Bergman. [Journal de Bao], 1929. Aquarelle, encre de Chine, mine de plomb et  crayon de couleur sur papier. Fondation Hartung-Bergman. | 
                      
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                        | Anna-Eva Bergman. [Une famille  pacifiste], vers 1944. Encre de Chine sur papier. Fondation Hartung-Bergman. |  | Anna-Eva Bergman. [Non titré], 1931. Tempera sur toile. Fondation  Hartung-Bergman. | 
                      
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                        | Scénographie  | 
                      
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                        | Anna-Eva Bergman. [Homborøya],  1932. Aquarelle sur papier. Fondation Hartung-Bergman. |  | Anna-Eva Bergman. [St Paul Alpes Maritimes], 1930. Aquarelle  sur papier. Fondation Hartung-Bergman. | 
                      
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                        | Anna-Eva Bergman. [Non titré], vers 1932. Aquarelle sur papier. Fondation  Hartung-Bergman. |  | Anna-Eva Bergman. [Non titré], vers 1933. Huile sur toile. Fondation  Hartung-Bergman. 
 
 
Ces vues d'habitations peintes à Minorque montrent l'intérêt  précoce de Bergman pour les formes d'architecture vernaculaire qu'on trouve  dans les carnets de ses débuts, et l'importance qu'elle accorde à la  composition et au cadrage. En effet, ces tableaux dialoguent avec des photographies  qu'elle a prises selon des points de vue identiques lors du même séjour. Le  motif du mur blanc, typiquement méditerranéen, contraste fortement avec le ciel  bleu sombre. Il était déjà présent dans une aquarelle réalisée à  Saint-Paul-de-Vence en 1930. Il réapparaîtra dans les années 1960 comme un  thème à part entière, en résonance avec les falaises des fjords norvégiens. | 
                      
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                        | Scénographie  | 
                      
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                        | Anna-Eva Bergman. [Dresde 1930,  marché], 1930. Mine de plomb sur papier. Fondation Hartung-Bergman. |  | Anna-Eva Bergman. El generalissimo, vers  1935. Mine de plomb sur papier, 43,8 x 33,8 cm. Fondation Hartung-Bergman. ©  Anna-Eva Bergman / Adagp, Paris, 2023. Photographie © Claire Dorn.
 
 
 Ayant quitté  l'Espagne depuis plusieurs années, Bergman reste attentive à l'évolution du  fascisme dans ce pays miroir de son vécu de l'émergence du nazisme en  Allemagne. Elle caricature Franco en chef d'état-major, dans ses débuts de  dictateur, qui lui vaudront le titre de «genéralissime». Elle le dessine bouffi  et vulgaire, en train de se curer les dents, attablé devant un verre vide et  quelques pesos qu'il tripote avec le majeur. Elle procède à la dégradation du  militaire, dont elle raille et réfute le pouvoir, opérant une relation  grotesque entre le prestige de son grade, l'expression de son physique et la  trivialité de la scène. | 
                      
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                        | Anna-Eva Bergman. [Les immigrés  allemands, 1932], 1932. Aquarelle sur papier. Fondation Hartung-Bergman. |  | Anna-Eva Bergman. [Les frères de  Skat, 1932], 1932. Aquarelle sur papier. Fondation Hartung-Bergman. | 
                      
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                        | Anna-Eva Bergman. [Il peint, je  peins], vers 1940. Encre de Chine et aquarelle sur papier. Fondation  Hartung-Bergman. |  | Anna-Eva Bergman. [Fabrication  d’enfants], vers 1944. Encre de Chine sur papier. Fondation Hartung-Bergman. | 
                      
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                        | Anna-Eva Bergman. [Futur  national-socialiste], vers 1933. Encre de Chine sur papier. Fondation  Hartung-Bergman. 
 
 
Quatre véhicules de nature technologique très différente - une  charrette, un avion, une voiture et une bicyclette - sont structurés par des  croix gammées. Les roues, l’hélice, la calandre, la trace des pneus sur le sol:  tout prend la forme du svastika choisi par Hitler pour symboliser la suprématie  de la «race aryenne» et l'épuration de la société. Les passagers se meuvent  tranquillement, comme inconscients de ce processus qu'ils sont en train de  mettre en branle. Cette image est une efficace dénonciation du lavage de  cerveau qu’opèrent alors l'idéologie nazie et sa propagande, jusqu'au cœur du  quotidien. |  | Anna-Eva Bergman et sa voiture dans les Alpes, 1930, photographie Hans  Hartung. Épreuve gélatino-argentique. Fondation Hartung-Bergman. | 
                      
                      
                       
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 2 - FRAGMENTS D'UNE ÎLE EN NORVÈGE
 
 
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                        | Scénographie 
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                            Anna-Eva  Bergman est fascinée par les beautés géologiques de la nature. Elle porte une  attention toute particulière aux pierres, aux galets, aux failles et aux  entailles dans la roche, aux plissures et aux textures des minéraux. Lors des  étés 1949, 1950 et 1951, elle se rend à Citadelløya,  dans le sud de la Norvège. Ces séjours occasionnent un profond renouvellement  de son vocabulaire artistique avec la série des Fragments d'une île en Norvège, véritable acte de naissance dans sa  maturité de peintre. Il faut ajouter dans ce processus l'importance cruciale d'un  voyage dans le nord du pays lors de l'été 1950,  où elle fait l'expérience du soleil de minuit le long des îles Lofoten. 
L'évolution de Bergman était en réalité en germe  depuis 1946, date à laquelle elle décide de reprendre à zéro sa vocation et ses  ambitions. Elle est très proche de Christian Lange, architecte spécialiste du  gothique dont elle a épousé le fils en secondes noces. Elle partage avec lui  ses nouvelles préoccupations esthétiques, philosophiques et mystiques auxquelles  elle consacre études et lectures. Elle travaille sur le nombre d'or - loi  géométrique fondée sur la notion de proportion qui inspire les artistes quant  au rapport entre l'harmonie et la beauté depuis l'Antiquité -, sur la qualité  rythmique de la ligne, sur la symbolique des couleurs. Elle lit aussi bien  Kafka et Malraux que des ouvrages d'anthropologie. Elle réalise sa première  peinture à la feuille d'or et obtient une commande importante de décor pour un  hôtel à Larvik, dans le sud de la Norvège.
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                        | Texte du panneau didactique. |  | Anna-Eva Bergman. N°-1951,  1951. Huile et feuille de métal sur panneau de bois Isorel. Fondation  Hartung-Bergman. | 
                      
