VAN GOGH, AUTOPORTRAIT
Article
publié dans la Lettre n° 331
du
24 octobre 2011
VAN GOGH, AUTOPORTRAIT de et par Jean
O’Cottrell, d’après la correspondance de Vincent van Gogh et
de Van Gogh le suicidé de la société d’Antonin Artaud. Compagnon
artistique François Chattot.
Il est seul en scène, assis sur une chaise, resserré sur lui-même,
dans un silence de méditation et de recueillement. Il, c’est Vincent
Van Gogh, que la ressemblance de Jean O’Cottrell à son modèle rend
immédiatement présent. Il se déplie et commence ses pérégrinations
volubiles au cœur de son atelier, au cœur de ses pensées et divagations,
entre souffrance et solitude, dans l’apparente folie qui monte inexorablement.
Seul, assoiffé de chaleur humaine, en quête d’amours même vénales,
dans ce refus et cette incompréhension que lui opposent sa famille,
le monde environnant. Et pourtant ce monde qui lui refuse l’originalité
et la non-conformité, le peintre génial le voit et le magnifie,
sans amertume aucune, dans la luxuriance des couleurs brutales.
Exigeant jusque dans le moindre détail, il revendique avant toute
chose l’omnipotence du travail, car c’est en travaillant que
l’on se rencontre, ça c’est la meilleure manière. La peinture,
pour lui, est la respiration possible du monde, pas celui des esthètes
dans la forteresse de leur cage dorée, mais bien celui, universel,
des gens ordinaires ou non, des cocos comme des vrais amateurs de
soleil, de champs et de ciels.
Comment imaginer que voisins et contemporains d’une telle force
vive aient pu supporter celui qu’ils ont tous préféré considérer
comme alcoolique et dément ? Dans sa quête du vrai et de l’essentiel,
il leur renvoyait dans un miroir sans concession la pusillanimité
de leurs ternes existences, leur incapacité à s’abstraire de la
trivialité et de la cupidité quotidiennes. Antonin Artaud ne s’y
est pas trompé qui rêvait que la vie devienne aussi belle que
dans une simple toile de Van Gogh.
Dans l’espace théâtral qui se fait métaphore des années de création
du génial Vincent, Jean O’Cottrell évolue entre absinthe et bouquet
d’iris, devant le chevalet et la toile encore vierge. Gestes modestes
et quotidiens avant la mue finale, lorsque, crucifié sur sa dernière
défroque, il évoque avec une émotion et une force saisissantes le
départ de cet être voué à l’incompréhension d’un monde qui s’est
pourtant, sans vergogne ni remords, emparé de la manne que lui offrait
post mortem cet illuminé génial et prophétique.
Une leçon de l’art au plus noble degré de son utilité universelle,
servie par un comédien magnifiquement inspiré.
Un bonheur à s’offrir, toutes pollutions cessantes… Théâtre Le
Lucernaire 6e. A.D.
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