UN PETIT JEU SANS CONSEQUENCE

Article publié dans la Lettre n° 203


UN PETIT JEU SANS CONSEQUENCE de Jean Dell et Gérard Sibleyras. Mise en scène Stéphane Hillel avec Valérie Karsenti, Eliza Maillot, José Paul, Marc Fayet, Gérard Loussine.
Bruno a du vague à l’âme. Il se promène pour une dernière fois dans le parc de la maison de campagne qui est vendue. Que de souvenirs... La famille et les amis sont venus faire leurs adieux autour d’un pique-nique. Bruno suit les traces de son enfance avec Claire. Ils forment depuis douze ans un couple parfait, un modèle pour leur entourage. Claire est agacée d’être référencée. Par bravade, elle confie à Patrick, le pique assiette maison, qu’ils se séparent. Naturellement, cette « fausse confidence », faite sous le sceau du secret, se répand comme une traînée de poudre. Les langues se délient sous l’air fameux de « maintenant, je peux bien te le dire...» Les ressentiments se déversent sans retenue. Bruno veut arrêter ce jeu idiot, mais Claire, véritable Merteuil en pantalon, veut jouer avec ce brûlot.
Cette rentrée théâtrale est très dense. D’ores et déjà, Un petit jeu sans conséquence caracole dans le peloton de tête. Jean Dell et Gérard Sibleyras avaient signé le drôle Béret de la tortue. Ils nous offrent une bouffée de joie et de rire. Ces fausses confidences, à l’ère du Pacs, confirment leur patte humoristique. Ils ont écrit des rôles en or, les cinq caractères sont bien dessinés, mélangeant humour, alacrité avec une finesse d’observation. Bruno, alias Marc Fayet est l’image de l’homme moderne installé dans son couple avec ses charentaises. C’est un type bien qui manque de fantaisie mais, malgré cela, les candidates sont légion. Valérie Karsenti distille l’air du mensonge avec un charme destructeur. Eliza Maillot, la meilleure amie, joue avec talent une idiote jubilatoire. L’explication du cercle polaire avec ses plots, ses airs effarés, est un moment d’anthologie. D’ailleurs, si vous ne riez pas, allez consulter séance tenante. Avec José Paul, la géographie devient poésie. Il peut vous raconter les bobards les plus fous avec un sérieux et un aplomb désarmants. Il semble inventer son texte tous les soirs. Mais il faudrait qu’il avoue enfin le fin mot de l’affaire de l'étang. Gérard Loussine est un garçon éminemment sympathique. Il campe Patrick avec la nonchalance d’un scout attardé. Ne lui proposez jamais un jeu de plage. Stéphane Hillel a dirigé avec talent et légèreté ce marivaudage contemporain interprété par cinq comédiens qu’on adore. Théâtre La Bruyère 9e (01.48.74.76.99) (Lettre 203).


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