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                        | Anna-Eva Bergman. N°ca-1948-50, 1950. Huile  et feuille de métal sur panneau de bois Isorel. Fondation Hartung-Bergman. |  | Biographie d'Anna-Eva Bergman (1939 - 1951). | 
                      
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                        | Anna-Eva Bergman. [Non titré], 1950. Tempera et encre de Chine sur  panneau de bois Isorel. Fondation Hartung-Bergman.  | 
                      
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                        | Anna-Eva Bergman. [Arktisk komposisjon], 1950. Tempera et  encre de Chine sur papier. Fondation Hartung-Bergman. |  | Anna-Eva Bergman. [Finnmarks impression], 1950. Tempera,  encre de Chine et mine de plomb sur papier. Fondation Hartung-Bergman. | 
                      
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                        | Anna-Eva Bergman. N°34-1951 [Rêves bleus], 1951. Tempera à la caséine  sur panneau de bois Isorel. Fondation Hartung-Bergman.
 
 
 Rêves bleus appartient à la période où Bergman revient à la  peinture dans une veine abstraite qui lui permet d'expérimenter les relations  entre les couleurs, les sensations - et même les émotions -, avec des effets de  compositions inspirées soit par les formes de la nature, soit par son monde  intérieur, comme dans le cas présent. Elle est ici encore très proche de  l'univers visuel de Klee ou de Kandinsky, qui ont eux-mêmes cherché à mettre en  évidence des synesthésies dans leur art, entre son et couleur, rythme et  sensations psychologiques. Les signes qui apparaissent dans les toiles de cette  époque, dont certaines présentent aussi des formes organiques ou biomorphiques,  sont en phase avec l'absorption du vocabulaire surréaliste par les artistes norvégiens  qui pratiquent l'abstraction après-guerre et dont Bergman est proche. |  | Anna-Eva Bergman. N°58-1949 [Pluie], 1949. Tempera sur panneau de  bois Isorel. Fondation Hartung-Bergman. 
 
 
Pluie témoigne des recherches de Bergman sur la relation entre les couleurs et  l'étude du nombre d'or dans les tableaux des maîtres. Ces essais de  fragmentation de la lumière et de l’espace résonnent avec les recherches futuristes  et cubistes du début du siècle, mais le choix de les appliquer à un phénomène atmosphérique  est ici totalement original. Bergman représente l'effet du vent sur la pluie  qui tombe par des mouvements verticaux et obliques. L'humidité environnante est  rendue par des tons bleutés. Bien plus tard, au milieu des années 1970, Bergman  donnera une tout autre dimension picturale à ses captations d'effets  atmosphériques avec d'autres peintures figurant la pluie, mais aussi des vagues  et le mistral. | 
                      
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                        | Scénographie  | 
                      
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                        | Anna-Eva Bergman. [Composition],  1951. Tempera et feuille dmétal sur panneau de bois contreplaqué.The  National Museum of Art, Architecture and Design, Oslo.
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                        | Anna-Eva Bergman. [Les formats et  leur découpage], vers 1949. Encre, crayon de couleur et mine de plomb sur  papier. Fondation Hartung-Bergman. |  | Anna-Eva Bergman. [«Solitude» La  maison (section d’or)], 1947. Tempera sur panneau de bois Isorel. Fondation  Hartung-Bergman. | 
                      
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                        | Scénographie  | 
                      
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                        | Anna-Eva Bergman. N°35C-1951  Fragment Randsholmen, 1951. Tempera sur panneau de bois Isorel. Fondation  Hartung-Bergman. |  | Anna-Eva Bergman. N°32-1951  Fragment d’une île en Norvège [Gris-solitude  (noir blanc ocre)], 1951. Tempera sur panneau de bois Isorel. Fondation  Hartung-Bergman. | 
                      
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                        | Anna-Eva Bergman. [Fragment d’une île en Norvège], vers  1951. Tempera et encre de Chine sur papier, 50 x 65 cm. Musée d’Art Moderne de  Paris. © Anna-Eva Bergman / Adagp, Paris, 2023. Photographie © Fondation  Hartung-Bergman. |  | Anna-Eva Bergman. N°35b-51 [Composition de la Citadelle], 1951.  Tempera sur panneau de bois Isorel. Fondation Hartung-Bergman. | 
                      
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                        | Anna-Eva Bergman. Citadellet, août  1950, 1950. Mine de plomb sur papier. Fondation Hartung-Bergman. |  | Anna-Eva Bergman. N°27-1951 [Phare (conventions)], 1951. Tempera sur  panneau de bois Isorel. Fondation Hartung-Bergman. | 
                      
                       
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                        | Anna-Eva Bergman. Fragment d’une île en Norvège I, 1951.  Mine de plomb sur papier. Fondation Hartung-Bergman. |  | Anna-Eva Bergman dessinant à Citadelløya, 1949, photographie Rolf  Skjethe. Épreuve gélatino-argentique. Fondation Hartung-Bergman. | 
                       
