ALPHONSE MUCHA

Article publié dans la Lettre n° 468
du 12 décembre 2018


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ALPHONSE MUCHA. Depuis la rétrospective du Grand Palais en 1980, cette exposition est la première consacrée à cet artiste à Paris. Avec 195 œuvres elle rend compte non seulement de ses travaux dans le style Art nouveau, mais aussi dans tout ce qu’il fit après l’Exposition universelle de 1900, une œuvre bien moins connue mais plus ambitieuse.
Mucha, né en 1860 en Moravie, commence des études de beaux-arts à Munich, puis s’installe à Paris en 1887 pour étudier à l’Académie Julian, grâce au soutien financier du comte Eduard Khuen-Belasi, dont il avait décoré le château. En 1889, n’ayant plus ce soutien financier, il commence à travailler comme illustrateur pour des éditeurs de Paris et de Prague. Le 1er janvier 1895 paraît son affiche pour Gismonda, une pièce jouée par Sarah Bernhardt. La grande tragédienne est tellement contente qu’elle s’attache les services de Mucha par un contrat de six ans pour concevoir les décors, les costumes et les affiches de ses productions.
La première partie de l’exposition, « Un Bohémien à Paris », est essentiellement consacrée à ses affiches pour Sarah Bernhardt. On y voit aussi des photographies et une évocation de son amitié avec Gauguin, avec qui il partagea son atelier. La section suivante, « Un inventeur d’images populaires » déploie tout ce qui a rendu Mucha célèbre. C’est véritablement avec lui qu’est né, entre 1885 et 1890, l’Art nouveau. En 1900 il est devenu un maître de l’affiche et le décorateur le plus recherché et le plus copié de Paris. À côté de ses affiches hautes et étroites pour des champagnes et autres produits, nous avons des panneaux décoratifs sans texte, comme les Saisons, des plats, des boîtes, des photographies, etc. Mucha n’était pas qu’un peintre mais aussi un sculpteur, un photographe, un créateur de bijoux etc. C’est ce que montre la troisième section, « Mucha le cosmopolite », où l’on voit certaines de ses réalisations pour l’Exposition universelle de Paris de 1900, où il fit la décoration du pavillon de Bosnie-Herzégovine, une région slave annexée à l’Autriche-Hongrie depuis 1878. On y voit aussi des bijoux qu’il créa pour le joaillier parisien Georges Fouquet, dont il conçut également la boutique, intérieur et extérieur, ainsi que le mobilier et les décors. Cette boutique est reconstituée aujourd’hui dans le musée Carnavalet.
En 1894, Mucha fait la connaissance d’August Strindberg, ami de Gauguin. Strindberg, très intéressé par l’occultisme et la théosophie, transmet sa passion à Mucha qui entre dans une loge maçonnique. Son œuvre s’en ressent et il pense qu’en diffusant par son art ce message sur les trois vertus que sont la Beauté, la Vérité et l’Amour, il contribue au progrès de l’humanité. Parmi les œuvres exposées dans la section « Mucha, le mystique », nous avons des photographies, dont une de Mucha en habit de franc-maçon, une série d’aquarelles sur le thème de La Lune et les étoiles et surtout ses illustrations pour le Pater.
Après la décoration du pavillon de Bosnie-Herzégovine, Mucha conçoit le projet d’un vaste ensemble à la gloire des peuples slaves. « Mucha le patriote » illustre cet ambitieux projet qui deviendra L’Épopée slave, avec des tableaux préparatoires et une vidéo présentant les vingt tableaux de très grandes dimensions qu’il peignit, grâce au mécénat de Charles Richard Crane, un riche américain intéressé par la culture slave. En 1928, Mucha et Crane offrent la série complète à la ville de Prague, à l’occasion du dixième anniversaire de l’indépendance du pays.
La dernière section, « Artiste et philosophe », présente des œuvres pour lesquelles l’artiste exprime ses préoccupations humanitaires, dans l’espoir de rapprocher les peuples. Citons dans ce contexte La France embrasse la Bohème (vers 1919) et La Russie doit se redresser (1922), parmi bien d’autres. Le 15 mars 1939, les troupes allemandes font leur entrée dans Prague. Mucha, « dangereux patriote peintre » et franc-maçon, est l’une des premières personnes arrêtées par la Gestapo. Il décédera, découragé et atteint d’une pneumonie, quatre mois plus tard. Une exposition magistrale bénéficiant d’une belle scénographie. R.P. Musée du Luxembourg 6e. Jusqu’au 27 janvier 2019. Lien : www.museeduluxembourg.fr.


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