UN CHAPEAU DE PAILLE D’ITALIE
Article
publié dans la Lettre n° 347
du
10 décembre 2012
UN CHAPEAU DE PAILLE D’ITALIE d’Eugène
Labiche et Marc-Michel. Mise en scène Giorgio Barberio Corsetti
avec 24 comédiens et musiciens dont Véronique Vella, Coraly Zahonero,
Jérôme Pouly ou Nâzim Boudjenah, Laurent Natrella, Léonie Simaga,
Nicolas Lormeau, Gilles David, Christian Hecq, Félicien Juttner,
Pierre Niney, Adeline d’Hermy, Danièle Lebrun, Louis Arene.
« Tout ça pour ça » ! « Ça », c’est un chapeau de paille, mais pas
n’importe lequel, une pièce unique, faite sur commande et importée
d’Italie, que Cocotte, le cheval de Leonidas Fadinard, 25 ans, rentier,
a prise pour une brassée de picotin. L’incident ne serait pas trop
grave si Anaïs Beauperthuis, la propriétaire dudit chapeau, n’était
pas en plein rendez-vous galant dans les allées du bois de Boulogne
avec un militaire, et surtout si le pauvre Fadinard ne se mariait
pas dans une heure. Hélène, sa fiancée, et Nonancourt, son beau-père,
pépiniériste de son état, l’attendent de pied ferme avec toute la
noce. Mais il faut malheureusement compter avec Beauperthuis, le
mari d’Anaïs, bien connu pour son tempérament jaloux et violent.
Le lieutenant, affolé donc ombrageux, et sa maîtresse volage, morte
de peur donc hystérique, s’incrustent chez le futur époux et le
somment de dégoter un couvre-chef identique avant que le mari découvre
son infortune. Tandis que Félix, son domestique, s’affaire et accueille
tout un chacun dans un appartement encore en travaux, Fadinard se
met en chasse d’un chapeau de paille, à son corps défendant. Son
oncle Vésinet, sourd comme un pot, est arrivé de province juste
avant l’incident avec un mystérieux cadeau, enfermé dans une grande
boîte ronde en carton. Tout à sa quête, Fadinard prend guère le
temps d’engager un dialogue de sourds avec un oncle, au demeurant
fort sympathique, encore moins de s’intéresser au cadeau. Il s’attache
davantage à esquiver un beau-père qui rompt sa promesse de mariage
à chaque rencontre et « reprend » sa fille au moindre incident.
Tel un chien de chasse, le nez à ras de terre, Fadinard court chez
la modiste, puis se rend chez une baronne qui serait en possession
d’un chapeau identique. Aux abois, il court d’une piste à l’autre
mais toutes se révèlent infructueuses. Il traîne, en revanche, invariablement
derrière lui, comme un boulet, une noce qui le suit à la trace et
provoque un nombre impressionnant de dégâts…
Le génie comique de Labiche est très maîtrisé dans cette comédie,
course échevelée d’obstacles infranchissables, dus à un engrenage
de péripéties vécues dans l’affolement, attisées par une succession
de quiproquos totalement absurdes. Si les affres vécues par Fadinard
représentent pour lui un véritable cauchemar dont il ne peut se
dégager, elles sont pour le spectateur une source d’allégresse et
de rires incoercibles.
Giorgio Barberio Corsetti fait feu de tout bois pour attiser les
flammes de ce vaudeville aux rebondissements délirants. Sa mise
en scène trépidante emporte dans des péripéties incontrôlées les
comédiens qui jouent, dansent et chantent, arborant des costumes
dans le ton du comique de la pièce. Ils accomplissent toutes sortes
d’acrobaties, s’appropriant un décor follement inventif. Le rôle
de Nonancourt est joué par Christian Hecq. Encombré par le cadeau
de mariage de son personnage, un myrte planté de ses propres mains
le jour de la naissance de sa fille et dont il ne se séparerait
pour rien au monde, il se laisse aller avec son talent habituel
à l’une de ses interprétations dont il a le secret. Il désigne à
la vindicte publique le pauvre Fadinard, excellent Pierre Niney,
pendant que les autres comédiens redoublent d’ingéniosité. Comédie
Française-Théâtre Éphémère 1er. Pour
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