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 3 - Naissance des formes
 
 
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                        | Scénographie 
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                            Début  1952, Bergman expose en Allemagne. Elle fréquente le critique Will Grohmann et  mène une enquête sur les artistes persécutés par les nazis comme Willi  Baumeister ou Karl Schmidt-Rottluff. Elle gagne ensuite Paris, reprend une  relation avec Hans Hartung. Elle commence à se faire une solide réputation. Que  ce soit dans un cadre public ou privé, ses œuvres sont saluées entre autres par  Pierre Soulages, les critiques Herta Wescher et Michel Seuphor. Elle intègre la  puissante Galerie de France, qui organise sa première exposition en 1958.Anna-Eva  Bergman développe dans les années 1950 une œuvre d'une singularité difficile à  situer dans l’histoire de l'art traditionnelle. C'est «une peinture originale  qui ne doit rien aux modes», résume le critique Michel Ragon. Ses thèmes archétypiques  - pierres, univers, arbres, astres - écartent désormais toute représentation anthropomorphique  et tendent à l'abstraction mais sans s'arracher complétement à toute référence.  D'ailleurs, elle préfère parler de «non-figuratif» ou d’«art d'abstraire».  Bergman élabore une sorte d'alphabet visuel en mutation constante. C'est une  perpétuelle «naissance des formes» dans le sens où chaque forme est susceptible  d'en engendrer d'autres par variations graphiques et chromatiques d'un tableau  à l’autre. L'usage de la feuille de métal est, en outre, de plus en plus  courant dans sa production: doté de qualités luminescentes, le tableau invite  implicitement le regardeur à être mobile, à se déplacer devant sa surface.
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                        | Texte du panneau didactique. |  | Anna-Eva Bergman. N°5-1952 Deux  formes noires, 1952. Huile sur toile. Fondation Hartung-Bergman. | 
                      
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                        | Anna-Eva Bergman. N°2-1953 Stèle avec lune, 1953.  Tempera et feuille de métal sur toile, 146 x 97 cm. The  National Museum of Art, Architecture and Design, Oslo. © Anna-Eva Bergman /  Adagp, Paris, 2023. Photographie © Fondation Hartung-Bergman. |  | Biographie d'Anna-Eva Bergman (1952 - 1964). | 
                      
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                        | Anna-Eva Bergman. N°1-1954 Un  univers, 1954. Huile et feuille de métal sur toile. Fondation  Hartung-Bergman. |  | Anna-Eva Bergman. N°29-1955 Crabe  d’argent, 1955. Tempera à la caséine et feuille de métal sur toile. Musée  d’Art Moderne de Paris. | 
                      
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                        | Scénographie  | 
                      
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                        | Anna-Eva Bergman. N°1-1953 La  Griffe, 1953. Tempera sur toile. Fondation  Hartung-Bergman. |  | Anna-Eva Bergman. N°20-1955 Der Hochschwebende, 1955. Huile  et feuille de métal sur toile. Fondation Hartung-Bergman.
 
 
 Cette œuvre a été  choisie par Hans Hartung pour sa collection personnelle. Bergman et lui avaient  en effet pour habitude d'examiner et de commenter mutuellement leurs travaux et  de s'offrir certaines de leurs peintures. Le titre en allemand, Der Hochschwebende, peut se traduire par  «Celui qui surplombe». Sans la désigner directement et sans la rattacher à une  religion précise, il évoque une entité spirituelle supérieure qui fait écho au  majestueux flottement de la forme circulaire dorée. Les œuvres de Bergman  représentent souvent des corps célestes, dont la dimension spirituelle reste  toujours ouverte. | 
                      
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                        | Anna-Eva Bergman. N°18-1956 Grand soleil, 1956.  Huile et feuille de métal sur toile, 162 x 143 cm. Stortinget,  The Norwegian Parliament. © Anna-Eva Bergman / Adagp, Paris, 2023. Photographie  © Peter Mydske / Stortinget.  |  | Anna-Eva Bergman. N°14-1956 Le  grand nord, 1956. Tempera et feuille de métal sur toile. Fondation  Hartung-Bergman.
 
 
 Avec ce grand roc bleu profond, qui s'érige comme une proue ou  une stèle - deux autres motifs récurrents de son répertoire de formes alors en  pleine élaboration dans les années 1950 -, Bergman symbolise un espace géographique  dont l'expérience pose les limites de l'existence humaine. Il s'agit de  l’immensité des paysages septentrionaux que l'artiste a observés lors de son voyage  dans le nord de la Norvège en 1950, la rigueur de leur climat et la faible  occupation humaine qui les caractérise. Par sa prestance et ses dimensions imposantes,  l'œuvre, qui domine le spectateur, contribue presque à personnifier une donnée  géologique qui redéfinit nos conditions d'existence et notre proportion toute  relative dans l'Univers. | 
                      
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                        | Anna-Eva Bergman. N°7-1952,  1952. Tempera sur panneau de bois contreplaqué. Fondation Hartung-Bergman. |  | Hans Hartung et Anna-Eva  Bergman, 1964, photographie Waintrob-Budd. Épreuve  gélatino-argentique. Fondation Hartung-Bergman. | 
                      
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                        | Scénographie  | 
                      
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                        | Anna-Eva Bergman. N°11-1960 Grande  vallée, 1960. Huile et feuille de métal sur toile. Fondation  Hartung-Bergman. |  | Anna-Eva Bergman. N°6-1960  Pyramide, 1960. Huile et feuille de métal sur toile, 200 x 300 cm. Fondation  Hartung-Bergman. © Anna-Eva Bergman / Adagp, Paris, 2023. Photographie © Claire  Dorn. 
 
 
Dans toute sa simplicité géométrique, la pyramide, construite au nombre  d'or, se présente comme un symbole monumental de stabilité, de sécurité et de  paix. Le fond est préparé à la tempera rouge puis recouvert de feuilles d'aluminium,  dont l'aspect gris acier est nuancé par un glacis bleu. Le motif pyramidal est  traité avec des feuilles d'argent dont les côtés ne se touchent pas forcément, ce  qui leur confère l'aspect architectural d’une pierre de taille. Ces quelques  millimètres d'écart entre les feuilles d'argent rendent visible la sous-couche  rouge, innervant d'énergie chaude les nuances gris-bleu. Des décalages très  subtils du motif de la pyramide par rapport au cadre créent une impression de  mouvement ou de lévitation. | 
                      
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                        | Anna-Eva Bergman. N°4-1957 La  grande montagne, 1957. Huile et feuille de métal sur toile. Fondation  Hartung-Bergman. |  | Anna-Eva Bergman. N°10-1957 (Moïse  ou) Grand arbre, 1957. Tempera et feuille de métal sur toile. Fondation  Hartung-Bergman. 
 
