VICTOR
OU LES ENFANTS AU POUVOIR
Article
publié dans la Lettre n° 273
VICTOR OU LES ENFANTS AU POUVOIR de
Roger Vitrac. Mise en scène Alain Sachs avec Lorànt Deutsch, Christine
Millet, Philippe Uchan, Cerise, Urbain Cancelier, Fabienne Chaudat,
Isabelle Tanakil, Pierre Aussedat, Caroline Maillard. Aujourd’hui,
6 janvier, Victor a neuf ans. Chacun sait « que cet âge est sans
pitié » sans compter que le bonhomme a décidé de « devenir quelque
chose de neuf ». Grand, 1m70, et précoce, il ravit ses parents et
ses professeurs. Lui d’ordinaire plutôt sage, devient d’un coup
l’exemple même du sale gosse, fils unique et gâté . Lili, la bonne
a vu juste : « il n’a que neuf ans mais il promet, le toto ». Ce
soir, c’est la fête. Esther, sa petite amie de cinq ans arrive avec
un ours pour cadeau. Elle est suivie parThérèse, sa mère, dont le
mari, Antoine, est provisoirement resté à la maison, sujet à des
crises de folie. Charles Paumelle et sa femme Emilie, amphitryons
et parents de Victor, l’assurent de leur affectueux soutien. L’incontournable
Général s’est joint à eux. Puis une dame, aussi étrange que péteuse,
fait son apparition. Ida Mortemart se présente comme une amie d’enfance
de Thérèse. Les flatulences qu'elle ne peut contenir, plongent l'assistance
dans la stupeur puis dans l'hilarité. Elle fait trois petits tours,
quelques pas de tango puis s’en va, non sans avoir ému Victor...
Un vent de folie organisé par l'enfant s’est emparé du logis. Conscient
de la laideur du monde qui l’entoure, il la dénonce et sème le chaos
avec une impitoyable clairvoyance. La fête commence par le bris
d’un vase de chine. Elle se termine par la mort de Victor qui préfère
quitter ce monde plutôt que de continuer d’y vivre dans l’hypocrisie
et les faux semblants. Considéré comme le précurseur de l’absurde,
Roger Vitrac a créé cette « satire corrosive du conformisme bourgeois »
avec Antonin Artaud en 1928. Mais la pièce ne lui permettra d’atteindre
la notoriété auprès du public que lorsque Jean Anouilh la reprendra
au Théâtre de l’Ambigu en 1962, dix ans après la mort de son auteur.
Véritable farce surréaliste, Cette œuvre iconoclaste et subversive
est une peinture au vitriol des moeurs la société de son temps.
Si un vent de folie souffle sur elle, il souffle aussi sur la scène,
grâce à une mise en scène échevelée d’Alain Sachs et à l’interprétation
virevoltante de tous les comédiens. Le rôle de Victor est fait pour
Lorànt Deutsch. Extraordinaire en gamin de neuf ans, il gratifie
de ses pitreries un public conquis d’avance , talonné par une fabuleuse
Caroline Maillard, Esther craquante et désopilante. Philippe Uchan
et Cerise, Les époux Paumelle, Urbain Chancelier (excellent dans
sa tirade sur Bazaine) et Christiane Millet, les Magneau, forment
deux couples inénarrables tandis que Pierre Aussedat, Le Général
et Isabelle Tanakil, énigmatique Ida Mortemart, complètent la distribution
avec talent.Vêtus avec élégance ou à la diable, ils évoluent dans
un décor bourgeois très bien conçu et s’en donnent à cœur joie,
dirigés avec excellence par un metteur en scène inspiré. Théâtre
Antoine 10e.
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