ALBERT BESNARD. Modernité Belle Époque. Avec cette exposition le  Petit Palais renoue avec ce que nous apprécions le plus dans ses  manifestations, la (re)découverte d’un peintre oublié (Pelez, De Nittis, Sert,  Ziem, Forain, Severini, Desvallières, …) et pas des moindres. Albert Besnard  (1849-1934) était la gloire de la peinture française à la Belle Époque. Il fut  comblé d’honneurs et de charges : Grand Prix de Rome (1874), membre de  l’Académie des Beaux-Arts (1912), directeur de la Villa Médicis (de 1913 à  1921), membre de l’Académie française (1924),  directeur de l’Ecole des Beaux-Arts (de 1922 à 1932). Enfin la République lui  fit des funérailles nationales, les premières pour un peintre. Tout cela le  rendit sans doute suspect et on le rangea bien vite au rayon des  « académiques stériles ». Quelle erreur !
                Dans une scénographie  exceptionnelle du Studio Tovar, qui recrée l’atmosphère fin de siècle de  l’atelier de Besnard, les commissaires nous présentent, à l’occasion de cette  rétrospective, un ensemble d’œuvres (peintures, pastels, gravures, …) nous  dévoilant les multiples facettes de ce peintre exceptionnel.
                Avant même d’entrer dans les  salles d’exposition, nous avons un aperçu de son œuvre avec des gravures (série Les Petites Voluptés ; Les  Morphinomanes) et des toiles aux couleurs vives – qui firent sa renommée –  comme Femme assise dans un fauteuil au  bord du lac d’Annecy ou La Dormeuse (vers 1890) ou Une famille ou Portrait de famille (1890) où il représente sa femme  et ses quatre enfants dans sa villa de Talloires, lui-même apparaissant au fond  du tableau à côté de sa belle-mère. Nous voyons aussi un buste grandeur nature  de l’artiste, à la carrure imposante, réalisé en bronze par son fils Philippe  Besnard, sculpteur comme sa mère, Charlotte Dubray, qu’Albert Besnard rencontra  à Rome et dont on voit une œuvre, La  Salamandre (1903), plus loin, dans les salles d’exposition.
                La première salle « Devenir  peintre » nous montre des portraits  et d’autres sujets dont ceux qu’il fit durant  les quatre années de son séjour à Rome à la Villa Médicis. Dans ces derniers,  en particulier dans le Portrait d’André  Wormser (1877), on note la grandiloquence de sa signature (comme Bernard  Buffet le fit plus tard !) qu’il simplifiera par la suite. Dans cette  salle est évoqué le séjour qu’il fit à Londres de 1880 à 1883, où il découvrit  la peinture préraphaélite et fit la connaissance du graveur Alphonse Legros. Ce  séjour fut déterminant pour lui, lui faisant adopter une palette plus vive et  le familiarisant avec la gravure.
                Le parcours continue avec  « Le portrait : entre intimisme et mondanités ». On y découvre  une quinzaine de toiles dont le Portrait  de madame Roger Jourdain (1886), le plus célèbre, qui fit scandale au Salon  de 1886 à cause de ses contrastes colorés violents, bien loin des représentations  naturalistes de l’époque. Ses portraits lui attirèrent de nombreuses commandes.  A côté des toiles sont exposées un grand nombre de gravures, dont celles de  tous les membres de sa famille.
                Avec « le décorateur »  nous touchons à ce qui faisait la renommée d’un peintre, la décoration  d’édifices publics. Albert Besnard fut comblé, et pas seulement en France. Nous  voyons des esquisses pour l’Hôtel de Ville de Paris, pour les mairies des Ier  et XIXe arrondissements, pour l’Ecole de Pharmacie, la Comédie Française et  aussi le Petit Palais. En effet c’est Albert Besnard qui décora l’immense  coupole que l’on voit en entrant dans le musée. Les scénographes ont aussi eu la  bonne idée de coller au plafond des reproductions de certaines de ces décorations. 
                La salle suivante « Les  féeries du pastel » nous offre une dizaine de portraits, tous féminins,  avec des toilettes vaporeuses et colorées. Albert Besnard contribua grandement  à redonner goût à cette technique dont il fit l’éloge. 
                Nous arrivons ensuite dans deux  sections très différentes des précédentes. Fini les portraits somptueux, les  décors monumentaux. Place à la gravure, avec deux séries intitulées La Femme et Elle. La première présente la vie d’une femme, du succès à la  déchéance finale, de la rencontre de l’amour jusqu’à la mort. La seconde nous  représente la mort, sous forme d’un squelette, s’introduisant dans l’intimité  des personnages, à travers 26 eaux-fortes. Les deux séries ont un pouvoir  dramatique très fort évoquant Goya, que Besnard admirait.
                Enfin, avec « Les libertés  de l’ailleurs », le parcours s’achève par un voyage aux Indes, où Besnard  séjourna sept mois en 1910, après de précédents voyages en Espagne, au Maroc et  en Algérie. Cela lui inspira des tableaux aux couleurs très intenses comme Sur le Pont de Trichinopoly (1911-1912)  ou Un Howdah (1912) et un livre L’Homme en rose ou l’Inde couleur de sang (1913).  Une exposition éblouissante et un modèle en matière de scénographie. R.P. Petit Palais 8e. Lien: www.petitpalais.paris.fr.