 
Bergman propose ici une équivalence plus qu’un choix entre la  désignation du prophète Moïse, personnage des Écritures communes aux religions  juive, chrétienne et musulmane, et celle d’un de ses motifs favoris, l'arbre. Les  deux se rejoignent pour évoquer une certaine forme de sagesse, de puissance et  de solennité monumentale, présentes aussi bien dans la civilisation et le  savoir humain que dans la nature terrestre. De l'arbre, l'artiste ne retient  que l'ampleur du tronc et la force dynamique et rayonnante des branches. Le  soin apporté à la couleur des glacis qui recouvrent les feuilles de métal tend à  évoquer les reflets vert bleuté des lichens. | 
                      
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                        | Anna-Eva Bergman. N°7-1960 Grand  tombeau, 1960. Huile et feuille de métal sur toile. Fondation  Hartung-Bergman. |  | Anna-Eva Bergman. N°13-1960 Le  tombeau de Théodoric, 1960. Huile et feuille de métal sur toile. Fondation  Hartung-Bergman. | 
                      
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                        | Scénographie  | 
                      
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                        | Publications et catalogues sur Anna-Eva Bergman. |  | Publications et catalogues sur Anna-Eva Bergman. | 
                      
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                        | Scénographie  | 
                       
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 ALPHABET
 
 
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                        | Scénographie 
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                           En  1958, Anna-Eva Bergman présente pour la première fois, dans une série d'œuvres  sur papier à la tempera et feuilles métalliques, les bases du répertoire de  formes qu'elle a développé depuis 1952: pierre, lune, planète, arbre, montagne,  tombeau, vallée, barque, miroir, etc.Elle  les compilera en une liste exhaustive à la fin des années 1960 pour détailler  les thèmes qui lui permettent de créer une sorte d'alphabet, développant des  catégories et précisant leurs développements et leurs transformations  successifs dans ses peintures et estampes. À chacune des grandes étapes de son  évolution artistique, Bergman effectuera le point sur ce vocabulaire symbolique  qui irrigue toute son œuvre.
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                        | Texte du panneau didactique. |  | Anna-Eva Bergman. N°55-1959 Double  mur, 1959. Huile et feuille de métal sur toile. Fondation Hartung-Bergman. | 
                      
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                        | Anna-Eva Bergman. 1954-1956 Forme  orange, 1955. Huile et feuille de métal sur toile. Fondation  Hartung-Bergman. |  | Biographie d'Anna-Eva Bergman (1958 - 1967). | 
                      
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                        | Anna-Eva Bergman. N°105-1958  Barque, 1958. Tempera et feuille de métal sur papier Rives. Fondation  Hartung-Bergman. |  | Anna-Eva Bergman. N°11-1957 [Îlot], 1957. Tempera  et feuille de métal sur toile. Fondation Hartung-Bergman. | 
                      
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                        | Scénographie  | 
                      
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                        | Anna-Eva Bergman. N°88-1958  Lumière boréale, 1958. Tempera et feuille de métal sur papier. Fondation  Hartung-Bergman. |  | Anna-Eva Bergman. N°71-1958  Morceau de montagne, 1958. Tempera et feuille de métal sur papier. Fondation  Hartung-Bergman. | 
                      
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                        | Anna-Eva Bergman. N°79-1958 Pierre,  1958. Tempera et feuille de métal sur papier. Fondation Hartung-Bergman. |  | Anna-Eva Bergman. N°40-1958  Planète éclatée, 1958. Tempera et feuille de métal sur papier. Fondation  Hartung-Bergman. | 
                      
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                        | Anna-Eva Bergman. N°75-1958 Tombeau,  1958. Tempera et feuille de métal sur papier. Fondation Hartung-Bergman. |  | Anna-Eva Bergman. N°74-1958  Tombeau de Théodoric, 1958. Tempera et feuille de métal sur papier. Fondation  Hartung-Bergman. | 
                      
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 4 - DANS L'ATELIER
 
 
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                        | Scénographie 
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                           Bergman  utilise la feuille de métal (or, argent, aluminium, cuivre, étain, plomb,  bismuth) dès les années 1940, inspirée par les retables des églises  norvégiennes du Moyen Âge. Elle n'a de cesse de personnaliser cette technique,  employant d'abord le bol d'Arménie (préparation argileuse colorée) sur lequel  les feuilles sont polies avec une pierre d'agate, puis la dorure à la mixtion,  vernis gras qui facilite l'adhésion du métal. À partir de 1950, elle peint  principalement à la tempera. Dans les années 1960, elle opte pour une peinture  vinylique, puis pour l'acrylique la décennie suivante. L'évaporation de la  phase aqueuse contenue dans ces préparations requiert des gestes directs. Ces  procédés sont tout sauf spontanés et exigent la maîtrise de plusieurs étapes,  toutes interdépendantes et soigneusement préparées. Les fonds préparatoires  sont très colorés, ainsi que les vernis et les glacis qu'elle applique sur le  métal afin d'en diversifier les reflets. À partir des années 1960, elle  travaille dans la matière même de l'œuvre en arrachant les feuilles de métal  pour faire apparaître des strates sous-jacentes ou en apportant du volume et de  la texture à la matière picturale avec la modeling  paste.Dans  le domaine de l'estampe, elle maîtrise la lithographie et les traditionnelles techniques  sur cuivre (eau-forte, aquatinte, vernis mou, taille-douce). Elle a une prédilection  pour la gravure sur bois. Elle y excelle, jouant avec les veines et les stries  naturelles du matériau, sublimé par des tirages réalisés à l'or, à l'argent ou  au bleu manganèse.
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                        | Texte du panneau didactique. |  | Anna-Eva Bergman. GB40-1970 Terre  vue de la lune, 1970. Gravure sur bois sur vélin BFK de Rives. Épreuve  justifiée 5/30 et timbre sec AEB. F. Xaver Leipold Lithographische  Kunstanstalt, Nuremberg, imprimeur. Musée d'Art Moderne de Paris. | 
                      
