NAPOLÉON. De toutes les  expositions consacrées cette année à Napoléon, en commémoration du bicentenaire  de sa mort, le 5 mai 1821 à 5h49 de l’après-midi, celle-ci est la plus  imposante. Elle réunit dans une scénographie originale et majestueuse un grand  nombre d’objets et de tableaux prestigieux avec une documentation écrite ou  numérique abordant tous les aspects de cet illustre personnage.
                Afin de réguler le flot de visiteurs, les  commissaires nous présentent dans un vestibule une vidéo sur « Le Monde  avant Napoléon » devant sept bustes de celui-ci, à différentes périodes de sa vie, de 1780 à 1820, sculptés par Eugène  Guillaume vers 1859. Le parcours en neuf  sections commence par « Brienne ». C’est dans cette école militaire  que le petit Napoléon, boursier âgé de dix ans, passa cinq ans, au milieu de  camarades issus de la noblesse, se moquant de son accent corse. Cela contribua  à forger son caractère et sa détermination.
  À une époque, l’après-Révolution, où l’on  renvoie les généraux issus de l’aristocratie, Bonaparte, comme d’autres, est  promu général de brigade, à l’âge de vingt-quatre ans, après son coup d’éclat durant  le siège de Toulon, occupé par les anglais. Il est alors envoyé par le  Directoire en Italie pour combattre les Autrichiens. Antoine-Jean Gros  illustrera cette campagne avec le fameux tableau Bonaparte au pont d’Arcole (1796). Ensuite c’est la  campagne d’Égypte, moins glorieuse car sa flotte est défaite à Aboukir par  l’amiral Nelson, mais fructueuse sur le plan de l’égyptologie (Description de l’Égypte, ouvrage  fondateur, et nombreux vestiges ramenés en France) et de l’égyptomanie qui en  découla.
                Vient ensuite une section consacrée à  « La République de Napoléon ». Celle-ci commence avec le coup d’État  du 18 brumaire en 1799 et se termine par son sacre en présence du pape, le 2  décembre 1804, en la cathédrale Notre-Dame de Paris. Républicain convaincu mais  de plus en plus autoritaire et ne souffrant pas la contradiction, Bonaparte,  Premier consul, puis bientôt consul à vie, transforme la France en profondeur.  On lui doit la création de la Banque de France, du corps préfectoral, du code  civil, des lycées, du Conseil d’État, etc. Le code civil en édictant que « Le mari doit protection à sa femme, la  femme obéissance à son mari » (article 213) marque une nette  régression du statut de cette dernière, à qui la Révolution avait accordé le  droit de divorcer très facilement. Durant cette période, Bonaparte signe le  traité d’Amiens (1802) avec l’Angleterre, marquant une pause dans le conflit  opposant les deux pays depuis Louis XIV. Sa gloire étant immense, il se fait  nommer empereur par le Sénat, décision ratifiée par un plébiscite en juillet  1804.
                L’exposition illustre cette nouvelle période,  « L’Empereur » en nous présentant son trône, conservé aujourd’hui au  Sénat, l’immense portrait de François Gérard, Napoléon Ier, empereur des Français (1808) et celui de Joséphine,  la fameuse Épée du sacre, toute ornée de diamants, et des milliers de pièces de  20 francs et de 40 francs or. Une projection animée et commentée nous présente  également le tableau de David, Le Sacre  de Napoléon (1805-1807).
                En transition avec la section suivante, nous  avons une illustration du « Luxe sous l’Empire » avec une period room présentant un ameublement de  salon avec des objets exceptionnels (vases de Sèvres, commode, secrétaire,  fauteuils, etc.). Sont exposés aussi une partie du fameux « service particulier de l’empereur »  et du « Grand Vermeil »  (746 pièces de vermeil), un somptueux nécessaire  de voyage et d’autres objets tout aussi éblouissants.
                L’exposition évoque aussi les deux  impératrices, Joséphine, avec son long manteau de cour et Marie-Louise, ainsi  que son fils le Roi de Rome, dont on voit le berceau et les objets (brassière,  jeu de loto, figurines, etc.) qu’il possédait quand il était enfant.
                Viennent ensuite les autres faits de guerre.  Les commissaires exposent toutes sortes d’objets d’époque en rapport avec  « Le chef de guerre » qu’était Napoléon. À côté d’un canon et d’un  fourgon à munitions, nous avons des costumes de soldats sur des mannequins, y  compris à cheval, et des vêtements ayant appartenu à l’empereur ou à ses  généraux. Mais le plus intéressant est ce Bivouac  de l’Empereur Napoléon Ier, celui-là même qu’il utilisa à partir de  1808, avec son lit, sa table, ses sièges, etc.
                Après une petite section intitulée  « Napoléon et l’Europe », où l’on nous rappelle qu’il plaça les  membres de sa famille à la tête d’États stratégiques, on en vient à son  « Déclin » avec des batailles à l’issue indécise, voire  catastrophique comme la campagne d’Espagne (1808-1814) et surtout l’abominable  campagne de Russie (1812) où plus de 200 000 soldats laissèrent leur vie.
                Après la bataille de Leipzig (16-19 octobre  1813) et l’entrée des coalisés à Paris (mars 1814), Napoléon est contraint  d’abdiquer et il est exilé à l’île d’Elbe. On connaît la suite. Les Cent Jours,  durant lesquels il abolit l’esclavage dans les colonies où lui-même l’avait  rétabli ou maintenu en 1802, Waterloo où il provoque la coalition mobilisée  contre lui, sa seconde abdication et son exil, cette fois dans une île perdue  dans l’Atlantique sud, à 7000 km de la France, Sainte Hélène.
                On le voit, cette exposition est riche en  témoignages de toutes sortes. Mais il y a, en plus de cela, de nombreuses  vidéos avec des entretiens relatifs à l’esclavage, à l’exercice de l’État, à la  vie des français, aux soldats morts durant ces guerres, etc. et même la lecture  des lettres d’amour de Napoléon à Joséphine par Lou Doillon. Une très belle  exposition, très enrichissante. On regrettera seulement un éclairage trop  faible créant de fâcheuses zones d’ombre sur de nombreux objets. R.P. Grande Halle de la Villette 19e. Jusqu’au 19 décembre 2021. Lien : www.rmn.fr.