LA
VIE DE CHANTIER
Article
publié dans la Lettre n° 222
LA VIE DE CHANTIER de Dany Boon avec
Dany Boon, Marie-Sophie L, Julia Duchaussoy, Zinedine Soualem, Frédéric
Bouraly, Christian Zanetti, Jean-François Elberg.
Vendre son appartement du XVIe pour un pavillon de la banlieue nord,
pompeusement baptisé hôtel particulier dans la banlieue ouest, c’est
aventureux. Mettre ledit hôtel dans les mains d’un architecte choisi
parce qu’il a restauré le château du beau-père sans connaître davantage
l’oiseau rare, c’est hasardeux, engager deux ouvriers au noir pour
faire les travaux, c’est inconsidéré, mais penser, ne serait-ce
qu’une seconde, que tout sera prêt le jour dit, là ce n’est pas
insensé, cela appartient au domaine de l’utopie! C’est pourtant
dans cette impasse que s’est fourvoyé Charles Boulin, tout simplement
pour avoir voulu faire une surprise à sa femme adorée. Dès l’instant
où il a franchi le seuil de sa nouvelle demeure, deux jours avant
la date convenue pour la fin des travaux, Charles sent obscurément
qu’il va vivre un cauchemar mais il ignore encore à quel point.
Pour sauver son couple du naufrage, il n’a pas d’alternative: il
doit impérativement faire terminer les travaux afin de revendre
le pavillon pour racheter l’avenue Foch, persuader son banquier
de lui octroyer un crédit supplémentaire, le tout sans perdre ni
sa femme, ni son travail.
On l’imagine sans peine: Dany Boon a matière à une excellente comédie
mais encore faut-il étoffer l’argument initial et créer suffisamment
de rebondissements pour que l’action ne tombe pas comme un soufflet.
L’imagination et le sens du vécu, celui des l’observation et des
réparties sont les principales qualités que déploie Dany Boon pour
réussir haut la main un pari pas gagné d’avance, celui de rendre
permanentes l’hilarité et l’attention du public plus de deux heures
durant. Il faut dire que, contrairement à celle du fameux chantier,
l’équipe dont il s’est entouré est remarquable pour son efficacité.
Le décor est à lui seul un personnage. Avec la collaboration géniale
de Jacques Rouveyrollis pour les lumières, Stéphanie Jarre s’est
surpassée. Les lieux sont hallucinants et presque crédibles pour
ceux qui ont vécu ce genre de situation. La mise en scène aiguillonne
des comédiens irrésistibles, Dany Boon, merveilleusement dépassé
par des événements qu’il ne contrôle plus, a bien du mal à tenir
son sérieux face à un Zinedine Soualem déchaîné en plombier «maçonnier»
portugais. Julie Duchaussoy est une Elisabeth craquante et têtue
face à sa mère Marie-Sophie L, irrésistible, qui semble tout droit
sortie de la noblesse catho bien pensante. Frédéric Bouraly, Christian
Zanetti et Jean-François Elberg ne sont pas de reste pour animer
ce spectacle désopilant. Théâtre du Gymnase Marie Bell 10e.
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