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                        | Anna-Eva Bergman, rue Gauguet, Paris, 1966, photographie Waintrob-Budd. Épreuve  gélatino-argentique. Fondation Hartung-Bergman. |  | Biographie d'Anna-Eva Bergman (1950; 1952; 1963). | 
                      
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                         Matériel de travail d'Anna-Eva Bergman (de haut en bas): - 
                            couteaux à  enduire
 -                          ébauchoir pour le modelage
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                          pointe sèche pour la gravure sur métal
 -  brunissoir pour la gravure sur métal
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gouge pour la linogravure
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équerre.
 Fondation Hartung-Bergman.
 |  | - Mixtion à dorer clarifiée de la marque Lefranc Bourgeois. - Pierre d'agate  utilisée pour polir la feuille de métal.
 Fondation Hartung-Bergman.
 
 - Paquets de  feuilles d'aluminium de la marque Bruno Wolkenaer
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Paquets de feuilles d'or  gris clair de la marque Hellgold-Weissgold
 Fondation Hartung-Bergman.
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                        | Anna-Eva Bergman. G12-1953 Quatre  formes pierres, 1953. Eau-forte sur cuivre et aquatinte sur vélin d'Arches.  Épreuve justifiée 6/30 et signée. Lacourière, Paris, imprimeur. Musée d'Art  Moderne de Paris.
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                        | Anna-Eva Bergman. GB14-1957 Rocher,  1957. Gravure sur bois sur vélin d'Arches. Épreuve justifiée 4/15 et timbre sec  AEB. Atelier Patris, Paris, imprimeur. Musée d'Art Moderne de Paris. |  | Anna-Eva Bergman. G45-1987  Montagne, 1987. Eau-forte sur zinc. Tirage négatif en bleu nuit sur vélin  BFK de Rives. Imprimé par l'artiste à Antibes. Fondation Hartung-Bergman. | 
                      
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                        | Anna-Eva Bergman. L2-1963 Finnmark, 1963. Lithographie  sur vélin BFK de Rives. Epreuve justifiée 7/24 et timbre sec AEB. Erker-Presse,  Saint-Gall, imprimeur. Musée d'Art Moderne de Paris. |  | Anna-Eva Bergman. GB 20-1957 Barque sous  l’eau, 1957. Gravure sur bois sur vélin d'Arches, 56,8 x 76,8 cm. Épreuve  justifiée 5/15 et timbre sec AEB. Atelier Patris, Paris, imprimeur. Musée d’Art  Moderne de Paris. © Anna-Eva Bergman / Adagp, Paris, 2023. Photographie ©  Julien Vidal / Parisienne de Photographie.  | 
                      
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                        | Vidéo. Anna-Eva Bergman dans son atelier. |  |  | 
                      
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                        | Scénographie  | 
                      
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                        | Anna-Eva Bergman peignant N°18-1956,  Grand soleil dans son atelier de la rue Cels, Paris, 1957, photographie  Hans Hartung. © Hans Hartung / Adagp, Paris 2023. © Anna-Eva Bergman / Adagp,  Paris 2023. |  | François Walch. Anna-Eva Bergman dans son atelier à Antibes, 1975.  Épreuve gélatino-argentique, 16 x 23,5 cm. Fondation Hartung-Bergman. ©  François Walch / Adagp, Paris, 2023. ©  Anna-Eva Bergman / Adagp, Paris, 2023. | 
                       
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 5 - COSMOGONIES, TRANSCRIPTIONS PAYSAGÈRES
 
 
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                        | Scénographie 
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                            En  1964, Anna-Eva Bergman et Hans Hartung voyagent le long de la côte nord de la  Norvège jusqu'au cap Nord et en rapportent près d'un millier de photographies.  Pendant de nombreuses années, Bergman puisera son inspiration dans les  esquisses et les images de ce voyage. À la même époque, elle achète un terrain  en Espagne, à Carboneras. Elle y projette une maison-atelier (non réalisée)  orientée en cinq parties autour d’un patio, à partir du dessin d’un pentagramme  issu de ses recherches des années 1948-1940.De  nombreuses œuvres portent la trace de ce tropisme Nord-Sud qui, loin de  s'opposer entre ce qui serait prétendument froid et polaire d'un côté, chaud et  solaire de l'autre, se confond souvent, notamment dans l'expression  d’immensités désertiques. Bergman ne se contente pas de retranscriptions  paysagères brutes, purement inspirées du motif naturel. Elle se passionne à la  fois pour les systèmes de représentation du monde issus des mythes anciens et  pour les plus récentes avancées scientifiques de son temps, notamment en  matière d'archéologie et d'astronomie. Elle s’imprègne ainsi de nombreuses  visions cosmogoniques, depuis les classiques de la littérature (L'Épopée de  Gilgamesh, l'Ancien et le Nouveau Testament, Dante et même Howard Phillips Lovecraft..)  jusqu'aux découvertes astrophysiques modernes. Dans les années 1950-1960, elle  lit par exemple des ouvrages d’Einstein, s'enthousiasme pour la conquête  spatiale et s'abonne à la revue Planète.
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                        | Texte du panneau didactique. |  | Anna-Eva Bergman. N°18-1964 Mur, 1964. Vinylique  et feuille de métal sur toile. Musée d'Art Moderne de Paris. 
 
