CHEVEUX CHERIS
Frivolités et trophées

Article publié exclusivement sur le site Internet, avec la Lettre n° 356
du 17 juin 2013


CHEVEUX CHERIS. Frivolités et trophées. Voici un sujet aussi étonnant qu'original que traite d'une manière complète et savante Yves Le Fur, commissaire de cette exposition. Le cheveu, effectivement, n'est pas un élément banal. A Auschwitz, par exemple, la seule chose que les visiteurs n'ont pas le droit de photographier est l'incroyable quantité de cheveux récupérés par les nazis. De tout temps, et en tous cas déjà à l'époque de la Vénus de Brassempouy (vers 21 000 ans avant J.-C.), l'homme se préoccupe de sa chevelure. En guise de prologue, l'exposition nous présente donc des photos, des tableaux et des bustes de personnalités, où l'on voit que la chevelure est toujours un élément soigné et de formes très variées.
La première partie, « Frivolités ? », précise le propos. Les cheveux sont assurément l'objet de soins et de recherche dans la présentation de la part de ceux qui les portent, tant pour séduire que par estime de soi. La coiffure permet de se différencier, de montrer son appartenance à un groupe, de manifester son caractère : cheveux longs du rebelle ou de l'artiste, crâne rasé du moine. La couleur du cheveu est aussi une caractéristique, tant naturelle qu'artificielle, et cela depuis longtemps déjà. Des théories sans fondement - le cheveu blond de la race aryenne par exemple - associent le caractère de la femme à la couleur de ses cheveux !
L'exposition nous montre un grand nombre de coiffures de toutes les époques et de tous les peuples. La diversité est incroyable, allant de la coiffure stricte du chignon, de la tresse ou de la natte, aux coiffures complexes de certaines femmes africaines. Longtemps les cheveux dénoués n'ont été admis que dans la sphère du privé et de l'intime, suggérant une intimité offerte quand on les rencontre dans l'espace public. La coiffure est aussi associée au genre et elle permet de s'approprier l'un ou l'autre sexe.
La deuxième partie de l'exposition, « La perte », aborde des sujets dramatiques allant de la perte naturelle des cheveux à celle, plus douloureuse, provoquée par une chimiothérapie ou en représailles. Dans ce dernier cas nous avons les nattes coupées des femmes adultères ou celles dérobées par les fétichistes et surtout la vague de tonsures de femmes à la fin de la deuxième guerre mondiale, sujet magistralement illustré par Robert Capa. La perte des cheveux ou le fait de les cacher sont aussi des rituels de passage d'un âge à un autre, d'un statut à un autre, comme on le voit chez certains musulmans.
La dernière partie, « Pouvoirs du cheveu »", nous montre comment les hommes, dans des cultures non européennes, s'approprient les pouvoirs de ceux qui possédaient les cheveux qu'ils ont pris. Les exemples les plus connus sont les collectes de scalps et la réduction des têtes par les indiens jivaros. Ces derniers attachent une très grande importance à la préservation des cheveux comme le montre les têtes exposées. Les cheveux servent aussi de composants dans certaines parures, soit par coquetterie soit par symbolisme.
On le voit, le sujet est bien plus important qu'on pouvait l'imaginer, et cette exposition, très didactique et bien présentée, permet de voir un grand nombre d'objets originaux, tant artistiques qu'ethnologiques. Musée du Quai Branly 7e. Jusqu'au 14 juillet 2013. Pour voir notre sélection de visuels, cliquez ici. Lien : www.quaibranly.fr.


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