RAPHAËL À CHANTILLY
Le Maître et ses élèves

Article publié dans la Lettre n°500 du 1er avril 2019



 
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RAPHAËL À CHANTILLY. Le maître et ses élèves. C’est peut-être la seule exposition en France consacrée à ce grand maître de la Renaissance à l’occasion du cinq-centième anniversaire de sa mort. Avec le musée Condé, le domaine de Chantilly possède, après le Louvre, la plus importante collection de peintures anciennes ainsi qu’un fonds de dessins renommé pour sa qualité. L’ensemble a été acquis par Henri d’Orléans, duc d’Aumale (1822-1897). Parmi ses trésors, outre l’incontournable Livre d’Heures d’Étienne Chevalier avec ses 40 miniatures de Jean Fouquet, le musée Condé détient trois tableaux autographes de Raphaël (autant que le Louvre), parmi les plus célèbres, et un grand nombre de dessins. Si les tableaux sont bien évidemment exposés en permanence, dont deux dans Le Santuario, une véritable chambre forte, les dessins, comme toutes les œuvres fragiles, ne sont visibles que durant cette exposition.
Les trois tableaux de Raphaël (1483-1520)  détenus par le musée Condé sont tout d’abord Les Trois Grâces (vers 1503-1504), l’un des plus renommés mais aussi l’un des plus petits, qui figure parmi les premières œuvres profanes de l’artiste. Vient ensuite La Madone de la maison d’Orléans (vers 1506-1507), un tableau qui avait appartenu à la famille du duc d’Aumale, mais avait été vendu avec sa collection par Philippe Égalité, son grand-père, qui connaissait alors quelques difficultés financières. Le troisième, La Madone de Lorette (vers 1510-1512), l’une des œuvres les plus fameuses de Raphaël, dont il existe quelque 120 copies, était considéré au XIXe siècle comme une copie. Mais, au cours d’une restauration effectuée entre 1976 et 1979, on a découvert sur celui-ci le numéro 133, marque d’un inventaire réalisé en 1693. Ce que le duc d’Aumale prenait pour une copie était donc l’original ! On s’intéressera aussi à un quatrième tableau, peint par Perino del Vaga (1501-1547), un élève de Raphaël, La Sainte Famille (vers 1539-1540) qui fait le pendant du précédent.
Si la scénographie n’est pas idéale (l’exposition se tient dans les petits appartements), la cinquantaine de dessins et peintures, dont une vingtaine de Raphaël ou de son atelier est tout à fait remarquable. Comme Vinci ou Michel-Ange, Raphaël dessinait beaucoup pour préparer ses tableaux ou ses fresques. Mathieu Deldicque, le commissaire, souligne l’apparente facilité et la perfection de ces œuvres. Jamais avant lui un artiste n’avait porté le dessin à un tel sommet. Raphaël utilise toutes les techniques de son temps, plume, sanguine, pierre noire ou encore pointe de métal sur un papier généralement préparé. Nous en avons deux exemplaires, prêtés par le Palais des Beaux-Arts de Lille, sur lesquels on voit, entre autres, des esquisses de l’enfant de La Madone de Lorette.
Le parcours se déroule en cinq sections. La première « La genèse du génie » nous présente des dessins de l’atelier du Pérugin (1445-1523) et de l’atelier de Pinturicchio (1454-1513) à côté de deux dessins de Raphaël. En effet le peintre et premier historien de l’art Giorgio Vasari (1511-1574) écrit que Giovanni Santi, le père de Raphaël, lui-même peintre à Urbino, voyant qu’il n’avait plus rien à apprendre à son fils l’aurait confié à Pietro Perugino, dit le Pérugin. Aucun autre texte ne l’attestant, il est probable que Raphaël a été inspiré par ses dessins alors qu’ils travaillaient tous deux à Pérouse. Il en est de même avec Pinturicchio qui demanda à Raphaël de l’assister pour des fresques à Sienne.
La deuxième section « Dans le cœur en fusion de la Renaissance : Raphaël à Florence » est presqu’entièrement consacrée à des dessins de Raphaël ou d’après lui. À côté de la magnifique Vierge assise avec l’Enfant et le petit saint Jean, dans un paysage, on a plusieurs dessins de nus. En effet, la plupart du temps Raphaël dessinait sans modèle et représentait nues ses esquisses, même si elles étaient vêtues dans le tableau final. Nous en avons un bel exemple avec cette Étude de Cinq figures nues pour une Vierge à l’enfant qui renvoie directement à La Sainte Famille Canigiani (vers 1506-1507), conservée à Munich, dont le commissaire présente une petite reproduction. Il en est de même pour d’autres dessins préparatoires que l’on peut voir dans cette salle et surtout dans la salle suivante « Au faîte de la gloire : Raphaël et la Rome des papes ». On admire ici son talent avec l’Étude pour la Dispute du Saint Sacrement, préparation d’une fresque ambitieuse pour le studiolo du pape Jules II. Dans cette salle sont également rassemblées trois peintures d’apôtres issues de cartons de tapisseries (ici La remise des clés à saint Pierre) commandées à Raphaël par le pape Léon X.
La salle suivante est consacrée au plus talentueux (« Le premier des raphaélesques ») élève de Raphaël, Giulio Romano (1492 ou 1499-1546). On y voit des études de peintures, de fresques, de tapisseries et même de sculptures.
Enfin, dans la dernière section, « De Gênes à Rome : L’école de Raphaël » sont rassemblés des dessins de divers élèves de Raphaël, mort prématurément à l’âge de 37 ans, qui ont poursuivi son œuvre, en particulier la décoration de la salle de Constantin au Vatican. Parmi ceux-ci deux sont mis en avant. Il s’agit de Polidoro da Caravaggio (1499/1500-1543) et de Perino del Vaga (1501- 1547) dont on admire les magnifiques dessins de façades, de plafonds ou de décors. Un excellent catalogue accompagne cette rare exposition. R.P. Musée Condé. Château de Chantilly 60. Jusqu’au 5 juillet 2020. Lien : www.domainedechantilly.com.


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