 
Inspiré par ses  voyages en Espagne (rappelant les appareillages de pierre des édicules anciens  des environs de Carboneras) et dans le nord de la Norvège (dont il évoque les  falaises ou les fiords), ce mur traduit l'attention particulière de Bergman à  la lumière et à l'architecture. Il résonne avec ses premières peintures et  aquarelles méditerranéennes des années 1930, des remparts médiévaux de  Saint-Paul-de-Vence aux maisons vernaculaires de Minorque, aux Baléares. Les  reflets métallisés des feuilles d'or et d'argent soulignent les aspérités du  motif, évoquant un mur éclatant de lumière qui se détache sur un ciel sombre. | 
                      
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                        | Anna-Eva Bergman. N°7-1963,  1963.  Huile et feuille de métal sur  panneau de bois contreplaqué. Fondation Hartung-Bergman. |  | Biographie d'Anna-Eva Bergman (1962 - 1970). | 
                      
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                        | Anna-Eva Bergman. N°4-1967 Montagne  transparente, 1967. Vinylique et feuille de métal sur toile, 180 x 270 cm. Fondation  Hartung-Bergman. © Anna-Eva Bergman / Adagp, Paris, 2023. Photographie © Claire  Dorn. 
 
 
«La nuit était indescriptible. Dépassant tout ce que je pouvais imaginer.  Le plus merveilleux des soleils pendant toute la nuit tandis que nous glissions  entre toutes les silhouettes magiques et étranges que sont les [îles] Lofoten.  Une aventure glorieuse, puissante et improbable. Les montagnes semblent transparentes,  plus rien n'a d'épaisseur. Tout est comme une vision, une possibilité non  encore réalisée. Si l’on veut peindre cela, il faut trouver l'expression qui  suggère l'atmosphère, l'effet des couleurs. En aucune façon naturaliste. » Anna-Eva  Bergman, 29 juillet 1950, Voyage au cap  Nord. |  | Anna-Eva Bergman. N°6-1963  Carboneras, 1963. Huile et feuille de métal sur toile. Fondation  Hartung-Bergman.
 
 
 Amorcé en 1962, le thème de l'horizon fait son apparition dans  la peinture de Bergman et devient pour elle un motif cardinal qui va prendre une  place cruciale jusqu'à la fin de sa vie, en tant qu'il exprime et promet un  «domaine [...] physiquement inatteignable pour l'homme», mais «dont on peut  faire l'expérience». L'intérêt plastique de Bergman pour l'horizon provient de  la topographie de Carboneras, précisément retranscrite dans cette œuvre grâce à  l'emploi des feuilles métalliques. En contrastant avec un ciel très sombre,  leurs reflets reproduisent l'éblouissement ressenti sur cette terre aride  d'Andalousie brûlée par la lumière aveuglante du soleil. | 
                      
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                        | Anna-Eva Bergman. N°34-1965  Montagne sombre, 1965. Huile et feuille de métal sur toile. Fondation  Hartung-Bergman. |  | Anna-Eva Bergman. N°34-1961  Château de Sade, 1961. Huile sur toile. The Tangen Collection / Kunstsilo. | 
                      
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                        | Scénographie  | 
                      
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                        | Anna-Eva Bergman. N°2-1964 Stèle,  1964. Vinylique et feuille de métal sur toile. Musée d'Art Moderne de Paris.  
 
 
Les stèles évoquent les roches taillées ancestrales aux fonctions funéraires ou  sacrées. En Scandinavie, les majestueux et mystérieux monolithes runiques sont autant  de monuments chargés de magie et de légendes qui fascinent Bergman, férue  d'archéologie. L'emploi des feuilles de métal vise à «atteindre un effet  irréel»: la pierre qui compose la stèle perd son épaisseur pour devenir une  surface miroitante. La toile prend une dimension spirituelle, répondant au  souhait de l'artiste d'inciter «le spectateur à ressentir le silence intérieur que  l'on ressent quand on entre dans une cathédrale». |  | Anna-Eva Bergman. N°63-1961 Grand univers aux  petits carrés, 1961. Huile et feuille de métal sur toile. Courtesy of Christen Sveaas  Art Foundation. | 
                      
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                        | Anna-Eva Bergman. L'or de vivre,  1965. Fondation Hartung-Bergman. 
  Réalisée en 1965, cette série qui compte en  tout une vingtaine de gravures sur bois constitue la seconde formalisation  récapitulative du vocabulaire plastique de Bergman, intégrant ses nouvelles  évolutions, notamment le thème de l'horizon, apparu en 1962. Ces œuvres  nourriront les illustrations réalisées pour un livre d'artiste conçu avec Jean  Proal, publié en 1974 et intitulé L'or de  vivre. Le poète puise dans ses romans ou ses nouvelles, tels des poèmes en  prose, ce qui parle le mieux des quatre éléments, puis de la mort, de la vie et  de l'amour, soit sept thèmes. Il laisse toute latitude à l'artiste de choisir  des textes parmi ceux qu'il lui envoie. Bergman commence ses recherches par de  nombreux pastels et lithographies, avant d'en venir à la sélection de onze  gravures sur bois. Le livre et les gravures seront réalisés par Erker, à  Saint-Gall, en Suisse, à la fois librairie, galerie d'art, maison d'édition et  atelier lithographique.  De  gauche à droite et de haut en bas : - La vie, 1965. Tempera, pastel et feuille de métal sur papier.
 - L'eau, 1965. Tempera, pastel et feuille  de métal sur papier.
 - Miroir, 1965. Tempera  et feuille de métal sur papier.
 - L'air, 1965. Tempera, pastel et feuille de métal sur papier.
 - Astre, 1965. Tempera et feuille de métal sur papier.
 - La mort, 1965. Tempera et encre sur  papier.
 - Feu, 1965. Tempera, pastel  et feuille de métal sur papier.
 - Terre,  1965. Tempera et feuille de métal sur papier.
 - Mur, 1965. Tempera et feuille de métal sur papier.
 - Proue, 1965. Tempera, pastel et feuille  de métal sur papier.
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                        | Anna-Eva Bergman. N°26-1962  Feu, 1962. Huile et feuille de métal sur toile, 250 x 200 cm. Fondation  Hartung-Bergman. © Anna-Eva Bergman / Adagp, Paris, 2023. Photographie © Claire  Dorn. |  | Anna-Eva Bergman. N°67-1966 Grand  océan, 1966. Vinylique et feuille de métal sur toile. Fondation  Hartung-Bergman. 
 
 
Cette œuvre est une véritable tentative de capter la liquidité  et la matière de l'eau dans sa réalité terrestre à la fois la plus évidente et  la plus difficile à cerner. Bergman a travaillé en relief les mouvements de  l'eau avec un enduit épais recouvert de feuilles de métal en superposant en  transparence des glacis bleutés. L'ampleur de la toile enveloppe tout entier le  spectateur dans une expérience visuelle qui peut lui donner l'impression de ne  faire qu'un avec l'élément liquide dans une certaine forme de plénitude. Il est  permis de penser à la notion philosophique de «sentiment océanique», conçue par  l'écrivain Romain Rolland dès les années 1920, pour qualifier la sensation  d'unité avec l'Univers ou ce qui nous dépasse, en lien avec l’idée d'éternité. | 
                      
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                        | Scénographie  | 
                      
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                        | Anna-Eva Bergman. N°2-1966 (Hiver  horizon du Nord), 1966. Vinylique et feuille de métal sur toile. Fondation  Hartung-Bergman. 
 
 
Ce Finnmark peut  être interprété comme une évocation de la nature septentrionale de la Norvège,  mais il fait immanquablement penser à un sol lunaire frappé par le soleil et  cerclé par le noir de l'espace interstellaire. Peu de temps sépare cette  peinture des premiers pas de l’homme sur la Lune. Bergman est fascinée par la conquête  de l’espace. Elle est abonnée à la revue Planète et apprécie aussi la science-fiction, notamment Lovecraf, dont elle possède une  édition de Démons et Merveilles de  1955. Cette œuvre excède largement le statut de paysage local et relève de la  vision cosmique. |  | Anna-Eva Bergman. N°12-1967 Grand Finnmark rouge, 1967. Vinylique  et feuille de métal sur toile. Fondation Hartung-Bergman.
 
 
 «C'est du Finnmark et  de la Norvège du Nord que je rêve. La lumière me met en extase. Elle se  présente par couches et donne une impression d'espaces différents en même temps  très très près et très très loin. On a l'impression d'une couche d'air entre  chaque rayon de lumière et ce sont ces couches d'air qui créent la perspective.  C'est magique.» Anna-Eva Bergman, 1979. | 
                      
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                        | Anna-Eva Bergman. N°2-1968 Fjord, 1968. Huile  et feuille de métal sur toile. Fondation Hartung-Bergman. |  | Anna-Eva Bergman. N°11-1968 Grand rond, 1968.  Vinylique et feuille de métal sur toile, 200 x 250 cm. Fondation  Hartung-Bergman. © Anna-Eva Bergman / Adagp, Paris, 2023. Photographie ©  Fondation Hartung-Bergman. | 
                      
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                        | Anna-Eva Bergman. Demi-terre-1974-1975,  1975. Tapisserie (chaîne de coton, trame de laine et louisor argent, basse  lisse). Paris, Mobilier national. 
 
 
Entre janvier 1971 et août 1972, sept  tapisseries issues de trois maquettes réalisées par Bergman sont tissées dans  les prestigieuses manufactures des Gobelins et de Beauvais, puis six autres  productions seront lancées entre 1972 et 1974. Cette Demi-terre est l’un des premiers tissages de 1975 réalisés dans le  cadre de cette collaboration. L'œuvre nous met en situation de contempler notre  planète depuis un autre point de l’espace, comme si nous assistions au coucher  de la Terre depuis un autre astre. |  | Anna-Eva Bergman. N°49-1969 Paysage nordique, 1969. Vinylique et feuille de métal sur panneau de bois contreplaqué,  146 x 98 cm. Fondation Hartung-Bergman. © Anna-Eva Bergman / Adagp, Paris,  2023. Photographie © Claire Dorn. 
 
 
Ses transcriptions paysagères tendent  toujours à être des univers en soi. Bergman, comme Malevitch, Klee ou Kandinsky  avant elle, et comme Mark Rothko, qu'elle rencontre pour la première fois en  1964, voit dans chacune de ses peintures un tout qui «doit contenir sa propre  vie intérieure», selon ses propres mots. Dans les grands formats, aussi bien  que dans les plus petits, elle veut rendre sensible «le mystère cosmique» «à  travers les couleurs et la géométrie». Par le biais de ses étagements colorés, Paysage nordique synthétise la variété  topographique des grands espaces du Nord, l'effet de superposition que  provoquent les reflets de la lumière selon l'alternance des zones glacées, fluviales  ou herbeuses des terres du Finnmark. | 
                      
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                        | Anna-Eva Bergman. N°16-1968  Paysage nuit, 1968. Vinylique et feuille de métal sur toile. Fondation  Hartung-Bergman. |  | Anna-Eva Bergman. N°55-1969 Autre terre, autre lune, 1969. Vinylique et  feuille de métal sur panneau de bois contreplaqué. Fondation  Hartung-Bergman. | 
                       
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 6 - ÉPURES, CAPTATIONS ATMOSPHÉRIQUES
 
 
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                        | Scénographie 
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                            Anna-Eva  Bergman et Hans Hartung s'installent à Antibes en 1973 dans une villa qu'ils  ont fait édifier au milieu d'un champ d'oliviers centenaires. Leurs ateliers  respectifs reflètent leur vision de l'espace, nourrie de toutes leurs  précédentes maisons-ateliers. L'œuvre de Bergman y évolue vers l'expression de  formes simples et monumentales, aux couleurs restreintes, témoignant d’un  minimalisme presque solennel. Elle poursuit la révision de ses thématiques et,  sensible aux aléas météorologiques de la Côte d'Azur, se lance dans l'étonnante  captation atmosphérique de «pluies» et de «vagues». Elle alterne des formats  très petits - qu'elle qualifie de mini-peintures - et très grands.Toujours  perceptibles, les motifs et les paysages sont suggérés par la création d'une  ambiance et par l'expression de sensations captées dans la réalité  environnante, mais ils sont concentrés en de majestueux signaux: sensation du  reflet de la lumière sur une étendue glacée; vision d’un pan de montagne ou  d’une proue se découpant sur la nuit polaire; lac ou étendue d'eau miroitant à  l'aube; terre aride brûlée par le soleil; ciel blanchi par le blizzard ou la  chaleur; horizon paraissant démultiplié dans la superposition des effets de  lointains ou tranché net entre le sol et le ciel; barque ou planète glissant  dans l'espace. Comme le montre dans sa peinture la récurrence du thème funèbre  de la demi-barque, symbole de danger et de mort, l'artiste apparaît consciente d'une  certaine finitude: la sienne et celle du monde.
 
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                        | Texte du panneau didactique. |  | Anna-Eva Bergman. N°45-1971 Crête de  montagne, 1971. Acrylique, modeling paste et feuille de métal sur toile, 200 x 150 cm. Musée d’Art Moderne de Paris. ©  Anna-Eva Bergman / Adagp, Paris, 2023. Photographie © Laurent Chapellon – Key  Graphic. | 
                      
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                        | Anna-Eva Bergman. N°21-1974 Pluie,  1974. Acrylique, modeling paste et  feuille de métal sur toile. Fondation Hartung-Bergman. |  | Biographie d'Anna-Eva Bergman (1970 - 1987). | 
                      
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                        | Scénographie  | 
                      
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                        | Anna-Eva Bergman. N°14-1983,  1983. Acrylique et encre sur carton baryté marouflé sur panneau de bois. Fondation  Hartung-Bergman. |  | Anna-Eva Bergman. N°32-1973 Ciel noir, 1973.  Acrylique et feuille de métal sur toile, 81 x 100 cm. Collection privée, Paris.  © Anna-Eva Bergman / Adagp, Paris, 2023. Photographie © Galerie Poggi. | 
                      
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                        | Anna-Eva Bergman. N°16-1983,  1983. Acrylique et encre sur carton baryté marouflé sur panneau de bois. Fondation  Hartung-Bergman. |  | Anna-Eva Bergman. N°49-1973 Vague  baroque, 1973. Acrylique, modeling  paste et feuille de métal sur toile. Fondation  Hartung-Bergman. | 
                      
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                        | Scénographie  | 
                      
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                        | Scénographie  | 
                      
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                        | Anna-Eva Bergman. N°18-1974 Cap  d’Antibes, 1974. Acrylique et feuille de cuivre oxydé sur toile. Fondation  Hartung-Bergman. |  | Anna-Eva Bergman. N°14-1975 Mistral, 1975. Acrylique, modeling paste et feuille de métal  sur toile. Fondation Hartung-Bergman. | 
                      
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                        | Anna-Eva Bergman. De haut en bas et de gauche à droite : - N°68-1970  Maison avec fenêtre d'or, 1970. Encre de Chine et feuille de métal sur  carton. Fondation Hartung-Bergman.
 - N°19-1970  Grand Nunatak, 1970. Encre de Chine sur papier. Fondation Hartung-Bergman.
 - N°53-1970 Grande montagne noire,  1970. Encre de Chine sur carton. Fondation Hartung-Bergman.
 - N°66-1970 Barque, 1970. Encre de Chine  et mine de plomb sur papier. Fondation Hartung-Bergman.
 - N°18-1970 Deux astres noirs, 1970. Encre de Chine sur papier.  Fondation Hartung-Bergman.
 - N°69-1970  Arbre, 1970. Encre de Chine sur papier. Fondation Hartung-Bergman.
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                        | Scénographie  | 
                      
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                        | Anna-Eva Bergman. N°15-1975 Rocher sauvage, 1975. Acrylique et feuille de métal  sur toile. Musée d’Art Moderne de Paris. |  | Anna-Eva Bergman. N°39-1983,  1983. Acrylique sur toile. Musée d’Art Moderne de Paris. | 
                      
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                        | Anna-Eva Bergman. N°16-1986,  1986. Acrylique et feuille de métal sur toile. Musée d’Art Moderne de Paris. |  | Anna-Eva Bergman. N°18-1976  Montagne rouge, 1976. Acrylique et feuille de métal sur toile. Musée d’Art  Moderne de Paris. | 
                      
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                        | Scénographie  | 
                      
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                        | Anna-Eva Bergman. N°27-1979  Contour d’un rocher, 1979. Acrylique et feuille de métal sur papier  marouflé sur panneau de bois. Musée d’Art Moderne de Paris. |  | Anna-Eva Bergman. N°29-1979 Rayon  de lumière, 1979. Acrylique et feuille de métal sur papier marouflé sur  panneau de bois. Musée d’Art Moderne de Paris. | 
                      
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                        | Scénographie  | 
                      
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                        | Anna-Eva Bergman.  N°13-1976  Deux Nunataks, 1976. Acrylique et feuille de métal sur toile, 150 x 300 cm. Fondation  Hartung-Bergman. © Anna-Eva Bergman / Adagp, Paris, 2023. Photographie ©  Fondation Hartung-Bergman. |  | Anna-Eva Bergman. N°21-1981 Pic de  montagne II, 1981. Acrylique et feuille de métal sur toile. Fondation  Hartung-Bergman. | 
                      
                       
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                        | Scénographie. Sur le mur : Anna-Eva Bergman. N°20-1987, 1987. Acrylique, modeling paste et  feuille de métal sur toile. Fondation Hartung-Bergman.
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